Alors que l’URSS s’est effondrée, Dimitri Lavrine, trafiquant sans scrupule et Slava Segalov, un artiste qui a renoncé à ses rêves de gloire, s’embarquent dans une équipée à la fois drôle et mordante dans ce pays en pleine déliquescence.

L’auteur

Pierre-Henry Gromont a publié plusieurs bandes dessinées dont une adaptation du livre d’Antonio Tabucchi «  Péreira prétend » ainsi que « La fuite du cerveau » récit sur le vol du cerveau d’Einstein. En préambule de ce nouvel ouvrage, il explique son projet, ses sources, et confie avoir voulu réaliser un récit sur un sujet grave en l’abordant avec une certaine légèreté.

Tout est à vendre

L’histoire commence avec Dimitri et Slava en plein repérage de ce qui peut être à récupérer, et donc à vendre, dans un des nombreux bâtiments abandonnés du temps de l’URSS. Cette époque de la fin des années 90 en Russie est marquée d’un climat étrange et Dimitri dit d’ailleurs : « La beauté du capitalisme ne consiste pas à pouvoir acheter n’importe quoi mais vendre n’importe quoi ». Après avoir amassé un certain nombre d’objets dans leur camionnette, Dimitri et Slava sont attaqués et ils ne doivent  leur survie qu’à l’intervention d’une certaine Nina.

Nina entre en jeu

On découvre progressivement que la jeune fille travaille dans une mine vouée à la fermeture. Après un périple dans le froid, elle conduit Dimitri et Slava à l’endroit où elle habite avec son père Volodia. Ce dernier est un peu original et se balade notamment en petite tenue malgré la température. Le naturel reprend rapidement le dessus car Dimitri voit tout ce qui pourrait être vendable dans ce lieu.

Quel avenir pour la mine ?

Lorsque Lavrine apprend que la mine où travaille Nina est à vendre, il se dit qu’il y a sans doute des affaires à réaliser. Il apprend pourtant qu’il n’est pas seul sur le coup puisque le célèbre Morkhov s’y intéresse également. L’auteur en profite pour marquer un temps d’arrêt pour expliquer comment ce dernier s’est enrichi par ses magouilles. Cet épisode est révélateur du ton de l’album, à la fois informatif et drôle voire caustique. Morkhov est un exemple de ses personnages troubles et dans son cas il a multiplié sa fortune par cent en moins de deux ans. Les péripéties s’enchaînent puisque Lavrine se lance dans le projet de rassembler de l’argent qui permettrait de racheter la mine.

Un portrait acide de la société

Pierre-Henry Gromont dresse notamment le portrait de Slava, un artiste qui a ramé pendant dix ans du temps de l’URSS et qui à présent ne pense plus qu’à l’argent. Au moment où il commençait à émerger, l’URSS s’est effondrée et son début de notoriété avec. Il revoit à un moment donné Elena, qui appartenait comme lui à l’Académie des Beaux Arts avant de devenir chanteuse. On rencontre aussi un comptable pas très net, fiancé au départ de Nina avant qu’elle ne s’éloigne de lui. L’album offre encore d’autres rencontres peu recommandables comme avec Sakharev très en connivence avec le pouvoir et la mafia.

Dans cette époque trouble, le risque est grand d’arpenter des territoires déjà sous contrôle comme vont s’en rendre compte les protagonistes. Le volume 1 se termine donc sur une fin ouverte pour une  série annoncée en trois volumes.

Jean-Pierre Costille