Un enchevêtrement d’engrenages avec au centre une horloge dont un homme tente désespérément de stopper le mouvement, sans y parvenir… Fritz Lang émerge alors de son sommeil et, tout en narrant son rêve de gratte-ciels et de ville majestueuse à son épouse Thea von Harbou, couche sur le papier ses visions. Les trois premières planches de l’album nous plongent instantanément dans la plus grande aventure cinématographique allemande de l’après-guerre : la réalisation du chef-d’œuvre Métropolis.
Au fil des pages les auteurs de l’album égrènent les divers obstacles auxquels le réalisateur de génie Fritz Lang a dû faire face : les négociations avec l’UFA autour du coût du projet, astronomique pour l’époque ; les manipulations du NSDAP concernant son passé trouble ; le difficile choix de Brigitte Helm pour interpréter Maria, qu’il préfère à la jeune Leni Riefenstahl ; les menaces de plus en plus réelles et concrètes de l’organisation Consul sur le tournage, sans oublier les différents artistiques et politiques s’accumulant avec Thea, séduite par le nazisme.
Après presque une année de tournage l’œuvre de Fritz Lang sort dans les salles le 10 janvier 1927, dans une version largement retouchée par le studio. Travail de génie mais film maudit, Metropolis fut un échec critique, mais surtout commercial, retentissant, provoquant la quasi-faillite de l’UFA. Dépité, en froid avec son actrice vedette, Lang fuira l’Allemagne en 1933, rapidement suivi par Brigitte Helm en 1935.
Le travail scénaristique et artistique, remarquable, nous happe littéralement dans la course effrénée de Lang, cherchant tant bien que mal à donner corps à sa vision. Au travers de son parcours, c’est bien évidemment le contexte allemand de la fin des années 1920 qui est abordé, et notamment la montée en puissance du nazisme, dont Thea von Harbou embrasse les idées. Une plongée romancée certes, mais largement documentée, qui ravira les plus cinéphiles !
Geoffrey Maréchal, pour Les Clionautes