Lancées à partir de 1885 dans le double but de transmettre l’amour de la patrie et de développer le fond scientifique naturaliste de la géographie de l’époque, les cartes Vidal-Lablache (du nom commercialement adapté du père de la géographie française) ont marqué les esprits de générations d’élèves et d’enseignants.
Le géographe Jacques Scheibling et l’éditrice-historienne Caroline Leclerc reviennent sur l’histoire de ce succès non démenti (800.000 exemplaires furent vendus dès 1920) à l’aide d’une collection privée (celle de Fred Perrin dont les coordonnées sont présentes dans l’ouvrage) regroupant la quasi totalité de ce qui a été publié entre 1885 et 1969.
Divisé en deux parties, le livre s’intéresse à « La France et son empire » mais également aux « Continents ». Les cartes sont reproduites avec grand soin en regard d’une page de texte les commentant.
Les espaces retenus sont souvent traités de manière double pour aborder les aspects naturels (la « carte physique ») et humains (la « carte politique », parfois présente en deux versions pour comparer les évolutions).
Comme l’utilisation passait par l’apprentissage (dont il est rappelé que la pratique fut développée davantage par les inspecteurs et les instituteurs qu’en fonction des préconisations de Vidal), la présence de nombreux toponymes hiérarchisés se perçoit sur bon nombre de cartes.
Ceci étant, cette technique de superpositions des noms présente ses propres limites et certaines cartes demeurent imbitables à l’image de celle de Paris intra-muros qui cherche l’exhaustivité ou mal structurées à l’image de celle sur l’industrie et le commerce de la France qui hiérarchise mal l’information (mais il est là rappelé que le parti pris du cartographe est une donne dont il faut tenir compte et Vidal n’était pas particulièrement porté sur les villes et l’industrie).
En revanche, l’auteur savait soigner le cadrage lorsque cela s’imposait (la carte des canaux se concentre sur une large partie nord de la France) et se rendre pédagogique lorsqu’il était question de visualiser les proportions des espaces (nombreux exemples d’inclusion et de comparaison dans le cartouche : le département d’Alger tient dans la Gironde, la Cochinchine « tient » largement dans la France). Les textes insistent d’ailleurs sur ces points (« L’Europe fait 1/3 de l’Afrique,… 1/4 de l’Asie », « La France tient 18 fois dans l’Europe »).
Une compilation agréable à parcourir qui permettra d’appréhender les évolutions des territoires mais surtout de se rendre compte que ces cartes constituent le reflet d’une époque passée…encore que certaines n’ont toujours pas été décrochées des classes et que les autres trouvent une seconde vie décorative dans le circuit de la vente d’occasion.