Paru en 2003, ce désormais classique de la géographie s’offre une troisième édition pour ses dix ans. Toujours dirigé par Annette Ciattoni et Yvette Veyret, l’ouvrage se structure en dix chapitres rédigés par les incontournables des sujets (Laurent Carroué sur la mondialisation, Guy Di Méo sur la territorialité, Rémy Knafou sur le tourisme…). Présentant les mêmes atouts (présentation claire quoiqu’un peu austère, large panorama des nombreux pans de la discipline…) et les mêmes limites (contributions de qualité diverse avec des chapitres permettant de bien dégager une portée générale et d’autres restant dans des analyses factuelles assez marquées) que le premier volume chroniqué par Jean-François Joly dans nos colonnes, l’opus se voit aujourd’hui enrichi de deux chapitres supplémentaires (100 pages de plus) laissant place à l’étude du développement durable et du tourisme.

C’est sans doute le premier chapitre (Thérèse Saint-Julien sur l’approche spatiale) qui apparait le plus réussi et le plus emblématique. Il est vraiment l’occasion pour les novices de découvrir les concepts clés et pour les plus aguerris, de reprendre un peu de hauteur et de vérifier certaines convictions. Regardons ces morceaux choisis : si l’espace est un ensemble de lieux interdépendants, ces lieux sont pourtant uniques et donc espacés. Ainsi, ils ont une position (dans un espace absolu) et une situation (localisation relative, par rapport à d’autres lieux). La mise en relation de liens permanents entre les lieux crée les réseaux (dont les réseaux sociaux). Le façonnement des lieux et de leurs interactions dessine une certaine mobilité. Et si une concentration devient un centre, c’est qu’elle a atteint suffisamment de complexité pour se différencier de son espace environnant.

Davantage distillés dans l’ensemble du livre, des éléments pertinents sont à glaner : la difficulté de travailler avec des sources non harmonisées (chapitres sur la population et sur les villes) ; la nécessité d’être précis sur les termes (concernant la migration, pour certains auteurs, si celle-ci n’est pas définitive, on préfèrera utiliser le terme mobilité) ; l’analyse des chiffres qui peut faire changer la donne (si la population urbaine augmente, les périmètres de la ville également, d’où la nécessité de regarder les choses à périmètre constant) ; l’inévitable dimension politique (choix de protéger systématiquement les paysages ou, de façon plus nuancée, d’en tenir compte dans les projets d’aménagement).

Bibliographies commentées, parfois sans autre intérêt que de reprendre l’intitulé de la référence pour dire qu’elle constitue une référence sur le sujet, et études de cas sont toujours de la partie et apportent une plus-value notable, surtout lorsque les documents sont bien choisis. Là où il en aurait fallu davantage pour pouvoir être bien explicite, c’est incontestablement dans le dernier chapitre sur les outils du géographe mais le noir et blanc ne permet pas tout hélas. La réactualisation des sujets et des données permettant de traiter ces études de cas apparaît également hétérogène selon les chapitres.

Un ouvrage « stable » pourrait-on dire de par la comparaison avec la chronique précédente et « stabilisé » de par sa place établie dans les rayonnages des bibliothèques, des libraires et, espérons-le, des bureaux d’étudiants.

PS : une faute de frappe, page 80, qui présente, dans le chapitre sur l’environnement, un point 2.1.3 sur les énergies « fossiles », laisse place à un point 2.1.4 concernant les énergies « non renouvelables ». Chacun aura saisi qu’il s’agissait des énergies « renouvelables » (et qui n’ont droit qu’à 7 lignes en regard des 25 consacrées aux énergies fossiles ! Espérons que le rapport s’inverse dans la prochaine édition…).