Une fois n’est pas coutume, commençons par la liste des figures : le Centre Pompidou Metz, le Louvre Lens, The British Library, le Royal Ontario Museum,… L’architecture continue de bien se porter et les architectes gardent toute leur influence sur les milieux urbains, certains devenant de véritables stars.

Tout a commencé par l’ouverture du musée Guggenheim de Bilbao, produit de l’imagination de Franck GEHRY. Il fit connaître la ville basque (et l’architecte) dans le monde entier. Au tournant des années 1990, on assiste en effet au début de la starification de l’architecture, relent de la mondialisation. Le terme de « Starchitecture » se réfère alors aux créations architecturales d’architectes très médiatiques à l’échelle du globe. Ils sont à l’origine de bâtiments iconiques, symboles d’innovation et de créativité, agissant comme « une vaste enseigne publicitaire pour les lieux ». d’implantation.

Jean NOUVEL est une des figures de cette « personnification » de l’architecture. Il a commencé sa formation à l’école des beaux-arts de Bordeaux puis il l’a poursuivie à l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris. Dans ses premières années d’exercice, il se constitue un solide réseau d’architectes mais aussi d’artistes. Celui-ci lui servira lors des nombreux concours auquel il a participé, comme pour la réalisation de l’Institut du Monde Arabe. Jean NOUVEL est notamment connu pour son utilisation fréquente du story telling pour vanter les qualités de ses projets. Ainsi le musée du quai Branly est « un lieu marqué par les symboles de la forêt, du fleuve et les obsessions de la mort et de l’oubli ». Ce starchitecte se situe bien au croisement de l’expertise de la construction et des milieux artistiques et culturels. Exportant une « french touch », les ateliers Jean NOUVEL réalisent aujourd’hui 85% de leur chiffre d’affaire à l’étranger.

Parmi d’autres bâtiments, les musées sont les supports privilégiés de l’architecture iconique. Par exemple, Abou DABI souhaite construire un complexe culturel sur l’île de Saadiyat comprenant des succursales de deux institutions muséales : le Louvre et Guggenheim. Les bâtiments ne sont plus vus seulement comme des objets, mais aussi comme des publicités et des destinations touristiques. Les starchitectes apportent ici leur signature et ainsi de la valeur au projet. L’architecture et le design urbain sont alors utilisés comme un outil de développement économique local et de mise en tourisme des villes. En France, le Centre Pompidou à Metz (2010) et Le Louvre à Lens (2012) en sont d’autres exemples. La réalisation d’espaces de consommation (notamment dans le secteur du luxe) par des starchitectes est un autre phénomène, plus récent, qui pose la question : l’architecture fait-elle vendre ?

Les articles de cet ouvrage sont écrits par des urbanologues, géographes, architectes,…en français et en anglais. Ils portent un regard critique sur ces projets et leurs architectes. La starchitecture est-elle donc née d’un malentendu ? Le fameux « Bilbao effect » a parfois été mal analysé. Le musée Guggenheim était le « bouquet final » d’un projet urbain structuré de requalification de friches industrielles et non pas un acte architectural isolé dans un objectif prioritaire de marketing urbain. La construction d’un bâtiment « moderne » ne suffit pas toujours à créer une dynamique, comme le montre la polémique autour du Royal Ontario Museum. Par ailleurs, il semble important de souligner que la majorité des architectes évoluent en-dehors du star-system mondial. La grande majorité travaille de façon anonyme en modifiant le tissu urbain quotidien de manière tout aussi inventive que leurs collègues starifiés. Alors est-ce la fin de la starchitecture ? La crise économique a déjà mis à mal de nombreux projets en Europe et en Amérique du Nord. On assiste davantage à un glissement vers l’Est et les Suds. Le Moyen-Orient (Dubaï par exemple) est maintenant devenu une des régions les plus friandes de bâtiments iconiques et d’architectes-stars.

Nicolas Prévost © Les Clionautes