Ecrit comme un roman policier, La traque d’Eichmann retrace le parcours du dignitaire nazi ainsi que celui de ses ravisseurs. Le récit débute par l’attente du suspect par les services secrets israéliens, avant de revenir sur le parcours du responsable de l’extermination des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Son action dans la déportation des Juifs de Hongrie est rappelé, à travers le parcours d’un jeune Juif, de l’arrestation et de l’envoi dans le ghetto de Munkács au trajet vers Auschwitz et à son travail comme Sonderkommando.

Le parcours d’Eichmann

Le plan mis en place par Eichmann est ensuite détaillé. Il repose en grande partie sur une collaboration avec Rudolf Höss, commandant du complexe d’Auschwitz. Seuls les Juifs de Budapest restent en Hongrie. Horthy, régent de Hongrie, s’oppose aux déportations sous la pression internationale. Eichmann n’en tient pas compte. Hitler propose de laisser 40 000 Juifs de Budapest émigrer en Palestine. Eichmann refuse de s’y conformer, alors qu’il doit dissoudre son unité. Il envoie notamment un convoi de 27 000 Juifs à pied vers Auschwitz.

Neil Bascomb évoque ensuite le choix difficile des hauts dignitaires nazis à juger ainsi que le manque de moyens mis en oeuvre. Les avis sur le sort à leur réserver différent. Ainsi, Churchill se prononce pour des exécutions sommaires, Staline veut des procès alors qu’Eisenhower insiste sur la présence de journalistes pour révéler au monde entier l’horreur des crimes nazis.

Eichmann obéit aux ordres jusqu’à la fin du conflit, tentant, à la demande d’Himmler de rassembler 1200 Juifs qui auraient pu servir d’otages pour une négociation. La ville de Berlin tombe et il se rend à la place chez Kalterbrunner, qui dirige le bureau central de sécurité du Reich. Ce dernier lui annonce la mort d’Hitler et lui demande de rassembler des hommes pour mener une résistance. Mais Himmler lui ordonne de ne pas tirer sur les Alliés.

Sa fuite

Eichmann se réfugie dans la montagne, après avoir laissé des instructions à sa femme. Un seul de ses hommes lui reste fidèle et il n’a pas prévu sa fuite. La traque des chefs nazis s’intensifie. Certains sont arrêtés, d’autres se suicident. D’autres encore sont exécutés, notamment par le NKVD et la Haganah.

Wiesenthal, déporté pendant la guerre, a perdu sa femme et sa mère. Il retrouve le goût à la vie en se consacrant à la traque des criminels nazis. Pour cela, il postule, avec succès, pour travailler dans l’Unité des crimes de guerre de l’armée américaine. Eichmann suscite rapidement son intérêt en raison de son rôle central dans l’organisation des centres de mise à mort.

Parallèlement, Eichmann est arrêté puis travaille dans un camp de prisonniers SS en dissimulant son identité alors qu’il est cité comme un des artisans de la Solution finale lors du procès de Nuremberg. Il a toujours pris soin d’être discret et de ne pas laisser de photographies de lui. Après son évasion du camp de prisonniers, à l’aide d’anciens officiers SS, il devient bûcheron.

La traque

La Haganah se lance à sa poursuite et parvient, enfin, à trouver une photographie d’Eichmann. Mais les procès marquent un temps d’arrêt après le procès de Nuremberg. Les Alliés ont d’autres préoccupations avec le début de la Guerre froide. Eichmann en profite pour rejoindre l’Argentine. Il fait ensuite venir sa femme et ses enfants auprès de lui. Ses fils, peu prudent, tiennent des propos antisémites dans la communauté allemande. Ainsi, Nick Eichmann entretient une relation avec une jeune fille dont le père est juif. Rapidement, ce dernier est convaincu qu’il est le fils d’Adolf Eichmann et prévient le procureur Fritz Bauer. Ce dernier craint des fuites et dispose de peu de moyens. Par conséquent, il transmet l’information au Mossad, qui dépêche des hommes sur place pour enquêter. Il s’adresse ensuite directement à Haïm Cohen, ministre israélien de la Justice.

Ben Gourion souhaite capturer Eichmann vivant et le juger en Israël. Le Mossad vérifie minutieusement qu’il s’agit bien d’Eichmann avant de monter une opération. Avec le Shin Bet, le service de sécurité intérieure israélien, il monte une équipe constituée « de types honnêtes qui puissent faire un travail de salaud ». Leurs itinéraires sont évoqués comme celui du « faussaire », Shalom Dani, qui s’était évadé d’un camp de concentration au moyen d’un faux laisser-passer fabriqué à partir de papier toilette. Ces hommes expérimentés ont l’habitude de travailler ensemble, ils intègrent dans leur équipe un médecin, chargé de veiller sur la santé d’Eichmann, qui doit être drogué. Ces hommes ont été touchés par l’antisémitisme ou la Shoah. La préparation est minutieuse, ne laisse aucune place au hasard. La difficulté majeure est de ramener Eichmann, l’avion est privilégié.

La capture

On suit les préparatifs minutieux du départ de ces hommes, puis leur surveillance d’Eichmann sur place. Ils préparent ensuite l’enlèvement, prévoyant de le garder prisonnier jusqu’au départ de l’avion, censé être un vol diplomatique. L’arrestation d’Eichmann se fait sans alerter la police, mais ses fils tentent de mobiliser la communauté allemande de Buenos Aires, sans grand succès.

Lors des interrogatoires, Eichmann est coopératif. Il reconnaît en effet être Adolf Eichmann, raconte sa fuite et son exil, donne des informations précieuses sur Mengele. L’équipe reçoit alors de nouvelles instructions pour procéder à la capture du médecin d’Auschwitz. L’idée est de ramener les deux nazis par le même vol.

Dans la villa, l’atmosphère est oppressante. L’équipe d’agents secrets alterne entre ennui et profond dégoût envers Eichmann. L’allure d’homme ordinaire du criminel nazi les perturbe également. Eichmann n’assume pas ses actes, préparant déjà des arguments de défense pour son procès. Après de longues discussions, il accepte de signer un document attestant qu’il se rend en Israël pour être jugé, de son plein gré.

Le jour du départ, la traque de Mengele est un échec. Seul Eichmann doit embarquer. Les Israéliens ont prévu de lui faire prendre des sédatifs et de le faire passer pour un membre d’équipage. Le trajet est périlleux en raison de la longueur du vol. C’est une réussite. Le procureur Fritz Bauer est averti du succès de l’opération avant le discours de Ben Gourion. Ce dernier annonce la tenue d’un procès pour génocide. Le déroulement du procès, très médiatisé et l’exécution sont ensuite racontés.

Jennifer Ghislain