Car le Mussolini foudre de guerre montre plus d’emballement que de discernement. Ses pulsions napoléoniennes s’épuisent en initiatives inconsidérées. Projetant son tempérament brutal, narcissique et séducteur sur ses ambitions de puissance, il entraîne l’Italie dans une spirale croissante d’engagements militaires, coloniaux d’abord, en Libye et en Éthiopie, européens ensuite, en Espagne et en Albanie, avant de plonger dans l’abîme de la Deuxième Guerre mondiale. Sa valse hésitation en 1939-1940 est un condensé étonnant de sa posture guerrière mêlant inquiétude et orgueil, inconscience et impréparation. Ses conceptions militaires sont sommaires, nimbées d’une forme d’inconscience forgée par les succès relatifs obtenus dans des conflits dissymétriques, en Afrique et en Albanie. En émerge le constat surprenant que, contrairement à Hitler, le Duce s’ingère peu dans le domaine réservé du haut commandement, où les généraux préservent leur autonomie et réservent leur loyauté directe au roi Victor-Emmanuel. La discordance entre les capacités militaires effectives de l’Italie et les ambitions géostratégiques démesurées de Mussolini conduit l’Italie au désastre et accule le Duce, à force d’errements, dans une dépendance absolue envers l’Allemagne. Chef de guerre irréaliste et imprévoyant, se gargarisant de ses propres chimères jusqu’à l’inconséquence et inapte à tirer les leçons de ses déconvenues, Mussolini n’est pourtant pas un fanatique. Son évaluation de la situation diplomatique semble même assez lucide jusqu’à 1940. Mais ses relations avec l’Allemagne nazie, pourtant inaugurées sous les auspices d’une franche aversion, évoluent en un partenariat de dupes où il est manipulé par Hitler. Enfin, son désenchantement dans la dernière partie de la guerre révèle un être sans illusions piégé par ses propres choix.