Auxiliaires zélés du maintien de l’ordre nazi, les traitres démasqués par Olivier Pigoreau sont jeunes, brutaux et sans scrupules. Leur recrutement est disparate : à une cohorte de militants politiques principalement issus du PPF de Doriot, s’agrègent des truands (provenant notamment du milieu corso-marseillais lié à Simon Sabiani), des paumés et même quelques égarés qui fuient le STO en s’enrôlant chez l’ennemi, à la manière de Lacombe Lucien.La chronique de leurs sanglants méfaits contre la résistance est d’autant plus sordide qu’elle s’accompagne de manière systématique de pillages crapuleux, dont l’impunité est assurée par l’uniforme allemand. La litanie des exactions qui peuvent leur être imputées reflète un rôle parfois brouillon mais généralement redoutable au service de l’occupant. Soldatesque de guerre civile vivant dans l’instant présent de la violence pure, cet agrégat d’extrémistes, de mercenaires et de crapules suit l’armée nazie dans son repli en Allemagne.
Incorporés dans des détachements de chasse SS, les renégats français sont employés dans une petite guerre de coups de main sur le front Ouest et, lors de l’effondrement du Reich, destinés à participer à la chimérique opération Werwolf. Tel qu’il ressort des archives dépouillées par l’auteur, le sort de ces parias vaincus fut très divers : ceux qui survécurent aux combats furent pour la plupart arrêtés et confrontés à la rudesse aléatoire de la justice de l’épuration.
Olivier Pigoreau jette un regard sans complaisance sur ce sujet délicat et potentiellement malsain. Rédigé dans un style alerte, au ton plus proche de l’investigation journalistique que de la synthèse historique mais étayé par un travail d’enquête archivistique sérieux, son ouvrage se lit avec facilité. Détails secondaires, la présence d’un cahier de photographies ne compense pas l’absence d’un index tandis que les cartes proposées sont peu utiles, faute de localiser de façon précise les lieux des crimes et exactions des «Brandebourgeois français». En définitive, la restitution attentive du parcours de ces criminels en uniforme dessine une redoutable «valse avec les traitres» …
© Guillaume Lévêque