Une revue qui propose  » le meilleur de la presse et des revues pour suivre l’actualité »

C’est le slogan de cette revue bien connue. Ce bimensuel fait donc un point en convoquant les meilleurs articles sur le thème cette fois-ci du développement durable. Il y ajoute, quand c’est nécessaire, ses propres éclairages repérés comme tels. Ici par exemple, quelques graphiques comme la part des énergies renouvelables ou l’empreinte carbone. Les revues utilisées, pour citer celles de ce numéro, sont par exemple « Les Echos », « Futuribles » ou « les notes d’analyse du CAS ». Elles sont brièvement présentées pour les situer. Une bibliographie complète le dossier principal.

20 ans de développement durable

Le dossier occupe donc une quarantaine de pages et se développe en neuf articles. Un premier tente de faire le point sur 20 ans de développement durable : les raisons d’espérer ne sont pas nombreuses, mais Blandine Barreau tient aussi à souligner quelques avancées comme l’agenda 21 qui est une réalisation clairement identifiée. Elle revient aussi sur les défis du millénaire. Elle conclut en revenant sur une idée de plus en plus présente dans le débat, à savoir une gouvernance mondiale. Il existe plus de 500 accords et conventions autour du climat ce qui a généré plus de 5000 décisions. Fort logiquement le tout manque de cohérence. La gouvernance mondiale est  » fragmentée, parfois redondante, voire contradictoire ». Un autre article s’intéresse à la mesure du développement durable : quel chiffre prendre en compte ? Si le PIB semble définitivement mis à l’écart, cela ne nous dit rien sur qui le remplacera ? Faut-il d’ailleurs un chiffre unique comme l’empreinte écologique ? Cet indicateur est lui aussi loin de faire l’unanimité. On s’oriente plutôt vers une approche par tableau de bord …encore faut-il qu’il reste gérable…

La croissance verte est-elle une illusion ?

L’article de Benjamin Dessus est particulièrement intéressant car il invite à remettre en cause un certain nombre de postulats qui « polluent » le débat et le réduisent ou le travestissent. L’auteur remet en cause aussi l’idée que la seule voie réaliste serait la substitution d’énergies non pétrolières au pétrole, et non carbonées, aux énergies fossiles, autrement dit la croissance verte. Si l’on regarde dans le temps, on s’aperçoit que les scénarios des années 80 se sont révélés faux. On imaginait alors que la croissance économique et la croissance énergétique fonctionnaient forcément ensemble ….jusqu’à ce que des scénarios de sobriété énergétiques fassent leur apparition. Il s’interroge également pour savoir si le marché est bien le bon gendarme pour réguler un tel problème. On assiste en effet à de violentes fluctuations du CO2 à la bourse européenne puisque celui varie de moins d’un euro la tonne à plus de 25 !
L’auteur souligne un certain nombre d’ambigüités qui se cacheraient derrière l’expression de  » croissance verte » : quelle place pour les progrès scientifiques et techniques ? L’ AIE prévoit aussi des scénarios avec une croissance de 2 % par an dans les pays riches pour les 40 ans qui viennent : est-on vraiment sur cette voie ?

Des bonnes intentions générales aux bonnes pratiques quotidiennes

Régis Bigot et Sandra Hoibian permettent de varier les échelles en se plaçant au niveau du consommateur. Le bilan est le suivant : il reste beaucoup à faire pour améliorer le logement ou le chauffage. En revanche, les Français ont commencé à modifier certains de leurs comportements. Les volumes d’eau prélevés pour les particuliers ont baissé de 3 % entre 95 et 2007 tandis que la population augmentait de 7 % ! Il n’y a pas là qu’une préoccupation écologique mais aussi économique, sans oublier les progrès des appareils ménagers devenus moins gourmands en eau. Remarquons aussi que le parcours moyen des voitures par an a baissé de 1500 kilomètres entre 2001 et 2009. D’autres indications permettent aussi de corriger certaines idées reçues : ainsi une enquête montre que même les ménages les plus modestes consomment du bio.

Des rails, des consommateurs et de l’industrie

La revue offre également d’autres articles en dehors du thème principal. On lira également une contribution sur le rôle des chemins de fer dans le développement de l’Afrique. L’auteur défend la thèse qu’un fort développement du réseau ferré est essentiel car il coûte peu mais peut se révéler très utile pour exploiter les matières premières. Ces infrastructures peuvent poser en revanche des problèmes politiques : il faut en effet imaginer des lignes internationales et donc transcender les clivages frontaliers. Il y a aussi un article sur l’économie comportementale à partir de la mise en perspective d’un livre de Gilles Saint Paul. Enfin, un entretien intitulé  » Rien ne peut remplacer l’industrie » se présente sous forme de dialogue avec Jean-Louis Beffa.

La revue Problèmes économiques permet ici un bilan informé sur 20 ans de développement durable. Synthétique, varié et offrant de nouvelles perspectives, il s’agit indéniablement d’un numéro à lire.

Jean-Pierre Costille © Clionautes