Dans leur introduction Alain Falque, Pasquale Lubello et Léïla Temri tentent de définir le mot de transition, son rapport au développement durable et définissent deux hypothèses :
Soit la transition est une évolution, inflexion du développement vers quelque chose de plus durable Soit le développement est incompatible avec la soutenabilité et la transition est alors un renversement du système actuel.
Ils présentent les grandes lignes des contributions développées dans les trois parties de l’ouvrage : Questions agricoles, Entreprises et consommateurs, Les systèmes alimentaires : émergence de nouveaux modèles, questions analysées à plusieurs échelles : locale, nationale, internationale.
Questions agricoles.
Cette première partie est consacrée à l’étude des systèmes agro-alimentaires.
Sébastien Bainville traite de l’agroécologie. Dans quelle mesure en France et dans le monde le nouveau concept peut-il répondre aux changements intervenus dans les objectifs assignés à l’agriculture, nourrir les hommes sans détruire l’environnement ?
Il analyse l’émergence d’un nouveau modèle de production créateur d’emplois, d’une recherche-action autour des cycles biologiques des écosystèmes cultivés. Il montre l’opposition entre une agro-industrie capitaliste (monoculture, utilisation intensive des moyens mécaniques et des intrants, reposant sur de grandes surfaces) et une agriculture paysanne (moins d’intrants et plus de main-d’œuvre) mais qui peut être freinée par les conditions d’accès au foncier, aux marchés mais soutenue par la labellisation. Pour l’auteur la coexistence de ces deux formes d’agriculture est illusoire.
Louis-Antoine Saïsset s’intéresse aux coopératives agricoles. Après quelques rappels historiques il décrit la situation actuelle où l’agriculteur est à la fois un associé détenteur de pouvoir de décision et un client ou un fournisseur. On a assisté à un fort mouvement de concentration avec une diversification des activités des coopératives qui a entraîné une perte de pouvoir des adhérents. L’auteur perçoit une évolution vers une démarche plus durable avec un modèle de gouvernance plus horizontal.
Pauline Lécole et Sophie Troyer analysent la P.A.C. des débuts dans une logique productiviste à la réforme de 1992 destinée à rééquilibrer les aides avant la tentative de verdissement de 2004 : des aides conditionnées au respect de pratiques bénéfiques pour l’environnement, tentative contrecarrée par la politique des Etats et les lobbies agricoles. Pour les auteurs les freins à la contribution de la politique communautaire depuis 2014 restent faibles. Elles détaillent le plan français de Stéphane Le Foll, les mesures de conditionnement des aides vers l’agroécologie dont elles estiment que l’efficacité est faible.
Entreprises et consommateurs.
Il s’agit ici d’étudier les aspects en aval de l’agriculture.
Les entreprises agro-alimentaires peuvent-elles jouer un rôle dans la transition ? Karine Gauche et Léïla Temri montrent la relation entre innovation et responsabilité sociale des entreprises dans un contexte concurrentiel.
Lucie Sirieix et Guillaume Le Borgne analysent le poids des consommateurs dans une perspective de transition. La définition du concept de consommation responsable est mise en regard des pratiques des consommateurs. La pratique des achats et le gaspillage alimentaire mettent en évidence une distance entre les idées et les actes. Les auteurs proposent des pistes pour faire évoluer les pratiques.
Idées reprises dans la contribution de Fatiha Fort et Manuela La Mela, elles analysent le rôle de l’information dans les choix des consommateurs, l’influence des référents socio-économiques ou socio-culturels. Un exemple à propos de la tomate montre le poids de l’élément prix dans la décision d’achat. Les informations sociales semblent avoir plus de poids que celle à dimension environnementale comme l’indice carbone. Les auteures concluent sur le rapport au temps : le temps court de l’achat / le temps long des informations.
Les systèmes alimentaires : émergence de nouveaux modèles
Foued Cheriet et Pasquale Lubello montrent le rôle croissant des multinationales. Partant de la théorie de la division du travail, ils défendent l’idée d’un monde agro-alimentaire dominé par les multinationales qu’elles soient du Nord comme du Sud. Les auteurs citent notamment la filière de l’huile de palme (Malaisie, Indonésie), l’émergence des vignobles de l’hémisphère sud. L’analyse porte sur le marché des denrées agricoles, les grandes firmes tableau des grandes multinationales pages 135 et 136, les enjeux géostratégiques et sociétaux.
Stéphane Fournier et Jean-Marc Touzard décrivent la multiplicité des modèles de production et d’échanges qui coexistent et jouent des rôles différents en matière de sécurité alimentaire. Pour les deux auteurs le développement des circuits courts, alternatifs, est la réactivation de formes anciennes d’échanges. Les divers modèles de production, de transformation et de distribution sont en concurrence. Les économies d’échelle du modèle agro-industriel, avec ses gros volumes et ses prix contenus s’opposent aux modèles alternatifs.
Ronan Le Velly propose une analyse des initiatives à l’échelle des micro-territoires : Amap, circuits d’approvisionnement local de la restauration collective, filières du commerce équitable. Il recherche quelles sont les formes de régulation et comment elles conduisent à une hybridation avec le modèle conventionnel.
Conclusion
Mentalités et réalités ont évolué ces dernières années mais ces innovations restent à la marge d’autant que l’agro-industrie semble intégrer les nouvelles aspirations des consommateurs pour un modèle durable. Pour les auteurs aller vers une production alimentaire durable est une nécessité avec l’organisation des filières à différentes échelles.