Madeleine Michaux, agrégée d’histoire-géographie a écrit de nombreux ouvrages scolaires et des ouvrages destinés à un jeune public.
« Les mots-clés de la géographie » constituent sans nul doute un prolongement de son engagement à rendre accessible à un large public l’histoire comme la géographie.
Ainsi, dans ce qui s’apparente davantage à un guide, Madeleine Michaux nous dresse une liste de notions (mots-clés) qu’elle tente de nous expliquer à l’aide d’un article concis agrémenté de schémas et d’exemples.
L’ouvrage se divise en trois parties toutes intitulées « se repérer en… » probablement pour mieux se « glisser » dans la géographie.
Première partie : Se repérer en géographie physique
D’entrée, l’auteur insiste sur le fait que la géographie, aujourd’hui, met l’homme au centre de l’analyse géographique mais précise, comme pour expliquer son choix, que les connaissances d’ordre physique sont indispensables tant à la description qu’aux prises de décisions.
C’est ainsi que Madeleine Michaux aborde en tout premier lieu les catastrophes naturelles. Elle nous présente tour à tour les cyclones et tempêtes dans un petit article concis illustré par une coupe d’un cyclone et appuyé par un exemple concret en l’occurrence « Katrina » du 23 août 2005. Elle poursuit avec les sécheresses et inondations puis les séismes et tsunamis pour terminer sur les volcans. Mais Madeleine Michaux a surtout le souci, avec ses exemples, de faire, si possible, un lien avec l’histoire. C’est pourquoi, elle nous explique (page 21) que l’éruption du volcan Laki en Islande en 1783-1784 est à l’origine d’importantes perturbations météorologiques ayant eu des répercussions sur les récoltes de céréales en France et sans nul doute sur la propagation des idées révolutionnaires. Elle ne précise cependant pas que ce n’était qu’un des multiples facteurs alors que cet ouvrage est destiné à un public jeune et/ou de novices.
L’auteur traite ensuite du climat et débute avec les caractéristiques climatiques. Le premier point concernant les précipitations nous offre un schéma très, voire trop, simplifié (page 26). Puis, suit une explication assez confuse sur l’ensoleillement à Nice et à Brest dans laquelle l’auteur nous précise que les deux villes reçoivent la même quantité de pluie (sans préciser que c’est annuellement) mais qu’il y a plus d’heures de soleil à Nice. Et tout cela pour en déduire que « la quantité de précipitations n’est pas automatiquement liée à l’ensoleillement »…
Quant aux grandes zones climatiques qui suivent, si le phénomène mousson est superficiellement abordé, les croquis, notamment celui des climats de montagne (page 33) est presque maladroit (exemple l’ubac serait mieux placé en face de l’adret).
Et, l’auteur termine cette partie par l’évolution climatique et par les atouts et contraintes des climats. Et là, il n’y a ni exemples, ni illustrations ni explication.
Enfin, Madeleine Michaux évoque successivement, dans sa partie géographie physique, le continent (pourquoi un singulier ?), les océans et les mers pour finir avec le relief (toujours au singulier).
Là, nous retrouvons les classiques de nos manuels de géographie qui certes datent, mais qui sont toujours d’actualité. L’innovation n’est pas au rendez-vous mais on pourra cependant apprécier, même pour nos élèves du collège ou du lycée, ce tour d’horizon rapide, illustré à l’ancienne. Il pourrait s’avérer utile pour préciser des notions qui, aujourd’hui, font défaut dans nos manuels.
Deuxième partie : Se repérer en géographie économique et sociale
Madeleine Michaux introduit cette partie par la démographie. Elle s’intéresse au recensement sous le titre « mesures » ( !) et nous apprend qu’au Moyen Age, le principe de compter était destiné à faire payer (page 68). Suit le paragraphe sur la densité pour lequel nous avons une carte de la densité de la population en France (page 69) avec 6 paliers en noir et blanc et sans date (document peu exploitable dans l’état). Enfin, l’auteur nous rappelle les définitions des différents taux (natalité, mortalité…) ainsi qu’une analyse de pyramides des âges qui sont directement utilisables pour nos élèves.
Avec l’évolution de la population mondiale, l’auteur nous offre de généreuses explications concises agrémentées de schémas simples mais exploitables comme les migrations internationales (page 79) ainsi que des exemples comme celui intitulé « le jeu de dominos des migrations » (page 81) où l’on apprend que les émigrés roumains ont laissé un vide qui est comblé par des immigrés chinois.
Dans le cadre de la géographie économique et sociale, la notion de développement tient une bonne place. L’auteur décrypte tout d’abord les « mesures » et nous offre des explications concises. Ensuite, la croissance et la crise viennent compléter le tableau avec, des explications et des exemples intéressants comme celui (page 90) de la Côte d’Ivoire où l’économie a résisté à une crise politique majeure.
En revanche, le développement durable fait figure de parent pauvre, à peine la moitié d’une page. L’auteur avance d’ailleurs que « le concept est très flou […] il ne servirait qu’à éviter la réflexion sur le développement économique lui-même. » Cette position tourne indubitablement le dos à une réalité que nous devons enseigner à nos élèves.
Quant aux « Echanges », Madeleine Michaux énumère dans un premier temps sous l’intitulé « transports », une série de moyens de transports comme la route, le rail, la voie maritime… Elle nous retrace les plus grandes réalisations et nous livre une carte des grands ports mondiaux en 2006 (page 100) sur laquelle des cercles plus ou moins proportionnels représentent dans un amas indescriptible les grands ports. Il en va de même pour la carte (page 102) sur les principaux aéroports et flux aériens mondiaux. Outre le fait que la date manque, les liaisons représentées par des traits continus proportionnels ne sont pas quantifiables.
Puis, l’auteur termine son chapitre sur les échanges par le sous titre « commerce » dans lequel elle « range » le tourisme avant d’aborder le dernier sous chapitre à savoir « production » (toujours au singulier).
Les sources d’énergies sont répertoriées dans le sous chapitre « production » qu’il s’agisse du bois, du charbon, du gaz, du pétrole ou de l’électricité sans préciser si ce sont des énergies renouvelables ou non. En revanche, juste après cette énumération, l’auteur (page 117) intitule un sous chapitre « les énergies renouvelables » où il décrit les biocarburants ( !) et poursuit avec les énergies inépuisables ( !) comme l’énergie solaire. Là, il nous apprend dans ce qui devrait être un exemple, que « l’ensoleillement est insuffisant pour une utilisation rentable de panneaux solaires sur 60% du territoire. Quant aux biocarburants […] il faut consommer beaucoup d’énergie, la plupart du temps des hydrocarbures ». A priori, cet exemple est mal venu dans les « énergies inépuisables ».
Enfin, l’agriculture et la pêche associées à la production sont très superficiellement abordées. Aucune ligne accordée à l’agriculture vivrière pas plus qu’à l’agriculture productiviste pour un ouvrage qui se veut être un guide. Et l’auteur conclue pratiquement sa partie production par quelques pages sur l’industrie, en abordant rapidement la notion de délocalisation de façon assez équivoque lorsqu’elle écrit (page 130) « construire une nouvelle usine à l’étranger n’est donc pas forcément, à proprement parler, une délocalisation ». S’adressant à un public jeune et/ou à des novices, cette phrase qui est une définition peut induire en erreur.
Troisième partie : Se repérer en géopolitique
Cette dernière partie débute par un chapitre intitulé « environnement » et plus particulièrement par son évolution. Retraçant une fresque historique, l’auteur nous dépeint la marque de l’homme dans l’environnement au fil des siècles avec une concision certaine. Puis Madeleine Michaux évoque très rapidement les risques environnementaux et la prévention sans véritablement apporter ni la précision, ni l’illustration, ni les exemples.
Quant à la mondialisation, deuxième chapitre de cette troisième partie elle se décline en trois sous chapitres à savoir : naissance et caractéristiques de la mondialisation, les institutions internationales et la mondialisation, ni bonne ni mauvaise, le tout sur à peine cinq pages ( !). Et pourtant, dans nos programmes scolaires, la mondialisation tient une « bonne place ».
Suit un chapitre sur les « risques ». Sont présentés les risques industriels avec une carte peu exploitable (page 153), les guerres et les conflits (en quelques lignes), les disettes, famines, pénuries d’eau (en quatorze lignes), la misère où sont évoqués le travail des enfants, l’immigration clandestine et le droit d’asile pour aboutir sur le réchauffement climatique ( !). Un réchauffement climatique pour lequel les vignerons, notamment anglais, se réjouissent car, des terres peu propices à la culture de la vigne le seraient devenues (page 161).
Et enfin, un dernier chapitre sur l’urbanisation qui nous présente dans un premier sous chapitre intitulé « un monde urbanisé », un schéma titré « quelques mégalopoles » avec une méga erreur. Une confusion certaine entre mégapole et mégalopole (page 167). L’auteur poursuit avec les « problèmes posés par l’urbanisation ». Elle y traite de «l’espace urbain envahissant » et des « villes nouvelles » ainsi que du « vieillissement des villes », du « problème des transports » et de « l’approvisionnement des villes » sans toutefois exceller dans la précision et n’apportant quasiment aucun exemple exploitable.
En conclusion, « les mots-clés de la géographie » titre accrocheur, s’avère très contrasté. Si certaines notions expliquées à grands renforts d’illustrations et d’exemples peuvent être utilisées pour nos élèves, d’autres en revanche le sont beaucoup moins, voire pas du tout. Quant à la structure même de l’ouvrage, ni le sommaire, ni l’index en fin d’ouvrage ne permettent une utilisation rationnelle. C’est donc un ouvrage qui a sa place dans nos CDI mais pour lequel l’enseignant enverra ses élèves consulter une page précise pour une notion ou un exemple précis.
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