Devoir en classe, annonces des résultats PISA ou encore PPCR : l’évaluation est partout ! Dominique Odry, qui a été inspecteur de l’Education nationale, a assuré pendant douze ans le rôle de responsable formation à l’Ecole supérieure de l’Education nationale auprès des inspecteurs et des chefs d’établissement. Il aborde en neuf chapitres la notion d’évaluation. Des encadrés ponctuent chacun des chapitres et l’ouvrage comprend en outre une bibliographie. 

L’évaluation des élèves

Dans ce premier chapitre, Dominique Odry retrace l’historique de l’idée de note en insistant sur le fait qu’aujourd’hui la note semble incontournable et, en même temps, c’est un système relativement récent. Un arrêté de 1890 instaura la notation des compositions à partir d’une échelle de vingt points. De façon classique, il commence par l’évaluation des élèves en rappelant les différentes formes d’évaluation, qu’elle soit diagnostique, sommative ou formative, puis il précise la notion de compétences en relation avec l’évaluation. Pourtant comme le dit l’auteur « la notation promet plus qu’elle ne peut tenir ». Plusieurs travaux ont montré tous les biais qui peuvent exister. L’auteur prend le temps d’en détailler certains. Le genre peut être un biais d’évaluation. Il évoque ensuite le rapport entre l’évaluation et la communication à travers la question des appréciations. L’utilisation par exemple de la deuxième personne est « à double tranchant » car c’est l’ensemble de la personnalité qui est considérée. 

L’évaluation des enseignants et des établissements scolaires

Le deuxième chapitre commence également par un rapide historique qui montre indéniablement que le travail des corps d’inspection a profondément évolué. L’auteur évoque les dernières réformes comme la mise en place du PPCR. Au niveau des établissements, la logique managériale s’est imposée de plus en plus. Il est donc indispensable de se poser la question de la finalité :  « contrôle visant à la mise en conformité ou bien accompagnement des établissements ? ».  

L’évaluation des systèmes éducatifs

Dominique Odry souligne la nécessité d’une approche par objectifs quand il s’agit d’évaluer les acquis des élèves, par exemple en français et en mathématiques à l’entrée en CE2. Il évoque ensuite le modèle de Kirkpatrick qui a cherché à cerner les effets possibles d’une formation en distinguant quatre niveaux d’évaluation. Il s’interroge aussi pour savoir si on peut évaluer la rentabilité d’un système éducatif. En 2011, atteindre le bac général et technologique en quinze ans représente une dépense cumulée de plus de 114 000 euros. Il développe également son propos autour de la question  des évaluations internationales. 

L’évaluation des politiques publiques

Le cinquième chapitre se focalise sur l’évaluation des politiques publiques. Cela s’explique par une volonté de transparence et de modernisation de l’action publique,  mais aussi par l’histoire particulière de la France où l’Ecole publique « affirme un principe d’universalité qui doit transcender les multiples intérêts particuliers de la société civile.» Dominique Odry s’attarde également sur certaines dérives en s’appuyant sur des exemples tirés du livre de Maya Beauvallet. Dans les services où le travail d’équipe est important, l’évaluation va être contre-productive car les salariés se détournent de l’esprit collectif pour se concentrer sur leurs résultats individuels. On remarque aussi que pendant longtemps il n’a pas existé de référentiel des métiers du professorat. 

Evaluer : des dispositifs et des acteurs

Les chapitres suivants sont plus théoriques. L’auteur propose d’abord un bref panorama des dispositifs en cours et, le moins qu’on puisse dire, c’est que l’Education nationale a été prolixe en la matière : parcours diversifié, aide personnalisée, études dirigées ou encore accompagnement personnalisé. Quel qu’il soit, il reste toujours le problème de mesurer l’impact des dispositifs. Dominique Odry s’intéresse aux instances qui évaluent et on assiste là à une inflation de sigles :  DEPP, IGEN, IGAEN ou encore CNESCO. Toutes ces institutions ont produit des rapports marqués par un « réalisme critique », même si l’auteur note un affaiblissement de cette caractéristique récemment. Au-delà de ces instances, l’auteur rappelle que « beaucoup d’acteurs sont intéressés par l’évaluation du système scolaire : l’Etat, les familles, les collectivités territoriales, les employeurs ».

L’évaluation, une notion ? 

Dans ce chapitre, il s’agit notamment de retracer l’historique de la notion d’évaluation dans l’école. Il insiste sur la différence que l’on peut faire entre « contrôle » et « évaluation » puis introduit l’idée de référentiel puisque  « le travail d’observation de la réalité n’est possible que grâce à la grille du référent ». L’auteur développe ensuite plusieurs exemples concrets et aborde également les questions déontologiques liées au fait d’évaluer. 

En conclusion, Dominique Odry insiste sur deux aspects. Selon lui, l’école est pour l’instant « relativement à l’abri de ce qui pourrait être son instrumentalisation par une logique de l’efficacité au service du néolibéralisme ». Deuxièmement, l’évaluation n’est pas une discipline «  tout juste une praxéologie, c’est-à-dire un ensemble de pratiques sociales réfléchies ». L’évaluation ne doit pas servir simplement au contrôle mais doit être porteuse de sens. Il invite pour finir à ne pas « laisser l’évaluation aux évaluateurs ». 

© Jean-Pierre Costille pour les Clionautes.