La bataille de la Lys (9 avril 1918) représente dans la mémoire collective un combat oublié, ayant jusque-là peu retenu l’attention des historiens. Placée dans un angle mort de l’historiographie française, cette bataille de la Lys constitue un véritable lieu de mémoire de la conscience collective portugaise.
Oublier tous ces soldats portugais, morts pour la liberté de la France et de son peuple, c’est effacer une partie de l’histoire du Portugal, mais surtout, celle de la France. L’année 2018 sera celle du centenaire de cette bataille qui marquera l’histoire du Portugal du XXe siècle.
Voilà un ouvrage que l’on est donc ravis de trouver tant l’histoire des soldats portugais dans la Grande Guerre est si peu relatée ! Merci à l’auteur, Manuel Do Nascimento, de combler ce vide.
C’est un ouvrage très facile à lire, très clair et épuré qui permet d’avoir une lecture fluide pour bien comprendre l’arrivée des soldats portugais dans cette guerre, deux ans après son commencement. Le contexte est posé dès le début du livre.
Le livre est enrichi de cartes, de tableaux de statistiques… Mais aussi des photographies de ces soldats (principalement), qui sont morts au combat et dont la reconnaissance est malheureusement quasi nulle dans ce pays où ils se sont sacrifiés alors que ce n’était pas le leur.
Un livre qui a le mérite d’exister, il faut le souligner, malgré les quelques coquilles que l’on trouve ponctuellement dans le livre. A la page 22 : « Le Portugal propose la tenue d’une conférence diplomatique […] entre le 15 novembre 1884 et le 26 février 1855 », bien évidemment, il s’agit du 26 février 1885. Autre exemple : à la page 37 il est écrit sur la photographie « Démostration de tir » au lieu de « démonstration »… Ceci est dommage car cela donne un aspect négligé au travail effectué et remet quelque peu en cause sa qualité. Mais, et je le répète, ce n’enlève en rien le sérieux avec lequel a été fait le reste de l’ouvrage !
Si les photographies sont de bonnes qualités, en revanche, des cartes sont pixelisées. Cela ne change pas la compréhension des documents car l’auteur ajoute une légende en reprenant les mots quelques fois peu lisibles pour les rendre plus clairs.
Le cœur du livre n’est pas la bataille mais elle en est l’événement principal. En effet, l’auteur a jugé bon (et c’est appréciable) de rappeler le contexte de l’entrée en guerre du Portugal soumise à la volonté de l’Angleterre. Tout comme l’arrivée des soldats : bien qu’étant volontaires, l’Angleterre refuse au cours de la guerre de transporter les soldats de Lisbonne à Brest pour renforcer les effectifs du front. Nous voyons en cela le mépris qu’avaient les Alliés envers ce « pauvre pays ». Les soldats ont eu peu de répit en raison d’un non-remplacement dans les tranchées ; il n’y avait pas de roulement régulier entre les bataillons. Lors de la bataille, les soldats ont souhaité tenir le territoire jusqu’à la dernière balle et ne pas prendre la fuite comme un général anglais l’avait suggéré. Il y a eu de nombreux morts mais aussi de nombreux prisonniers parmi les effectifs.
Après le sacrifice des portugais pour la liberté de la France : aucune reconnaissance officielle. Et, il faut le souligner, le refus de l’entrée du Portugal dans la Société Des Nations à la sortie de la guerre alors que les pays neutres tels que l’Espagne ont eu leur place. Une injustice donc.
La reconnaissance pour les soldats portugais était manifestée par la population française dès leur arrivée à Brest. Aussi, tout au long de la guerre avec leur soutien en matière de logement ou de nourriture (que fournissait difficilement l’Angleterre qui gérait les effectifs portugais). De nombreux témoignages sont mis à la fin du livre, c’était une très bonne idée de la part de l’auteur.
Certains soldats, à la fin de la guerre, ont souhaité repartir au pays mais ce fut difficile. Ils ont attendu presque un an pour retrouver leur pays natal. D’autres ont choisi de rester vivre en France, auprès de leur petite française rencontrée durant la guerre. Leurs descendants veulent honorer leur mémoire de courageux combattants afin de ne pas les faire tomber dans l’oubli.
Pour les professeurs d’Histoire-Géographie : les combattants portugais sont évincés des manuels scolaires, il serait intéressant de proposer des études sur ces soldats qui ont aussi combattu pour un pays qui n’était pas le leur ; pour justement ne pas les faire tomber dans l’oubli.