Un manuel pour préparer le concours commun d’entrée à Sciences Po

En 2023-2024, le concours d’entrée en première année à l’un des 7 IEP (Aix-en-Provence, Lille, Lyon, Rennes, Saint-Germain-en-Laye, Strasbourg et Toulouse) consiste en trois épreuves écrites, se déroulant le samedi 20 avril 2024. Parmi les différentes épreuves, l’épreuve de « Questions Contemporaines (durée 3 heures, coefficient 3) » porte cette année sur les thèmes du “corps” et de « l’alimentation ».

L’épreuve de Questions contemporaines doit permettre d’apprécier la capacité des candidates et des candidats à développer une argumentation sur un sujet de débat lié avec l’actualité des années récentes.

Il ne s’agit pas d’une épreuve de connaissances ni a fortiori d’une question de cours. Il est attendu que les candidates et candidats réfléchissent par eux-mêmes et construisent une argumentation qui leur est propre. Les candidates et candidats doivent développer leur thèse tout au long de la dissertation, en s’appuyant sur des connaissance acquises pendant leur scolarité, ainsi qu’au cours de lectures récentes et d’un suivi régulier de l’actualité française et internationale. […] Il est attendu [qu’ils] questionnent les enjeux politiques sociaux, économiques, historiques, philosophiques, voire juridiques, des sujets proposés.

Le corps d’Anne Bazin et Cédric Passard (dir.), Atlande, 2024, page 13.

Pour prolonger le très bon volume paru l’année dernière sur la peur, les candidats préparant le concours pourront se reporter sur ce nouveau manuel traitant du corps. Histoire, anthropologie, droit, sociologie, économie, art, les entrées thématiques sont nombreuses, synthétiques et agréables à lire.

Destinée à des candidats désirant faire un point rapide sur la question, cette synthèse est construite en 27 fiches thématiques. Du corps comme phénomène culturel et social jusqu’aux enjeux du transhumanisme, les auteurs, sous la houlette d’Anne Bazin et de Cédric Passard (Sciences Po Lille), font une mise au point sur un aspect du sujet en 6 pages.

Parmi les fiches, le candidat préparant le concours d’entrée pourront mobiliser des exemples sur le corps politique (chapitre 4), la « racisation des corps » (chapitre 9), la santé (chapitre 14), le sport (chapitre 26), la mort (chapitres 23 et 24) et le numérique (chapitre 26).

Parmi les fiches les plus remarquables, la numéro 22 tente de répondre à la question du statut social des individus lors de la dégradation du corps d’un individu en fin de vie. L’auteur insiste d’abord sur le processus souvent graduel de dégradation physique et mental d’un individu âgé. La mort, proche du temps du quotidien à l’époque médiévale, devient de plus en plus cachée et médicalisé, souvent hors du domicile aux XXe et XXIe siècles. Une anecdote permet de comprendre ce passage du corps vivant au corps mort par le prisme du droit. Un individu peut très bien, selon les conventions sociales définies par la législation d’un Etat, être considéré comme vivant dans un pays, et mort dans un autre. En France, un individu est déclaré mort à partir de critères relatifs au cerveau et au tronc cérébral. Ce dernier critère est le seul utilisé au Royaume-Uni, d’où des différences de diagnostic. Un peu plus loin, le passage à propos des enjeux mémoriels de la conservation d’un corps pourrait être mobilisé dans le cadre d’une séance sur les liens entre l’histoire et les mémoires en terminale HGGSP.

Les corps des dirigeants, qui sont souvent parés de vertus exceptionnelles de leur vivant, font ainsi l’objet d’un traitement particulier, prolongeant le statut qui était le leur d leur vivant. A l’image des pyramides d’Egypte ou du mausolée de Lénine à Moscou, leurs tombes sont supposées refléter leur grandeur ou permettre de les honorer. Dns le cas des pharaons, la momification visait à conserver leur enveloppe charnelle intacte car cela était vu commune condition pour accéder à une forme d’immortalité. Dan celui de Lénine, l’objectif est d’éduquer le peuple. Le lieu de sépulture des dirigeants peut de même constituer un enjeu, qu’il s’agisse de les glorifier ou au contraire de souligner leur indignité. Le cas de la dépouille du maréchal Pétain, qui a mené la bataille de Verdun lors de la Première guerre mondiale avant d’être chef de l’Etat collaborationniste de Vichy pendant la Seconde guerre mondiale, l’illustre. Ce dernier a été enterré à l’île d’Yeu. Pour ses partisans, cela constitue un affront, si bien qu’en 1973, un commando mis en place par l’avocat d’extrême droite Jean-Louis Tixier-Vignancour a enlevé le cadavre dans l’intention de le transférer à Verdun.

Le corps d’Anne Bazin et Cédric Passard (dir.), Atlande, 2024, page 172.

En conclusion, cette synthèse, un peu plus fournie que l’opus de l’année dernière, s’avère être une indispensable ressource pour la préparation du concours commun d’entrée dans l’un des IEP du réseau Sciences Po.

Pour aller plus loin :

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Antoine BARONNET @ Clionautes