Une histoire gourmande et diplomatique explorée par Arthur Vido1, historien béninois dresse un portrait des cours royales, Royaume du Danhomé et de Sahé au XVIIIe st XIXe siècles. L’auteur, universitaire béninois, s’inscrit dans la jeune école historique africaine qui choisit de « décoloniser » l’histoire tout en faisant une histoire scientifique pour mieux connaître le passé du continent.
Dans l’introduction il rend hommage à ces prédécesseurs et collègues dans l’écriture de l’histoire du Bénin. Toutes les références se retrouvent en bibliographie y compris, il faut le noter, les mémoires de maîtrise.
L’auteur définit le cadre spatial et temporel de son étude sur un sujet neuf : les cuisiniers des cours royales à partir des sources écrites, essentiellement anglaises et françaises (Récit de voyages négriers, rapports de missionnaires). Les deux cartes proposées sont hélas trop peu lisibles.
Les cuisiniers royaux : présence et raisons liées à leur choix
Les deux royaumes étudiés Sahé et Danhomé2 sont des États négriers, guerriers pour la capture des esclaves et en relation avec les Européens. Les voyageurs, marchands, capitaines de navires négriers, missionnaires font mention dans leurs témoignages de la présence de nombreux cuisiniers aussi bien à la cour des Hoéda (Sahé) que des Fon (Danhomé), rares présences masculines à la cour. Ce sont des dignitaires ayant un rôle politique comme le montre le chapitre trois.
Il semble que certains d’entre eux aient servi dans les factoreries côtières auparavant. Ils jouent u rôle lors de l’accueil des étrangers africains comme européens.
L’auteur explique qu’à la cour le roi n’est servi que par des femmes, ses nombreuses épouses ou des servantes. Les épouses royales étant sacrées nul ne pouvait les voir. Le roi lui-même ne peut être vu lors de ses repas.
Formation des cuisiniers et mets apprêtés
Ils sont formés par les Européens à Juda par exemple. L’auteur revient sur la nature des forts et comptoirs de la côte. Il fait une description précise de Fort Saint Louis de Grégory (Gléhoué) qui pourrait être utilisée dans un cours sur le commerce triangulaire (plans p. 50-51).
Cette formation permet aux cuisiniers de confectionner des plats européens , pour les plats locaux ils puisent dans les traditions familiales. Ils se fournissent en denrées dans les plantations royales dont on a quelques informations sur le mode de mise en culture.
L’auteur aborde les circonstances durant lesquelles des étrangers sont conviés à la table royale. Il présente quelques plats africains notamment le canalou ou calalou, sorte de ragoût à la sauce gombo différemment apprécié par les Européens en fonction de son caractère plus ou moins pimenté, et servi avec des boulettes de maïs ou de manioc.
Les plats tant africains qu’européens sont servis à l’européenne dans le but de mettre à l’aise les étrangers avec qui on fait commerce.
Les cuisiniers dans la sphère politique et diplomatique de Danhomé
Si la rumeur attribue la mort du roi Guézo à son cuisinier qui l’aurait empoisonné, il est certain que les cuisiniers siégeaient au conseil de gouvernement. Leur rôle diplomatique est réel en contribuant à recevoir les hôtes étrangers. Parlant plusieurs langues ils sont parfois chargés des relations avec les Blancs comme on le voit à l’époque de Gbéhanzin3.
Un petit ouvrage plaisant qui ouvre sur un élément du patrimoine culturel.
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1Il a déjà publié, toujours chez L’Harmattan : Biographie du roi Kpengla du Danhomè (1774-1789), Le Yovogan. Un haut dignitaire du royaume du DanhomèXVIIIe-XIXe siècle, Le patrimoine historique au service du développement du Bénin
2L’orthographe retenue est celle de l’auteur
3Béhanzin 1845-1906 https://www.universalis.fr/encyclopedie/behanzin/