Aubergine, carotte, pomme de terre ou encore panais : il ne s’agit pas d’une liste de courses mais de quelques exemples des légumes dont vous découvrirez l’histoire dans ce très bel ouvrage d’Eric Birlouez.

Après avoir consacré un livre aux céréales et aux légumes secs, il se penche ici sur les légumes. L’ouvrage offre de très belles reproductions des différents légumes. Ingénieur agronome et sociologue, il enseigne l’histoire et la sociologie de l’alimentation au sein d’écoles d’ingénieurs et d’universités, en France et à l’étranger. 

Au-delà de leur intérêt nutritionnel et gastronomique, ces humbles végétaux sont porteurs d’une histoire qui plonge aux racines mêmes de notre humanité. Les légumes nous racontent les goûts des origines et les évolutions de l’alimentation. Il faut souligner que les hommes ont parfois réussi à rendre comestibles des végétaux qui, à l’état sauvage, présentaient souvent une toxicité. L’expansion géographique des légumes ne s’est pas faite en un jour.

Le goût des légumes, une longue histoire

Il existe une très grande diversité d’espèces et, dès le début, se pose la question de la classification. Un légume, c’est « la partie comestible d’une  plante potagère ». Il faut attendre le XIXe siècle pour que le mot légume désigne l’ensemble des productions du potager. Un grand nombre de légumes les plus consommés aujourd’hui ont pour berceau les contreforts densément peuplés de chaines montagneuses. Tous les légumes ont un jour quitté leur lieu de naissance à la faveur des flux migratoires des populations, du commerce et des explorations savantes. Longtemps, les légumes ont été dédaignés par les élites car ils étaient associés aux paysans. Le Grand Siècle transforme cela et Louis XIV était, par exemple, un grand amateur de légumes. A partir du XIXe siècle, il faut compter à la fois avec la croissance démographique mais aussi avec de nouveaux outils agricoles et de nouvelles techniques de culture. En 2021, les trois légumes les plus consommés en France sont la tomate, la carotte et la courgette.

Une fabuleuse diversité

L’aubergine est originaire d’Extrême Orient. Ce sont les Arabes qui, après l’avoir découverte en Perse, l’ont implantée dans le bassin méditerranéen. Elle n’apparut sur les marchés parisiens qu’à partir des années 1820. Le livre évoque également le concombre dont la production ne s’est développée qu’à partir du début du XXe siècle. L’apparition des serres vitrées a permis de cultiver ce légume dans les régions froides. L’artichaut, quant à lui, était la folie de Catherine de Médicis, à tel point qu’elle faillit en mourir. 85 % du chou-fleur français est produit en Bretagne. Il existerait par ailleurs plus de 400 variétés de choux. On sera peut-être surpris d’apprendre que ce sont les Chinois qui auraient inventé la choucroute en découpant du chou en longs filaments. La Chine est aussi le premier producteur mondial d’épinard avec 92 % du total. Le chapitre se poursuit avec l’endive, les laitues et autres salades.

Dans la famille des légumes, je demande les bulbes

Il y a ensuite plusieurs pages sur les bulbes à savoir ail, oignon, échalote ou encore poireau. Lors des épisodes de peste ou de choléra, l’ail fut utilisé pour purifier l’air et le débarrasser de ses dangereux miasmes. Le thème se termine avec la carotte, le navet, le radis ou encore le céleri noir et la rhubarbe. En France le céleri rave n’a commencé à être cultivé dans les potagers qu’à partir de la Renaissance. La rhubarbe convient aux régimes minceur puisque 100 grammes de ce produit n’apportent que 13 calories. Aujourd’hui, en France, moins de 10 % de la production de petits pois sont consommés sous forme de petit pois frais.

Ces légumes que nous devons au Nouveau monde

La pomme de terre est une arme anti famine. Les Français en consommaient 100 kilogrammes par personne en 1960 et 51 aujourd’hui. C’est le troisième aliment le plus consommé après le riz et le blé. On apprendra peut-être que la pomme de terre était déjà consommée en France avant Parmentier. Celui-ci en a néanmoins incontestablement assuré la promotion. Son adoption fut le résultat de nombreux facteurs dont l’impact fut lent comme l’amélioration des techniques agricoles. Aujourd’hui, la Chine en produit une sur quatre. Il faut aussi savoir qu’il en existe plus de 4000 variétés différentes. Eric Birlouez s’arrête ensuite sur la tomate et montre la mondialisation qu’elle incarne. Le piment est à la fois une épice et un légume.

Légumes d’hier et d’ailleurs

Dans cette partie, l’auteur évoque le panais, le topinambour ou encore le crosne. Le premier connait une certaine réhabilitation. Quant au crosne, son succès ne dura qu’un temps car il est difficile à récolter et à consommer rapidement après arrachage. Des légumes feuilles de jadis réapparaissent comme l’arroche, le chénopode ou la tétragone. Le livre traite également du manioc, de l’igname ou encore du gombo.

En conclusion, Eric Birlouez insiste sur les bienfaits de la consommation de légumes pour le corps et l’esprit. Aujourd’hui, on mange de moins en moins de viande et, parmi les autres tendances, il y a la volonté de manger plus local, plus sain. Les légumes sont un bien commun de l’humanité, un patrimoine à la fois biologique, culturel et symbolique d’une extrême richesse et diversité.

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