Avec les élections présidentielles de 2012, aux États-Unis, comme en France, il était inévitable que les éditeurs ne demandent à leurs auteurs respectifs de proposer des ouvrages faisant le point sur le fonctionnement de l’institution présidentielle. La campagne électorale de 2008 aux États-Unis, a suscité en France un enthousiasme et un intérêt certain. Pour une partie significative de l’électorat français, la victoire de Barak Obama a pu apparaître comme une sorte de « compensation » à celle de Nicolas Sarkozy. Le calendrier électoral n’étant pas les mêmes, le nouveau président de la république française sera déjà en poste lorsque Barak Obama se soumettra au suffrage indirect des électeurs. Cet ouvrage est une mise au point utile sur le fonctionnement de l’institution présidentielle aux États-Unis et sur son histoire. La fonction présidentielle est le résultat d’un compromis entre les pères fondateurs lors de la convention qui se réunit à Philadelphie les 25 mai 1787.
Un mandat à vie ?
La durée du mandat présidentiel a été âprement débattue, et il a fallu trancher entre le mandat de un an, et celui d’un mandat à vie le compromis a été celui de quatre. Plus compliqué encore, et il faudra 30 tours de scrutin pour départager les constitutionnels réunis à Philadelphie, le suffrage universel direct, masculin évidemment avec un certain niveau de patrimoine, où une élection par le congrès, ce qui aurait remis en cause la séparation des pouvoirs. Le compromis est toujours celui qui est en vigueur avec un suffrage universel indirect chaque État désignant un nombre de grand électeur égal au nombre total de ses sénateurs et de ses représentants au congrès fédéral. Ce sont ces grands électeurs qui élisent le président. Pour obtenir la ratification par les états du Sud de la constitution il a fallu intégrer un nombre de représentants proportionnels à la population des états basés sur un calcul comptant trois cinquièmes d’un blanc pour chat comme noir même si les noirs ne font pas parti du corps électoral. Chacun des états choisit le mode de désignation de ses grands électeurs, les dates des scrutins ne sont pas uniformes et les grands électeurs n’ont mandat que pour une seule élection. À l’origine, le candidat arrivé second aux termes de ces différentes étapes qui durée de novembre à mars, date de l’entrée en fonction à cette époque, jusqu’en 1932, était vice-président, ce qui donnait le plus souvent, un vice préside d’une orientation politique différente de celle du président.
On présente souvent la constitution des États-Unis comme un modèle d’équilibre des pouvoirs qui serait gravé dans le marbre depuis 1787. En réalité, cet édifice qui a quand même traversé de siècle a subi de très fréquents ajustements qui ont permis de l’adapter aux évolutions. Reste ce mode de scrutin très particulier avec les élections primaires dont les auteurs retracent la genèse est bien entendu ce scrutin indirect qui a montré à plusieurs reprise ses limites, le dernier exemple en date étant celui des élections en Floride en 2000. C’est ce qui a permis à George Bush junior d’être élu alors qu’il avait une minorité de voix au suffrage populaire mais une majorité de votes de grands électeurs.
Un système a rafraîchir sans doute ?
On aurait pu d’ailleurs espérer que les auteurs expliquent pourquoi les différents états restent très attachés à leurs prérogatives en matière de modes d’organisation de leur scrutin, même si on comprend bien que ce n’est pas l’objet principal de cet ouvrage. Si l’on retrace l’évolution du pouvoir présidentiel aux États-Unis, on se rend bien compte que ce dernier a évolué, en même temps que se renforcer le rôle de l’État central dans la gestion des affaires du pays. Les différentes guerres, notamment la guerre de sécession, mais aussi les deux guerres mondiales et bien entendues la guerre froide ont contribué au renforcement du pouvoir exécutif.
Au moment où se déroulent les élections primaires aux États-Unis, en tout cas pour le parti républicain, puisque Barak Obama, le démocrate, est candidat à sa propre succession, il n’est pas inutile de relire ces pages sur la façon dont celles-ci sont nées. Le congrès a joué un rôle déterminant dans l’élection du président, avec les fameux caucus qui réunissaient les congressistes et les représentants des deux principaux courants politiques, et qui désignait le candidat de chaque camp. À l’origine, il était nécessaire d’être propriétaire pour pouvoir voter dans la plupart des états, ce qui excluait les une bonne partie de la population, et la désignation au niveau local se faisait au niveau de la législature. Il faut attendre la deuxième moitié du XIXe siècle, 1856 avec la nouvelle loi électorale de la Caroline-du-Sud, pour que le vote populaire au niveau de l’État s’impose.
C’est également à partir de 1828 que le système de la convention nationale qui permet de désigner les candidats de chacun des partis est devenue la règle. Bien entendu, même si l’élection présidentielle devient alors plus nationale, sa dimension fédérée demeure néanmoins. Les grands électeurs continuent d’être élus et de voter à l’échelle des états, ce qui signifie que, pour être élu, il faut construire sa victoire est apparaître. Les responsables locaux des parties sont des maillons indispensables des campagnes électorales dans de nombreux états y désigner les délégués et il joue bien entendu un rôle clé dans cette affaire.
Bien d’autres questions sont abordées par les deux auteurs de cet ouvrage, la question de l’avenir de la présidence des États-Unis se pose. Le mode de désignation d’une énorme complexité favorise la constitution d’entreprises des électorales dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle ne brille pas par leur transparence. L’utilisation désormais systématique de la publicité comparative, des spots télévisés, les dépenses gigantesques, posent aujourd’hui un réel problème. Il convient également de redéfinir le rôle du vice préside, qui n’est plus simplement ce fantôme qui rode dans les allées du pouvoir. Mais il ne dispose en réalité que des pouvoirs que le président en exercice veut bien lui confier. Enfin, parmi les limites du système il conviendrait peut-être de remettre en cause cette longue période de transition, qui a pourtant été réduite en 1936, entre l’élection et l’entrée en fonction. Cela permet sans doute de recaser les conseillers, surtout en cas de changement de parti à la tête de l’exécutif, même si à l’origine, cela permettait dans les conditions techniques des transports de l’époque, au candidat élu, de rejoindre, en évitant tous les dangers possibles, la capitale fédérale. Ouvrage facile d’accès, c’est de synthèse sur le fonctionnement de l’institution présidentielle aux États-Unis devrait apporter à tout lecteur curieux de ces questions des réponses très largement satisfaisantes seront aisément complétés par une lecture attentive de la presse quotidienne.
Bruno Modica