En cette année du cinquantenaire des indépendances africaines l’auteur plaide pour un bilan lucide, un regard « normalisé » qui ne soit selon son expression ni « dépit amoureux » ni “culpabilité post-coloniale ». L’opposition entre deux visions du continent propose un procédé exploitable avec des élèves de lycée en introduction exploratoire d’une question mais les apports restent trop superficiels pour répondre aux problématiques posées. A chaque chapitre les exemples proposés sont très variés; trop peut-être.

Vincent Hugeux est journaliste, Diplômé de l’École supérieure de journalisme de Lille et ancien élève de l’Institut d’études politiques de Paris.
Après Le Monde et La Croix, il est aujourd’hui à l’hebdomadaire L’Express où Il est spécialiste de l’Afrique et du Proche-Orient.
Dans son prologue il présente son propos: l’éloge de l’afro-réalisme et sa méthode: la rencontre à chaque début de chapitre entre un Candide confiant des chances de l’Afrique et une Cassandre sensible aux rivalités des grandes puissances, tous deux face à un arbitre de leurs joutes qui n’est hélas pas un expert et qui vient apporter quelques éclairages complémentaires trop souvent superficiels.

Les deux premiers chapitres sont consacrés aux questions démographiques, fardeau ou atout du développement?
Surpopulation, densités moyennes, flux migratoires; de ce tour d’horizon rapide on retiendra les très forts déséquilibres de densité et les risques environnementaux qui en découlent mais rien ne vient expliquer les réalités par exemple la densité record du Rwanda sur les sols volcaniques. Si les migrations sont présentées sous leurs divers aspects: exode rural, déplacés et migrations vers l’Europe elles ne sont guère analysées.
Le second chapitre passe en revues les pandémies: SIDA et paludisme avec quelques éclairages sur l’avancement du vaccin sur ce second fléau avant de mesurer mortalité infantile et surmortalité des femmes en couche.

Le constat démographique conduit au chapitre trois à la question des conflits armés, après l’énumération des lieux de tension et des sources de conflits, vouloir éclairer des situations aussi diverses que le Darfour, la Somalie, la R.D.C. en une à deux pages par conflit était une gageure impossible, si l’odeur du pétrole est présente les autres causes économiques semblent ignorées.

Et si l’Afrique était le nouveau terreau du terrorisme? Des informations journalistiques, à peine plus qu’une dépêche AFP pour faire le tour des incidents, attentats et autres violences mises sur le compte d’Al-Queïda et/ou des trafiquants en tout genre.

Qu’en est-il de la démocratie en Afrique? La galerie de portraits des chefs d’états élus ou auto-proclamés laisse peu d’espoirs d’un fonctionnement d’institutions démocratiques dont on ne voit guère les fondements, les conditions de création, le poids des partis uniques ou des influences occidentales. Par contre le chapitre 6 entier est consacré à la question de la corruption et aux amorces récentes quelques fois couronnées de succès de lutte anti-corruption malgré la faiblesse des sociétés civiles. Si les textes de loi existent la tentation corruptrice reste grande pour emporter un marché. Les exemples proposés pour éclairés le débat sont nombreux, trop sans doute pour permettre une analyse approfondie.

Et si la solution résidait dans des États-Unis d’Afrique? Ce chapitre est l’occasion de revenir sur les découpages étatiques nés de la décolonisation et de faire un rapide retour sur les premières tentatives derrières Nkrumah puis l’échec de l’O.U.A. L’auteur analyse les débuts laborieux d’une nouvelle entité: l’Union Africaine chère à la Libye et au Sénégal et les résistances fortes en 2009 des grands états comme l’Afrique du Sud, l’Angola et Éthiopie et montre les comment les “casques blancs” peinent à s’interposer dans les conflits du continent.

L’économie est abordée au chapitre 8: Croissance de crise ou crises de croissance?
Si la croissance économique moyenne par an est bien de 5% au cours de la décennie passée c’est surtout grâce à la flambée des prix du pétrole et des matières premières. De plus elle profite surtout aux élites politiques comme le montre l’exemple du Niger développé ici. La question de l’aide, qu’elle soit française ou chinoise, positive ou véritable fléau est posée? De même sont montrés les “bons élèves”, bons gestionnaires: Rwanda ou Ghana et évoqués la faiblesse des infrastructures. Enfin ce chapitre, un peu plus étoffé que les autres, permet un point sur la fracture numérique, en quelques chiffres, espoirs mais aussi espace de subversion. L’évocation des échanges croissants avec la Chine reste peu concrète, si l’opacité des contrats, le rôle de l’état chinois et les transferts de main d’ oeuvre sont cités quelques exemples précis auraient été éclairants. Un dernier point est soulevé, celui de la location ou de l’achat de terres agricoles par de grandes sociétés étrangères, voire des états en mal d’espace.

“De la Colo à l’écolo”, le chapitre suivant passe de Copenhague à la spiruline, au jatropha et au pari du solaire, une liste à la Prévert sur les traces de quelques Africains défenseurs de l’environnement. La question de la déforestation est malheureusement abordée à l’échelle du continent, on reste sur sa faim tant à propos de la surexploitation de la forêt gabonaise que de la question de l’ivoire et des éléphants.

Le livre se termine sur les derniers feux de la Françafrique. Quelques points sur cette réalité depuis 50 ans, sans grande révélation suivis d’une évocation du 25ème sommet Afrique -France à Nice en 2009. C’est surtout pour le journaliste l’occasion de montrer comment est conduite la politique africaine de l’Elysée depuis 2007 à partir de quelques exemples: relations avec le Gabon, le Rwanda et avec quels hommes: Robert Bourgi, Claude Guéant et Patrick Balkany.

Un livre facile à lire à proposer à tout lecteur ignorant des réalités africaines.