Le destin du très médiatique Georges Frêche, récemment décédé, a été très lié à la promotion de la région Languedoc Roussillon. Cette région, qu’il aurait aimé un temps rebaptiser « Septimanie », est celle qui, en France, accueille le plus d’habitants nouveaux sans pour autant que cet apport n’évite le vieillissement de sa population. C’est aussi la région où se créent le plus d’entreprises mais où leur durée de vie est la plus courte. Les pourcentages de RMIstes comme de chômeurs de la région sont comparables à ceux du Nord-Pas de Calais. Ces contradictions amènent Georges Roques à s’interroger sur les caractéristiques de cette région à la fois géant démographique et nain économique.
Georges Roques parle ici de la région qu’il habite. Ancien professeur à l’université et à l’IUFM de Montpellier, administrateur de la Maison de l’Europe à Montpellier, il s’est intéressé au cours de sa carrière aux villes et à l’Europe. Il analyse l’émergence difficile des régions françaises dans l’espace européen et planétaire et c’est dans le cadre de cette réflexion que la région Languedoc Roussillon est placée au cœur de son analyse.
La démarche de l’auteur est intéressante. L’analyse de ce qu’est une région (interrogation sur les limites de la circonscription régionale et de son unité), la place qu’elle tient (analyse de la situation régionale par rapport aux flux européens mais aussi en termes économiques) ne manquera pas d’intéresser un large public local comme d’étudiants de géographie. On vient à envier les habitants du Languedoc Roussillon qui disposent ici d’une grille de lecture de leur région. La démarche retenue par Georges Roques rejoint celle des manuels de géographie régionale (cf. Jean-Claude Boyer, Laurent Carroué, Jacques Gras, Anne Le Fur, Solange Montagné-Villette. France : Les 26 régions. 2009, 2ème édition) mais ici le format permet d’approfondir et de prendre du recul.
Pour cela, la « propagande régionale » est décryptée et analysée sous l’angle critique du géographe. Il aime à se moquer gentiment de la teneur des textes ou des discours des représentants du conseil régional mais aussi des visiteurs de passage. « A l’occasion du Tour de France 2009, qui faisait étape, dire que la Grande Motte, c’est la Floride, ce ne peut être que l’effet du soleil ou d’un état second pour le directeur du Tour de France ».
Georges Roques montre les carences de l’aménagement de cet espace (activité concentrée dans quelques agglomérations dont Montpellier, situation ubuesque du TGV dont certaines tronçons sont achevés alors que les travaux d’autres tronçons ne sont pas commencés…). Le Languedoc Roussillon est une région petite en Europe et moyenne en France. Roques se pose la question de savoir si Montpellier, « capitale régionale a un poids économique suffisant au plan européen et dans le monde méditerranéen pour prendre la place qu’elle prétend y occuper ». Si le poids touristique de la région n’est pas négligeable, il apparaît pourtant que le secteur touristique a lui aussi ses faiblesses tant au niveau de l’âge des équipements qu’au niveau de la diversité de l’offre. Même dans le domaine de la recherche et du développement où la région a le plus d’atouts, la comparaison européenne n’est pas favorable au Languedoc Roussillon. Si la présence du premier campus européen (cf. Le Monde, 26/06/2009), de neuf organismes de recherche et de 200 laboratoires comme de six pôles régionaux de compétence forment un environnement favorable à l’innovation et à l’entreprise, la région n’apparaît pas si bien placée dans les classements internationaux. Le développement spectaculaire de la ville de Montpellier dépend pour beaucoup des collectivités territoriales et de l’Etat et c’est une faiblesse que Georges Roques tient à souligner. L’exercice prospectif auquel se livre l’auteur à la fin de l’ouvrage montre que les obstacles sont nombreux pour que la région soit une région moteur à l’horizon 2050. Pour y parvenir, la région, qui dispose d’atouts considérables, doit tout faire pour venir à bout de ces handicaps en réduisant la fracture territoriale actuelle et en mettant en œuvre des moyens qui doivent fournir des solutions pour son insertion à toutes les échelles.
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