Qui est Charlemagne ? Charlemagne, « Empereur auguste, roi des Francs et des Lombards », est un souverain dont l’aura a marqué les siècles. Il a été un modèle pour les rois et les empereurs qui lui ont succédé, en France comme en Allemagne. Ce cinquième volume de la collection Histoire dessinée de la France s’attache à décortiquer les différentes images accolées à ce souverain et plus largement à proposer une histoire actualisée des Carolingiens.
Pour rappel, La Revue Dessinée et les Editions La Découverte ont lancé en 2017 la collection Histoire dessinée de la France, dirigée par Sylvain Venayre. L’objectif de cette série est de faire dialoguer historiens et auteurs de bandes dessinées pour proposer une histoire de France à contre-pied du Roman national et de ses résurgences. Pour cet ouvrage en question, l’historienne Sylvie Joye a collaboré avec le dessinateur et auteur de bandes dessinées, Damien Vidal. Sylvie Joye est professeure d’histoire médiévale à l’Université de Lorraine, à Nancy. Spécialiste du haut Moyen-Age, elle s’intéresse notamment à l’histoire des femmes et des figures de pouvoir entre Antiquité et Moyen Age. Damien Vidal s’intéresse tout particulièrement aux sujets à dimension sociale et historique. En 2014, il a publié avec Laurent Galandon, chez Dargaud, Lip, Des héros ordinaires.
La structure de l’ouvrage s’inscrit dans celle de la collection Histoire dessinée de la France : elle se compose donc de deux grandes parties, d’abord un récit historique sous forme de bande dessinée, puis une mise au point scientifique éclairant plusieurs grands thèmes de l’histoire carolingienne (notamment la Renaissance carolingienne, les conquêtes territoriales et l’organisation politique et sociale de l’Empire, le rapport entre l’Eglise et la dynastie carolingienne, les bouleversements de l’économie liés aux attaques vikings et la construction de l’image de Charlemagne dans la littérature médiévale). Une bibliographie actualisée et commentée vient apporter des pistes de lectures pour approfondir ses connaissances sur le sujet.
Le récit proposé s’inscrit dans un cadre scolaire en référence à la législation scolaire carolingienne (notamment l’Admonitio generalis de 789 qui établit que toutes les églises doivent se doter d’écoles). Cette législation a été largement mythifiée sous la IIIe République, puis inscrite dans la culture musicale populaire avec la chanson « Sacré Charlemagne » de France Gall (1965). Ce Charlemagne qui « a inventé l’école » est le fil rouge du récit. Carl et Bertille, deux collégiens, nous font découvrir cette histoire carolingienne à travers un voyage qui les mène de Paris à Aix-la-Chapelle. Durant ce récit, ils rencontrent les acteurs historiques de cette époque : Charlemagne bien sûr, mais aussi d’autres rois et empereurs, des intellectuels comme Eginhard, auteur de la fameuse Vita Karoli, des seigneurs, des paysans, ainsi que des vikings. Leurs pérégrinations nous permettent de découvrir, dans un récit dense et ponctué de nombreuses anecdotes, l’histoire de l’Occident carolingien.
C’est un ouvrage qui peut être utilisé à la préparation de la séquence « Byzance et l’Europe carolingienne » du programme de 5e. Certaines planches se prêtent très bien à une transposition didactique, notamment un passage où le dessinateur, partant de la description physique et vestimentaire de Charlemagne par Eginhard, propose une représentation bien différente de celle de Dürer. Charlemagne ne portait donc probablement pas la barbe, mais la moustache. Sa barbe « fleurie » (fleurie provient d’une mauvaise traduction du terme florie, en vieux français, qui signifie blanche) est probablement une invention apportant au souverain l’idéal de sagesse souvent associé à la barbe blanche. On peut aussi évoquer cette planche où Charlemagne est représenté avec cinq apparences différentes, symboles des nombreuses images que l’on a accolées à ce personnage historique. On y retrouve donc bien sûr le chef de guerre, conquérant et victorieux, le roi justicier, le roi à qui l’on doit la Renaissance carolingienne, le roi colérique, ou encore le modèle de sagesse.
Personnellement, j’ai beaucoup apprécié ce cinquième volume de la collection Histoire dessinée de la France. C’est un récit bien ficelé, à la fois drôle et très rigoureux historiquement.