Comment un ancien acteur hollywoodien élu deux fois président des Etats-Unis d’Amérique est-il parvenu à faire des Etats-Unis les seuls survivants de la Guerre Froide ? Et si l’histoire ne lui avait pas rendu justice ? Ou au contraire, est-il vraiment le crétin qu’il donne à voir ?
Dernier opus de Jean-Yves Le Naour, auteur prolifique tant d’histoire que de scénarios de bande dessinée (comme par exemple Gisèle Halimi, l’insoumise parue en 2023) s’attache en une soixantaine de pages à expliquer la personnalité de Ronald Reagan et ses actions au cours de ses deux mandats.
Le dessin et la mise en couleurs de Cédrick Le Bihan sont à la fois réalistes et empruntent à l’univers des Comics américains avec des vignettes couvertes de pointillés, comme reproduites dans les journaux de l époque.
Le titre de l’ouvrage, pour le moins provocateur, intrigue. Un chef d’État d’une telle grande puissance peut-il effectivement être un crétin ? Ceux qui se souviennent plus ou moins des années Reagan ne gardent généralement que quelques images en tête : des sourires de cinéma, la poignée de main à Mikhaïl Gorbatchev … et une épouse qui tombait dans les bégonias. La mémoire collective est-elle injuste ? Déformée par ce qu’elle a vu par la suite ?
Dans cette œuvre au vitriol, l’auteur s’attache à montrer pas à pas à quel point le titre est mérité.
Paresseux, peu intéressé par les affaires de l’État, incapable de maintenir une attention plus de quelques minutes Ronald Reagan est présenté comme un crétin mais qui a une force : sa capacité, grâce à son passé d’acteur, de mémoriser des discours entiers. Marqué « à la culotte » par des membres du gouvernement des responsables des grandes agences gouvernementales qui se méfient de son inaptitude à comprendre les enjeux du monde, il parvient malgré tout à imprimer sa marque, notamment par ses blagues et ses bourdes.
Grand communiquant malgré des dispositions politiques indigentes et un mépris profond pour la notion de travail et d’effort, Reagan n’est posé en grand gagnant de la Guerre Froide. S’attribuer la victoire, alors qu’il ne s’agit que de la défaite (économique surtout) de l’adversaire … il n’en fallait pas plus à Jean-Yves Le Naour pour terminer l’ouvrage avec un parallèle en forme de question : Ne ressemblerait-il pas à Trump ?
Les événements récents ne peuvent pas le donner totalement tort.
Une BD bien documentée et caustique qui pourrait prêter à rire, si l’histoire ne semblait pas en résonance avec aujourd’hui.