2001, le CAPES d’Histoire-Géographie nouvelle formule est expérimenté. L’épreuve sur dossier s’enrichit « d’une épreuve dans l’épreuve » avec un second exposé : Agir en fonctionnaire éthique et responsable. Le numéro de Sciences Humaines de l’été 2011 consacré à la problématique de l’Etat vient à point nommé pour alimenter la réflexion des candidats. Ceux-ci sont amenés à réfléchir à des sujets comme celui-ci : « Quel est le rôle social et civique de l’Etat ? ». Les articles réunis sous le titre de « L’Etat, une entreprise comme une autre ? » posent la question du vrai/faux retrait de l’Etat.

La mise en place d’une « culture du résultat », qui conduit à l’instauration d’une évaluation chiffrée (il suffit pour cela de penser aux indicateurs de réussite des lycées mis en ligne sur le site de l’éducation nationale, accompagne la réduction du nombre de fonctionnaires (non remplacement d’un fonctionnaire sur deux, suite aux départs en retraite) ainsi qu’une réduction du budget de fonctionnement de l’Etat (dans le cadre de la LOLF – loi organique relative aux lois de finance -). Il semble que la notion de service public de qualité soit remise en cause. Cette question se fait d’autant plus sentir au niveau des hôpitaux et de l’école, même si, au départ, ces réformes ont été faites dans le but de réduire les temps d’attente des usagers et d’accroître leur degré de satisfaction.

Voilà une dizaine d’années que sont menées des réformes de grande ampleur visant à rendre l’action publique plus efficace. L’Etat devient une entreprise comme une autre dans le cadre d’un nouveau management public, inspiré de ce qui a été mis en place au Royaume Uni (voir à ce propos les travaux de Patrick Le Galès). « Cette quête de l’efficacité conduit aussi à privilégier la création d’agences indépendantes et spécialisées, censément plus créatrices que les grosses administrations, ou encore à encourager les partenariats public/privé (dans la recherche ou la santé, par exemple) ». Cette évolution s’accompagne celle du statut de fonctionnaire. L’évaluation quantitative trouve ses limites dans certains secteurs (diplomatie, par exemple) et n’a pas toujours de pertinence (la quantité est privilégiée aux dépens de la qualité du service). Trop souvent, la loi de Goodhart (« Toute mesure qui devient un objectif cesse d’être une mesure ») est ignorée et cette évolution se fait au détriment des usagers. Ces tendances sont à replacer dans le contexte non pas d’un retrait de l’Etat dans la société mais de son renforcement dans le cadre des collectivités territoriales. Il semble qu’il faille davantage parler de mutations que de retrait de l’Etat.

De même, à la lecture de l’entretien de Vincent Duclert, donné à propos du projet de Nicolas Sarkozy visant à mettre en place un Musée de l’Histoire de France, la réduction de la place de l’Etat semble à relativiser. Les historiens craignent l’instrumentalisation politique de ce projet et remettent en cause les modalités de l’expertise publique de la mise en place de cette institution. L’Etat n’est pas absent non plus de la nouvelle frontière qu’est le numérique. « L’Etat français a lui-même décidé de donner un coup de pouce substantiel à l’industrie encore balbutiante du serious games français, avec un appel d’offres lancé en 2009 par la secrétaire d’Etat à l’Economie numérique ». Ainsi, www.macyberautoentreprise.fr est un jeu de rôle visant à acquérir des compétences pour monter son autoentreprise et va bien au-delà de la mise à disposition des connaissances nécessaires à la création d’une autoentreprise. Alors, pourquoi pas vivre sa vie par procuration ? C’est moins dangereux que la vie réelle, au moins, on a plusieurs chances et on peut rejouer !

Catherine Didier-Fèvre © Les Clionautes