Cet ouvrage est une suite au colloque de Poitiers (22-24 juin 2016à qui célébrait les 30 ans du laboratoire MIGRINTER.
Dans l’introduction Thomas Lacroix revient sur l’émergence des recherches sur les migrations internationales et leur apport pour penser dans un monde globalisé.
L’ouvrage est organisé en quatre grandes parties ayant chacune leur introduction : position des États et institutions, marché du travail, parcours de vie et migrants dans la ville.
L’État et des institutions face aux flux migratoires
Cette première partie aborde différents thèmes : le rôle de l’État dans le contrôle des frontières ; la définition de l’étranger, vulnérable ou indésirable ; l’ambivalence du statut de l’exilé ; variations des possibilités d’intégration. Quatre chapitres pour les aborder : L’exil des Kurdes dans le Kurdistan irakien (avec deux cartes en encart central), les modifications de la législation étasunienne qui ont plongé des millions de Latinos dans l’illégalité, le positionnement des syndicats canadiens au New-Brunswick, la diaspora judéo-maghrébine en France, au Canada, en Israël et les communautés identitaires d’accueil.
Migrations et mobilité sociale : s’internationaliser pour prendre position ?
Les quatre articles ont un point commun : regarder les migrations comme une fabrique de classe moyenne, la mobilité comme un ascenseur social et les réseaux transnationaux. La migration universitaire est une migration particulière qui suppose l’appartenance préalable à une élite comme le montre l’étude des étudiants maliens à l’université de Moncton1 au Canada. Celle des médecins à diplôme étranger en France repose sur des intermédiaires (ambassadeurs, « passeurs ») qui viennent combler les manques et sont en positions différentes selon leur origine européenne ou non-européenne mais qui sont confrontés à une même réalité : faire leurs preuves, faire reconnaître leur compétence. L’article suivant est consacré à un phénomène ancien celui des jeunes chercheurs migrants bénéficient de réseaux bien constitués, pré-existants. L’étude s’appuie sur deux cas : Franco, doctorant chilien et José, Colombien dans des universités françaises.
La migration marocaine du colonial au global met en évidence une mondialisation. Il montre une classe moyenne issue de la migration en France souvent liée au monde du spectacle et ses rapports avec le Maroc où elle investit, où elle retourne avec un engagement économique et politique mais décrit aussi une filière pour le salariat agricole au Sud de l’Europe, marocaine du patron à l’ouvrier en passant par le passeur. Enfin l’auteur évoque « le commerce à la valise », les marchands forains marocains partout dans le monde.
Cette seconde partie montre l’inégalité face à la migration.
Saisir les parcours de vie du local au global
Il existe plusieurs manières d’aborder ces parcours, ces histoires de vie, déclinées en trois articles.
C’est d’abord les parcours de migrants tunisiens en Europe (cartes et schémas en encart) qui mettent en relief les allées et retours et la durée de ces voyages notamment à travers les cas de Karim et Zoubaier, deux migrants sans papier. l’article décrit les réseaux de d’entraide : les Harraga et le rôle des familles.
Le programme CIMORE repose sur des entretiens recueillis pour reconstituer le parcours migratoire et la mobilité sociale puis analysés : Jean, Congolais et son errance en Afrique jusqu’à la côte libyenne, Romulus, Roumain, des allers et retours entre Roumanie, France, Suisse et Espagne, Lucie qui part du Congo pour le Liban dont l’histoire montre le rôle des lieux-relais et Hanan, réfugié syrien au Maghreb.
Le troisième article explore les interactions entre associations et chercheurs, souvent indispensables pour la collecte des données, la constitution d’archives orales. Les auteurs décrivent le projet Histoire et mémoires de l’immigration : mobilisations et luttes pour l’égalité 1968-1988.
Migration, logement et espace public : prendre place dans la ville
Les grandes villes sont des pôles d’attraction aussi bien au Nord qu’au Sud. A travers cinq articles c’est le rôle des migrations dans la transformation des espaces urbains qui est analysée.
Les commerces « ethniques » de plusieurs quartiers parisiens attestent de la place des migrants entre stratégies entrepreneuriale et affinités culturelles. L’article traite des interactions entre commerçants, usagers et paysages des rues marchandes. L’article suivant conduit le lecteur à Buenos Aires à la rencontre des marchands ambulants sénégalais, souvent mourides, une économie de la débrouille.
Pour appréhender la réalité des migrations de nouveaux outils, de nouvelles démarches voient le jour comme on peut le voir dans la description de leur mise en œuvre à la fois à Valence (Espagne) et à Beyrouth pour une analyse fine que quelques espaces urbains : quel public, quels déplacements, quelles occupations ?
Essaouira et Marrakech, deux lieux pour observer, analyser les visibilités et invisibilités d’une migration Nord-Sud, les Français installés au Maroc. Visibilité des enseignes commerciales, des maisons d’hôte mais invisibilité sociale dans les statistiques et au réel puisqu’ils se confondent avec les touristes.
Le dernier chapitre est consacré aux Roms à Valence en Espagne : comment la politique urbaine explique la présence de cette communauté dans le quartier El Cabanyal, quartier marginalisé t sensible.
Un ensemble de thèmes, d’approche, de réalités très diversifié qui peut apporter des exemples précis à une étude des migrations.
1Plus grande université francophone du Canada hors du Québec