Le Louvre n’est pas un palais figé. Ce livre, au format généreux, tend à le démontrer en s’appuyant sur de belles reconstitutions virtuelles qui se découvrent sur des doubles pages.

Le dispositif éditorial s’avère efficace : une date, un souverain, une reconstitution virtuelle du bâtiment, un état des lieux. Il donne à voir une vision synoptique du palais. Les différents marqueurs spatiaux, qui caractérisent le bâtiment et ses évolutions architecturales, sont localisés, identifiés et décris dans des petits cartouches textuels.
Ainsi l’articulation de l’ouvrage se construit autour des grandes étapes des chantiers du Louvre : Philippe Auguste (1190), Charles V (1380), Henri II (1559), Catherine de Médicis (1589), Henri IV (1610), Louis XIII (1643), Louis XIV (1715), Napoléon Ier (1815), Napoléon III (1870), « aujourd’hui ».

Un petit plan sous chaque date permet de se rendre compte de la place occupée en ce temps-là par le bâtiment comparativement à aujourd’hui. On découvre ainsi, au fil des pages, son inexorable extension au fil des siècles et les ambitions politiques qui en découlent.

Passé la page d’ouverture de la restitution virtuelle de chaque temps fort, des clefs d’analyse illustrées, sont présentées dans les pages suivantes.

Sous l’impulsion de Philippe-Auguste, on assiste à l’édification d’un château de garnison. Le modèle d’architecture philippien se multipliera au sein du domaine royal, comme à Dourdan. Il consiste en une enceinte quadrangulaire, cantonnée de tours, dont une tour résidentielle (le donjon) de plus fort diamètre. Le comte de Flandres, qui s’est révolté contre le roi et a été vaincu à la bataille de Bouvines (1214), y sera emprisonné pendant treize ans.
Durant le règne de Charles V, la fonction militaire est abandonnée compte tenu de l’extension urbaine de Paris. Tout en conservant l’enveloppe castrale de Philippe Auguste, le roi entreprend la reconstruction du Louvre. Il nous est connu au travers de son iconographie, particulièrement celle des Très Riches Heures du duc de Berry (miniature des frères Limbourg). Entre souci de confort et mise en scène symbolique du pouvoir, le palais de cour s’impose. On remarquera une belle restitution virtuelle inspirée par un détail d’un célèbre tableau du musée du Louvre, La Crucifixion du Parlement de Paris, attribué au Maître de Dreux Budé. La fameuse Librairie de Charles V, avec plus de neufs cents manuscrits, occupait trois niveaux de la tour nord-ouest.

Le Louvre médiéval disparaît à l’époque d’Henri II. L’architecte Pierre Lescot a la charge de rebâtir le palais, dans le goût de la Renaissance française. Le décor sculpté est confié à Jean Goujon. On doit à Catherine de Médicis le domaine des Tuileries, dont les plans sont conçus par Philibert Delorme.
Henri IV fait relier le Louvre aux Tuileries par la Grande galerie.
Le pavillon central (« pavillon Sully ») de l’une des ailes de la Cour Carrée est l’apport majeur du règne de Louis XIII.

Le Louvre et les Tuileries constituent la résidence principale de Louis XIV entre 1652 et 1671. Seules les maçonneries de la Cour Carrée sont achevées à l’époque du roi Soleil, qui se tourne progressivement vers Saint-Germain-en-Laye et Versailles. Ces nouvelles constructions du palais parisien sont inhabitables car elles ne disposent pas de toiture, de plancher et de fenêtres (jusqu’au début du XIXe siècle). Côté ville, la Colonnade de Perrault prend forme. Les années 1660, sont marquées par l’édification d’une grande salle de spectacle aux Tuileries. L’emploi des expressions « côté cour » et « côté jardin » trouverait son origine dans la salle des Machines des Tuileries.

En 1793, la Grande Galerie du Louvre devient un musée. Le contexte est très favorable pour enrichir les collections durant la période révolutionnaire et impériale (sous la direction de Dominique Vivant Denon), avec la nationalisation des biens du clergé, les saisies révolutionnaires sur les propriétés des nobles émigrés et les campagnes militaires en Italie.
Napoléon fait fermer la cour des Tuileries, par la galerie neuve, le long de la rue de Rivoli. Il ordonne aussi la destruction de l’ancienne salle d’assemblée de la Convention, et l’érection de l’arc de triomphe du Carrousel. Les aménagements de Percier et Fontaine, inspirés de l’Antiquité et de la Renaissance, embellissent significativement la résidence impériale et le musée.

Napoléon III double les surfaces du Louvre (1852-1857). Par la suite, dans les années 1860, Visconti puis Lefuel reconstruisent ou modifient les parties anciennes des Tuileries pour les adapter au « Nouveau Louvre ».
En 1871, la Commune de Paris incendie le palais des Tuileries. Sa démolition permet au Louvre de s’ouvrir à nouveau sur la ville et ses jardins.

Durant la période contemporaine, les réaménagements intérieurs se succèdent, au gré des politiques muséales. Lancé en 1981, le « Grand Louvre » offre un nouveau regard sur cette institution de renommée internationale. Avec la pyramide de Ieoh Ming Pei, le hall Napoléon (sous la pyramide), le grand escalator Richelieu, la cour Marly et sa verrière, le département des Arts de l’Islam (verrière ondoyante de Ricciotti et Bellini), des partis pris architecturaux émergent.

Cet ouvrage dresse une synthèse de l’évolution du Louvre au fil du temps, établie à partir des apports récents de la recherche. Il montre bien comment deux entités au départ distinctes, le Louvre et les Tuileries, vont progressivement formées qu’un seul ensemble. Il rend compte de manière précise et claire de cet imposant ensemble architectural et de son rôle politique dans notre histoire.
Disposé sur un présentoir dans le CDI d’un établissement d’enseignement du secondaire, il croisera le regard des élèves et devrait nourrir leur curiosité. Il constitue un précieux support pédagogique, à la fois accessible et exigeant, pour un public scolaire.

Eric Joly pour les Clionautes