Cette leçon inaugurale du nouveau titulaire de la chaire Histoire et archéologie des mondes africains est un beau texte qui rend le lecteur plus savant mais aussi plus intelligent.
Un fil rouge accompagne cette réflexion sur l’histoire et l’Afrique : le récit qu’Ibn Battûta fait de deux fêtes qui eurent lieu en 1352 et 1353 dans la capitale, toujours introuvable, du royaume malien.
François-Xavier Fauvelle rappelle que l’histoire de l’Afrique est une histoire multiséculaire, faite de contact et de complexité. C’est pour lui l’occasion de citer ses grands prédécesseurs et collègues de Françoise Héritier à Felwine Sarr, de Jacques Becque à Achile Mbembe pour refuser le déni de l’Afrique né de la traite.
Chaque société peut dire son histoire, tel est le rôle des griots, somme de récits, sources indispensables pour les historiennes et les historiens1 de l’Afrique à traiter comme toute source. L’auteur rappelle aussi les sources écrites de la chrétienté érythréenne et éthiopienne et bien sûr du monde africain islamisé.
Ces sources montrent, sans contestation, la participation des sociétés africaines aux systèmes d’échanges mondiaux et la volonté des élites politiques de garder la trace de leur histoire.
La richesse du cette leçon tient aux nombreux exemples des échanges entre cultures, une « conversation des sociétés savantes » qui bascule dans l’inégalité avec la colonisation, temps de missions scientifiques qui « donnent au colonisateur le quasi-monopole de l’établissement du récit historique »2.
Alors quelles sources, quels récits retenir ?
Revenant à Ibn Battûta, François-Xavier Fauvelle le soumet à la critique de source, méthode bien connue des historiens, et montre l’intérêt du croisement des sources dont l’archéologie qui reste à développer. Il évoque les fouilles récentes et leurs apports et l’indispensable goût de l’enquête des archéologues, il rend hommage à Paulo Fernando de Moraes Farias3 mais aussi à ses maîtres et collègues des universités Paris I Sorbonne et Toulouse.
En conclusion, en annonçant le sujet de son futur cours au Collège de France, il réaffirme la complexité de l’histoire de l’Afrique entre villes et campagnes, animisme et religions du Livre.
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1 Je reprends ici la formulation de l’auteur
2 Cité p. 36
3 Spécialiste des sources épigraphiques du Moyen Age en Afrique de l’Ouest