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La notion de patrimoine est complexe, évolutive et mouvante dans le temps, dans l’espace et dans sa définition même. La revue TDC permet d’en approcher les multiples facettes à partir de 3 questions :
– Quelles sont les grandes étapes de l’histoire de la politique patrimoniale en France et dans le monde ?
– Dans quelle mesure et à quelles conditions la notion de patrimoine est-elle applicable à toutes les cultures ?
– Quels défis l’extension infinie des domaines à préserver lance-t-elle aux institutions nationales et internationales ?

C’est sous la Révolution française que la notion de patrimoine prend le sens de protection des monuments. Il faut attendre les années 70 pour que « tout devienne patrimoine » et qu’on accepte même l’idée d’un « patrimoine négatif » dont Auschwitz est le symbole. En 2003, le patrimoine immatériel fait son entrée à l’UNESCO. Christian Hottin montre l’importance et les nouveaux enjeux de l’élargissement de cette notion qui s’inscrit dans un contexte de mondialisation. Dans une interview, l’anthropologue David Berliner analyse l’accélération des candidatures.

Le patrimoine est lié à la propriété et à l’identité. Sa dimension collective est importante. C’est un bien culturel commun dont la reconnaissance implique par voie de conséquence la reconnaissance d’un groupe. C’est cette définition évolutive et cette histoire de la notion que Michel Melot, ancien directeur de l’inventaire du patrimoine culturel, s’attache à rappeler.

Anne de Mondenard, conservatrice du patrimoine, montre comment la photographie a permis, au XIXème siècle, l’identification des monuments à préserver, notamment avec la Mission héliographique , composée de cinq photographes (M. Bayard, E. Baldus, H. Le Secq, G. Le Gray et A. Mestral). Outre l’intérêt que cette mission présente pour l’histoire du patrimoine, elle traduit la reconnaissance de la photographie comme art.

Yann Potin, quant à lui, s’interroge sur la place et le rôle des 400 km des papiers des archives et des Archives comme lieu à l’ère du numérique. Il insiste sur leur rôle problématique mais fondamental.

La suite du dossier s’intéresse à l’archéologie, longtemps cantonnée à la préhistoire et à l’antiquité selon Paul Salmona, directeur du développement culturel à l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives. Actuellement, ces « archives du sol » concernent tous les espaces et toutes les époques. C’est un patrimoine protéiforme qui peut être falsifié, détruit ou menacé en fonction des enjeux idéologiques.

La plupart des intervenants mettent également en valeur les risques d’une patrimonalisation excessive et les écueils de cette politique (trop grande institutionnalisation, coût, hostilité du monde libéral qui voit dans cette notion un obstacle au libre-échange notamment dans l’industrie du cinéma)

Ce dossier a le grand mérite de dessiner une définition en creux, sans manichéisme. Chaque intervenant en dessine une facette permettant une approche nuancée de la notion.

Sept études de documents sont autant de biais pour comprendre le patrimoine de manière pratique à partir d’exemples :
– Viollet-le-Duc et la restauration
– Geoffroy Dechaume, sculpteur, restaurateur et conservateur
– Patrimoine industriel : les papiers peints Leroy
– Les Halles, une histoire de Paris
– Le musée d’anatomie de Montpellier
– Les Compagnons au patrimoine immatériel

Il faut noter que ce dossier, ambitieux, s’adresse principalement à des lycéens de bon niveau car les concepts et les exemples abordés ne sont pas d’approche évidente (sans remettre aucunement la clarté du propos). Les huit vidéos de 2 à 10 mn qui complètent le dossier sur le site sont plus accessibles y compris pour des collégiens. Les thèmes sont variés et complémentaires des études de documents (ex. la construction du forum aux halles de Paris, le patrimoine industriel à travers les exemples de Decazeville, Guise, Arc-et-Sans, le travail des archéologues comme lors des fouilles d’urgence à Chatenoy-le-Royal etc.)

Un outil précieux dans les enseignements d’exploration, d’histoire des arts ou des arts appliqués