« A l’occasion de son 35e anniversaire, la RAO [Revue archéologique de l’Ouest] a souhaité faire découvrir l’archéologie au plus grand nombre par le biais d’un beau livre ». C’est en ces termes que les trois directeurs de l’ouvrage, Gérard Aubin, Charles-Tanguy Le Roux et Cyril Marcigny, débutent la présentation du projet. Trente années de découvertes dans l’Ouest de la France, entre la Bretagne, la Normandie et les Pays-de-la-Loire, sont ainsi résumées à travers 110 notices réparties en sept chapitres chronologiques. Du Paléolithique inférieur à l’époque contemporaine, l’ouvrage nous propose, en mêlant rigueur scientifique et vulgarisation, de suivre les découvertes archéologiques de 135 archéologues. Des archéologues travaillant sur les trois régions susdites et qui partagent leurs résultats au sein d’Unités mixtes de Recherche (UMR) réunissant dans un partenariat le CNRS, les universités, l’INRAP et le ministère de la Culture.

 

L’ouvrage débute par une brève mise au point sur la discipline archéologique avec notamment un éclairage sur l’évolution de son organisation. Discipline peu encadrée institutionnellement au XIXe siècle, l’archéologie s’est progressivement professionnalisée tout au long du XXe siècle. Une loi de 1941 met en place un système d’autorisation préalable aux fouilles et une surveillance des travaux, en 1959, la création d’un ministère des Affaires culturelles avec son Bureau des fouilles et antiquités institutionnalise davantage la discipline. Dans les années 1980, chaque région est dotée d’un Service régional de l’Archéologie (SRA). Enfin, en 2001 est créé l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP). Cette mise au point se poursuit par un éclairage sur la démarche scientifique de l’archéologue. « Un site archéologique est un mille feuilles que l’on ne mange qu’une fois ». L’objectif fondamental de l’archéologue est de comprendre une culture disparue à partir de vestiges matériels conservés, lors de fouilles (préventives ou programmées), d’en prélever les plus pertinents au vue de la recherche scientifique, puis, lors de la post-fouille, de les analyser et de les mettre en relation avec les découvertes d’autres sites archéologiques ou d’autres disciplines (sciences physico-chimiques, de la Vie ou de la Terre ; sciences humaines) pour proposer in fine un modèle archéologique.

Cet ouvrage se veut véritablement pédagogique. Chaque notice propose un support de présentation attractif composé de photographies de fouilles, de croquis, de reconstitutions. Pour accompagner le lecteur dans la compréhension des différentes notices, une frise chronologique permet de se situer à travers les périodes. Pour décrypter le vocabulaire très spécialisé utilisé par les archéologues un lexique général a été réalisé, il apporte notamment un éclairage sur les moyens de datation (dendrochronologie, radiométrie…), sur les technocultures (Azilien, Hallstatt…). Une carte localise les différents sites archéologiques à l’étude. Enfin, une sélection bibliographique et une liste de lieux à visiter sont proposées pour le lecteur qui souhaiterait en savoir davantage et passer du texte au terrain.

Les 110 notices sont divisées en sept chapitres chronologiques s’ouvrant chacun par une introduction résumant l’évolution du champ d’étude dans la chronologie ciblée et les principales découvertes archéologiques. Ces 110 notices révèlent l’étendu du champ d’étude de la discipline archéologique et la variété des découvertes dans le Grand Ouest. Ci-dessous, voici un essai de typologie correspond aux domaines étudiés et retranscris dans cet ouvrage :

– les techniques (étude des « structures de combustion » à Menez-Dregan datant de 465 000 ans)

– l’habitat (étude des maisons rectangulaires du site de Colombelles dans le Calvados ; étude de la villa de Qiou marqueur de la romanisation)

– l’environnement naturel des hommes (étude du karst de Ranville daté de 230 000 ans, un site de boucherie révélant la faune de l’époque : éléphant, cerf, aurochs…)

– l’industrie (étude d’une industrie lithique de Quiberon datant du Mésolithique ; étude des bouilleurs de sel de l’âge du fer sur l’île d’Yoc’h)

– l’économie (étude d’un dépôt de statères au Mans daté de l’âge du fer ; étude d’un site de pressoir à vin à Piriac-sur-Mer constituant la première attestation d’une production de vin dans cette région à l’époque gallo-romaine)

– l’art (étude de l’art pariétal dans les grottes de la vallée de l’Erve datant du Paléolithique supérieur ; étude de l’art pariétal mégalithique à travers le site de Saint-Just datant du Néolithique)

– l’architecture (étude de l’église de Saint-Martin d’Angers et de son évolution architecturale ; étude des constructions successives à l’Abbaye de Fontevraud ; étude des fortifications de Vauban sur le l’île de Tatihou)

– les croyances (étude d’un dépôt de haches en bronze à La-Chapelle-de-Bois-des-Faulx marqueur d’un culte chtonien ; étude de Landévennec, la plus ancienne fondation monastique attestée en Bretagne (Ve siècle))

– les pratiques funéraires (étude d’une nécropole à Eterville marquant la transition dans les pratiques funéraires au milieu de l’âge du fer, soit au Ve siècle avant J.-C., entre l’incinération et l’inhumation ; étude d’une tombe à char à Orval datée du IIIe siècle avant J.-C.)

– la politique (étude d’une chefferie à Lannion de l’époque du Bronze ; étude de Noviodunum et de ses monuments publics (forum, temple, entrepôts…), capitale des Diablintes durant l’époque gallo-romaine)

– les importations et les exportations de marchandises (étude de Ratiatum, un port et ses entrepôts qui révèlent les dynamiques des échanges dans le monde gallo-romain)

– la guerre (étude des charniers des guerres de Vendée au Mans ; étude de l’hôtel Turgis, une maison bombardée en 1944 à Falaise).

 

En résumé, « Sur le terrain avec les archéologues » est un ouvrage pertinent pour quiconque souhaiterait appréhender la discipline archéologique, mais aussi pour les collègues d’histoire-géo (et surtout celles et ceux du Grand Ouest) qui pourront y trouver des ressources documentaires pour illustrer toutes les périodes du programme, du Paléolithique inférieur à l’époque contemporaine, de la maîtrise du feu à Menez-Dregan (Finistère) vers 465 000 ans avant J.-C. aux bombardements de 1944 à Falaise (Calvados).

 

Présentation de l’éditeur : lien