« Depuis ses débuts, la Franc-Maçonnerie inquiète et nombre de fantasmes et d’idées préconçues sont encore véhiculés. Pourtant son objectif est de former des hommes libres, tolérants et ouverts qui essaient sans cesse de s’améliorer et d’améliorer la société. Considérer l’autre comme son Frère apprend au Franc-Maçon la tolérance, le respect de l’autre et à aimer l’autre dans ses différences. C’est ainsi que la Franc-Maçonnerie rassemble des hommes et des femmes de toutes croyances, de toutes religions, de toutes couleurs de peau, de toutes origines résolus à fraterniser en dépit de tout ce qui peut les séparer. »
C’est ainsi que les éditions Glénat présente cette série imaginée et publiée sous la direction de Didier Convard dont le tome 7 sous- titré « Neuf soeurs et trois frères » vient de paraître avec au scénario Pierre Boisserie et au dessin Éric Lambert. Après avoir exploré les périodes antiques, médiévales, le Nouveau-Monde, le tome 7 s’inscrit dans une période charnière, celle de l’année 1788. Alliant histoire et fiction, les auteurs nous proposent ici une véritable enquête policière mêlant Franc-Maçonnerie, Lumières et Monarchie absolue sous tension.
L’histoire débute par une interpellation aux alentours du château de Versailles. Artus, chevalier de Senissonne est interrompu et emmené auprès de Louis XVI qui le charge d’une mission particulière : enquêter sur la Loge des neuf sœurs. Cette dernière, fondée en 1776 et placée sous le patronage des Muses (les neuf soeurs du Parnasse), est connue à l’époque pour avoir accueilli des personnalités prestigieuses comme Benjamin Franklin et surtout pour avoir initié Voltaire, le 7 avril 1778, peu de temps avant son décès. Louis XVI, ici accompagné de ses deux frères, s’inquiète des idées diffusées par la loge qui remettent en question l’autorité de la Monarchie. Artus ne tarde pas à infiltrer la loge. L’imprévu se produit avec le meurtre mis en scène du Frère Lavallée lors de la fête de la Saint Jean. Qui est le meurtrier ? Qui empêche Artus d’atteindre la vérité ?
Le rythme, soutenu, fait penser aux aventures de Nicolas Le Floch. Ici, aucun temps mort dans cette histoire qui prend quelques libertés avec la réalité. Ici Louis XVI et ses frères sont présentés comme étant tous trois francs-maçons, mais des trois frères, il est quasi certain que seul le Comte d’Artois fut initié en 1777 par son Cousin, Louis Philippe d’Orléans, duc de Chartres. L’intérêt de cette fantaisie n’est pas négligeable. Loin des théories du complot développées sous la Révolution, elle permet de rappeler de manière opportune les divisions internes qui ont déchiré les francs-maçons, entre d’un côté les partisans de la Monarchie et, de l’autre, ses opposants adeptes des Lumières et de la remise en cause de l’ordre établi, illustré par la position et les propos de Louis XVI page 27. L’histoire permet également de présenter dans cet univers très masculin quelques personnages féminins forts dont Anne-Catherine Ligniville, la veuve d’Helvétius qui fut l’un des fondateurs de la loge des Neuf sœurs.
Le tome est, comme les précédents, accompagné d’un dossier permettant d’appréhender une partie de l’univers, des personnages historiques et des symboles maçonniques présents, et de rappeler la place majeure qu’occupait la noblesse dans la Franc-Maçonnerie d’alors. Cette bande-dessinée fait donc œuvre de pédagogie. A lire assurément !