Bruno Modica est chargé de cours en relations internationales et chargé de formation au CNED de Lille


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S’il est un ouvrage qui porte bien son titre, c’est bien cette planète océane qui propose en 45 articles l’essentiel de ce que l’on ne peut pas ignorer sur la géopolitique des espaces maritimes. Ce livre de 525 pages est le pendant d’un atlas géopolitique des espaces maritimes déjà présenté dans ces colonnes.
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Le professeur de géographie qui entend disposer d’informations précises sur la mondialisation et notamment sur les voies maritimes de la globalsation pourra lire avec profit les articles de la première et de la deuxième partie de cet ouvrage qui présente les stratégies commerciales, pour ce qui relève de la conteneurisation, du développement portuaire et des armements. On pourra trouver de très précieuses indications également sur les autoroutes de la mer et le cabotage, une alternative au transport routier que la France n’a pas semble-t-il la volonté politique de développer, pas plus que les transports fluviaux. La question du Canal Rhône Rhin à grand gabarit semble avoir été enterrée, victime des lobbies environnementaux qui, paradoxalement, encouragent le développement d’un transport routier scandaleusement prédateur en ressources et en vies humaines. Il est vrai que le pouvoir de nuisance du groupe de pression des transporteurs est bien supérieur à celui d’autres corporations.

A propos des routes maritimes on pourra découvrir avec profit l’article de Frédéric Lasserre qui revient sur les espaces arctiques dont le dégel pour cause de réchauffement climatique est attendu par les armateurs qui pourraient trouver des voies libres de glace plus courtes entre la Russie et les Océans atlantique et pacifique Nord.
On n’insistera jamais assez sur l’importance des canaux qui connaissent aujourd’hui un grand intérêt. Le Canal de Panama est en rénovation, afin d’y faire passer des porte conteneurs de plus de 10000 unités, tandis que, pour des raisons politiques, on est encore dans l’attente d’un élargissement de Suez qui permettrait de raccourcir, de façon considérable les trajets entre l’Asie et l’Europe pour des navires importants. Sans doute qu’un tel projet pourrait voir le jour avec une paix durable au Proche Orient même si cette perspective n’est pas encore d’actualité.

L’article de Xavier Gizard insiste également sur les régions, comme acteurs d’une politique maritime européenne, tant il est vrai que les États auraient tendance à se désengager de bien des aspects de leur souveraineté. À cet égard, les régions européennes, mais également françaises malgré leur petite taille et leurs petits moyens, semblent avoir compris quels étaient les atouts que leurs façades pourraient représenter. Les perspectives d’un vabotage européen sont d’avantage prises en compte au niveau des régions qu’au niveau national, principalement, on l’a déjà dit, en France.

Philippe Pelletier revient aussi sur l’insularité japonaise, dasn la vision que les japonais ont eux mêmes de leur « iléité ». A ce propos, la question de la représentation insulaire du Japon semble conditionner la réflexion de l’auteur qui reprend les relatiosn particulières entre shima, qui signifie à la fois île et communauté en japonais ancien. Cette vision aussi explique l’intérêt que les japonais portent à leur périphérie surinsulaire qui, dans un territoire étroit et limité, constitue une réserve d’espace et de ressources. Cela fait la transition avec les articles de Laurent Castin, Olivier Lenfant et Alexandre Sheldon Duplaix, consacrés aux stratégies navales de la Russie, du Japon et de la Chine. Ces trois pays entretiennent entre eux des litiges insulaires à propos des Kouriles, des Spratlys et des Diahoyu.

Les armements ne sont évidemment pas négligés dans cet ouvrage qui y consacre une troisième partie, intitulée «géopolitique et stratégies navales». On y trouvera des analyses précises des politiques navales des grands États ainsi que des explications sur les armes de projection de pusisance, les portes avions, et d’interdiction, les sous marins. ( Thierry d’Arbonneau)
Les sous marins, y compris les diesels deviennent d’ailleurs d’excellents produits d’exportation, acquis par des pays comme la Malaisie par exemple, qui entendent faire valoir leurs droits sur leurs espaces maritimes.

Le porte avion par contre, en raison de son coût, est devenu un élément de différenciation entre les puissances majeures et es autres, ce qui explique l’obssession chinoise à cet égard. Évidemment, il faudra attendre longtemps pour rivaliser avec les États Unis set leur douzaine de PA géants. Pourtant la France essaie d’envisager la construction d’un nouveau porte avions mais dans le cadre d’une coopération européenne que ses principaux partenaires semblent vouloir rejeter.

La quatrième partie de cette somme est consacrée à la science, à la biodiversité aux loisirs et aux patrimoine. Il manquerait par contre un article sur les pirates, même si plusieurs auteurs en traitent indirectement, le sujet ayant été d’actualité en 2008. Mais il est vrai que cet ouvrage important et toujours d’actualité est paru en 2006.

L’un des intérêts majeurs de cet ouvrage est de fournir également de précieux tableaux statistiques, qui ont, sous forme imprimée, l’inconvénient de vieillir un peu vite, mais surtout les sites des institutions où des chiffres actualisés peuvent être obtenus.

Pour toutes ces raisons, et notamment l’ouverture aux grands espaces qu’il procure, cet ouvrage devrait figurer en bonne place dans les cabinets de géographie des lycées et dans bien des bibliothèques et centres de documentation.

Tant il est vrai que les travaux des chercheurs ont encore besoin de l’outil du livre pour être diffusés.

Bruno Modica