« Population & Avenir, revue indépendante alliant rigueur et pédagogie, vous présente une analyse originale des enjeux actuels. Vous y trouverez une source d’informations, de réflexions et d’argumentaires amplement illustrés par des cartes, des graphiques, des tableaux, des schémas… »

ÉDITORIAL par Gérard-François DUMONT
L’INDE PARVENUE AU PREMIER RANG  DES POPULATIONS DU MONDE : QUELLES RAISONS ?

L’Inde est désormais le pays le peuplé du monde, résultat de différents facteurs à la fois historiques et contemporains :

  • les deux sous-continents les plus peuplés ont toujours été l’Asie orientale et le sous-continent indien, avec des populations représentant selon les périodes entre le cinquième et le quart des populations du monde
  • l’Inde est parvenue à des rendements agricoles permettant de nourrir avec ses propres productions alimentaires une part croissante et nettement majoritaire de sa population. Elle est même innovatrice en matière d’agriculture écologique
  • l’Inde a su s’approprier les connaissances acquises dans les pays du Nord pour améliorer la santé de sa population, ce qui s’est notamment traduit par une baisse de la mortalité infantile, maternelle et infanto-adolescente dans un contexte d’amélioration du niveau d’éducation. Cela a permis une forte hausse de l’espérance de vie.
  • le pays a compris que l’avancée dans la transition démographique ne devait pas être brusquée, mais dépendait d’une amélioration progressive du système sanitaire et de l’éducation en premier lieu l’alphabétisation
  • la transition démographique de l’Inde a pu continuer avec régularité aussi parce que ce pays a connu une stabilité institutionnelle et géopolitique
  • le système migratoire de l’Inde a globalement favorisé le développement du pays
  • mais l’Inde n’avance pas partout à la même vitesse. Les écarts en matière de mortalité infantile ou de fécondité peuvent varier du simple au double.

 

DOSSIER par Sébastien BOURDIN et André TORRE

L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE, NOUVEAU LEVIER DE DÉVELOPPEMENT ET DE TRANSITION ÉCOLOGIQUE POUR LES TERRITOIRES

L’économie circulaire est une opportunité de développement des territoires, en particulier pour la ruralité.

Elle vise à réduire les déchets et à maximiser l’utilisation des ressources en les réutilisant, en les recyclant, voire en les régénérant. L’objectif des démarches d’économie circulaire est ainsi de réduire la pression sur les ressources, de baisser les émissions de gaz à effet de serre et de limiter les rejets, tout en favorisant les circuits courts. Mais sa dimension territoriale, c’est-à-dire l’identification des ressources disponibles à l’échelle locale et la réflexion à les utiliser de manière optimale, est souvent oubliée. Les initiatives d’économie circulaire nécessitent en effet une coopération étroite entre les acteurs locaux pour une meilleure prise en compte des impacts environnementaux et la mise en place de solutions adaptées pour les réduire.

En se référant à l’ensemble des activités économiques en France, environ 2% des emplois sont relatifs à l’économie circulaire, représentant ainsi l’équivalent de 576 000 emplois en 2015, dernière année disponible. En termes d’évolution, la croissance nette de 3% des emplois circulaires entre 2008 et 2015 est supérieure à la tendance observée sur cette même période pour l’emploi total en France (1,5%). Les activités liées au recyclage et à la valorisation des déchets connaissent les plus forte croissance, de l’ordre de 6%, contre 1% d’emplois supplémentaires créés pour les activités d’allongement de la durée de vie des biens. Cela peut s’expliquer par le fait que de nombreux investissements ont été réalisés par les collectivités locales pour développer des usines de gestion des déchets technologiquement plus efficaces. On peut également avancer que la communication s’est accrue auprès des citoyens pour soutenir les initiatives de tri des déchets, et que ces deniers y sont clairement sensibles.

L’observation de la dynamique de l’économie circulaire révèle qu’elle n’est pas uniformément répartie entre les zones d’emplois. Il s’agit essentiellement de territoires urbains. Pourtant, les espaces ruraux ont une carte à jouer en termes d’économie circulaire, avec la mise en œuvre de la méthanisation. Elle permet de valoriser les déchets organiques en produisant de l’énergie renouvelable et des fertilisants naturels. Elle permet aux agriculteurs de diversifier leurs sources de revenus. De plus, elle permet de traiter les déchets organiques à proximité de leur lieu de production, en réduisant ainsi les coût de transport et de traitement des déchets. Toutefois, elle peut rencontrer des problèmes d’acceptabilité de la part des populations locales.

 

DOCUMENT PÉDAGOGIQUE (libre de droits)

L’économie circulaire en France métropolitaine – Géographie des établissements entrant dans son champ à l’échelle des zones d’emploi

EXERCICE PÉDAGOGIQUE par Eric GACHET

LES UNITÉS URBAINES, UNE NOUVELLE GÉOGRAPHIE DES DYNAMIQUES TERRITORIALES

Cette proposition s’insère dans le thème 1 du programme de géographie de 3ème qui s’intitule « Dynamiques territoriales de la France contemporaine ». Il s’agit mieux comprendre l’organisation des espaces urbains, en recourant à la notion d’unité urbaine.

Dans la 1ère étape, les élèves répondent à des questions sur divers documents (tableau, cartes, texte, plan) pour définir et expliquer l’étalement urbain avant de schématiser une aire urbaine locale. Puis, dans une deuxième étape, ils doivent rédiger un développement construit pour décrire l’organisation d’une unité urbaine.

ANALYSE par Alexandre DUCHESNE
MAYOTTE : MUTATIONS DÉMOGRAPHIQUES ET MULTIPLES ENJEUX POLITIQUES

Face à des dynamiques démographiques très exceptionnelles, les multiples enjeux de Mayotte sont-ils insurmontables ou conduisent-ils à des impasses ?

Mayotte, petit archipel de 374 km² composé de deux îles principales (Petite-Terre et Grande-Terre) se situe au sud de l’archipel des Comores, chapelet de quatre îles principales d’origine volcanique dispersées entre Madagascar et la côte est-africaine. Entre 1975 et 2011, l’île connaît une évolution statutaire qui fait d’elle, après le référendum de 2009, sous la présidence Sarkozy, le 101e département français. La société mahoraise, société bantoue-musulmane matrilinéaire, société de contacts entre les civilisations swahili et malgache, adopte donc le modèle républicain. L’alignement très progressif sur les standards métropolitains (droits, salaires, aides sociales) renforce le caractère attractif d’une île pauvre parmi les riches mais riche parmi les pauvres. S’ajoute au statut de département celui de région ultrapériphérique de l’Union européenne octroyé en 2014.

Le premier déséquilibre, plus visible, est démographique. Mayotte fait figure d’eldorado au sein d’une région est-africaine connaissant des problèmes de développement. Il est aussi le département qui, depuis 2011, connaît la plus forte croissance économique. Il en résulte une attractivité incomparable. Les étrangers sont ainsi devenus majoritaires dans la population. La maternité de Mamoudzou, au chef-lieu de l’île, souvent présentée comme étant la plus grande maternité d’Europe, a enregistré 10 795 naissances en 2022 avec 70% de naissances de mère comorienne. Mayotte est aussi une terre de départ, d’émigration. La jeunesse de Mayotte quitte massivement l’île : en 2017, un natif mahorais sur trois vit en-dehors de l’île. Plus de la moitié des départs de jeunes mahorais de 21 à 29 ans se font pour aller poursuivre des études en dehors de Mayotte dont l’offre d’enseignement supérieur est encore limitée. L’autre émigration de l’île est forcée : Mayotte est déjà actuellement, et de loin, le département expulsant le plus d’étrangers en situation illégale.

Face à une impasse économique, Mayotte semble donc évoluer vers un modèle de développement semblable aux autres départements d’outre-mer, fondé sur d’importants transferts de fonds publics et une consommation locale forte, soutenue entre autres par les salaires des fonctionnaires qui sont, comme ailleurs dans la France d’outre-mer, majorés. Département le plus pauvre de France, Mayotte est surtout le plus inégalitaire. 77% des habitants de l’île vivent sous le seuil de pauvreté national et une personne sur deux dispose de moins de 260 euros par mois. De l’aitre côté, une minorité de la population mahoraise a vu son niveau de vie considérablement augmenter en accédant aux emplois des secteurs publics et en bénéficiant parfois de rentes immobilières non négligeables.

Département en théorie, Mayotte se soit dans plusieurs domaines proposer une régime dérogatoire avec pour premier objectif la volonté de ralentir la pression migratoire sur le territoire. Par exemple, la protection universelle maladie n’est pas applicable à Mayotte, le revenu de solidarité active (RSA) est fixé à 50% du montant métropolitain et le montant des aides aux demandeurs d’asile non précisé. De plus, plusieurs modifications des lois métropolitaines introduisent un régime d’exception, comme en matière de droit du sol ou du traitement des demandeurs d’asile. C’est une impasse politique.

Situation économique dégradée, évolution politique complexe et sources de contradictions, Mayotte est aussi dans une impasse sociale qui se traduit en premier lieu per une insécurité et une délinquance très élevées et croissantes.

 

LE POINT SUR … par John F.MAY et Nasrullah ABBASI
PAKISTAN : UNE RECOMPOSITION DU PEUPLEMENT ?

Le Pakistan est un poids lourd démographique, au 5ème rang dans le monde derrière les États-Unis et l’Indonésie.

Depuis 1950, le Pakistan a bénéficié d’une forte diminution du taux de mortalité infantile. Des services de santé améliorés et plus accessibles ont aussi favorisé une baisse importante des taux de mortalité générale au Pakistan, faisant avancer le pays dans la transition démographique. En conséquence, l’espérance de vie à la naissance pour les deux sexes est passée de 35 ans en 1950 à 66,4 ans en 2022. Le déclin de la fécondité a été par contre plus lent au Pakistan, comparé à tous les autres pays de la région. En 2022, les jeunes de moins de 15 ans constituent 37% de la population totale du Pakistan. L’économie du Pakistan doit donc créer davantage d’emplois, et le pays doit apporter parallèlement des améliorations dans l’éducation et les soins de santé.

A cause de l’émigration des zones rurales vers les villes et d’autres facteurs, l’urbanisation progresse à un rythme rapide au Pakistan, ce qui nécessiterait des infrastructures mieux adaptées aux besoins dans les villes (assainissement, hygiène, réseaux d’eau potable performant, mobilité,…).

Placé dans le groupe des économies dites émergentes, les efforts de développement du Pakistan semblent encore insuffisants pour satisfaire les besoins de la population pakistanaise, ce qui explique l’importance de l’émigration d’une population insatisfaite. Pourtant le Pakistan bénéficie de plusieurs atouts majeurs pour capter son « dividende démographique ». Une telle période correspond à une fenêtre d’opportunité pour une croissance économique rapide si les politiques économiques et sociales mises en œuvre et les investissement réalisés sont satisfaisants. Le premier atout du Pakistan est donc sa composition par âge, avec une population jeune. Le deuxième atout de la population pakistanaise concerne le niveau d’éducation. Le Pakistan a déjà presque atteint l’objectif de la scolaire primaire universelle.

Pour bénéficier du « dividende démographique », le Pakistan devrait déployer plusieurs politiques dont certains prioritaires en satisfaisant une meilleure gouvernance : politique de l’emploi, programmes de réduction de la pauvreté et programme d’équité entre les sexes.