« Salut à vous, cow-girls et cow-boys ! Bienvenue dans notre étrange Far West, peuplé de bœufs enragés, de démons géants et d’autres bizarreries. Et aussi d’un bras en forme de cartouche. Quoi de plus bizarre qu’un bras-cartouche ? Une moustache peut-être. Voilà notre grand secret pour écrire un western : Alessio [Fioriniello] et moi avons une moustache. […] Voilà, voilà… […] Et bienvenue dans les rangs de la Frontière ! ». Ces quelques phrases de Jacopo Paliaga, auteur de scénarios de bandes dessinées et de romans jeunesse, introduisent ce premier tome de la série The Frontier et annoncent bien la couleur !

Quand des criminels deviennent la dernière chance de l’humanité

Dans l’Ouest américain des années 1870, une gigantesque et mystérieuse tempête, un amas de nuages noirs et d’éclairs, dont s’échappent des gémissements inhumains, et accompagnée de créatures ténébreuses, sème la mort sur son passage. Nul ne semble savoir d’où elle vient et jusqu’où elle ira. Pour lutter contre ce fléau, se dresse une organisation composées des pires criminels de l’Ouest, La Frontière.

Dans ce premier tome, nous suivons des un groupes de cette Frontière. Ces cinq criminels aux pouvoirs surnaturels ont pour mission de sacrifier la totalité de la petite ville de Caldwell au cours d’un rituel sanguinaire. Le lecteur découvre, à la fin de ce tome, que quatre autres groupes ont la même mission. Ces anti-héros, tous plus malfaisants et violents les uns que les autres, ont été rassemblés par un étrange homme en blanc qui leur a proposé un pacte : intégrer la Frontière en échange de leur vie ou d’un souhait. Ils sont dirigés par Jane la Calamité. Ce groupe hétéroclite se compose également de Butch, un ancien shérif manchot, de l’étrange Notte, de Démon, un franc-tireur incontrôlable, ainsi que de Kaya, une indienne en quête de vengeance.

A mesure que les cinq protagonistes avancent dans leur mission, leur passé se dévoile peu à peu, et notamment les pactes conclus avec l’homme en blanc. Ces criminels sans foi ni loi réalisent peu à peu que leur mission n’est peut-être pas ce qu’elle semble être. Ils se découvrent, de plus, une petite étincelle de conscience : sont-ils capables, pour arrêter la tempête, de massacrer une ville entière de sang-froid ?

Ce premier tome se termine sur le massacre des autres groupes de la Frontière par l’homme en blanc et par le refus de nos héros de finir leur mission. Ils décident de se diriger vers le ranch de Mr Bone, l’homme en blanc, vers lequel se resserre la tempête.

Un western survitaminé à l’humour grinçant

L’histoire, décalée et déjantée, est menée à un rythme effréné, les scènes d’action alternant avec des dialogues « trempés dans l’acide », pour reprendre les termes de ses créateurs. Les visages originaux des personnages et les graphismes nerveux d’Alessio Fioriniello renforcent le côté irrévérencieux de l’intrigue, contribuant à une ambiance globale qui rappelle la série The Boys. Selon Felix Pirovano, l’éditeur de la série, The Frontier est la rencontre entre le film Les Sept Samouraïs, d’Akira Kurosawa, et The Boys. Pour reprendre encore ses termes, quand on lit l’histoire, on a l’impression « de voir du Clint Eastwood sous acide ». C’est un bon divertissement pour les amateurs de western et d’action déjantée.

La violence est omniprésente et devient comique tant elle est disproportionnée et absurde. Associée aux dialogues surréalistes et au caractère déjanté des personnages, elle renforce l’humour noir qui sous-tend l’ensemble de la série. Les morts s’enchaînent à un rythme affolant, en dépit du choix final de Jane de renoncer à leur mission.

La mise en page met bien en valeur le dynamisme et le rythme très rapide de l’histoire. L’alternance entre cases en pleine page, gros plan et découpage très précis de certaines actions mettent en valeur les combats et le vent de folie qui souffle sur la ville de Caldwell. Les visages très expressifs des personnages, leurs relations complexes et un fond digne d’un western hollywoodien renforcent l’originalité de The Frontier.

The Frontier, au-delà de son intrigue survitaminée et de personnages hauts en couleur, a la particularité d’être à la fois un album papier et un webtoon, c’est-à-dire une bande-dessinée en ligne. Les chapitres sont publiés gratuitement, en amont de la sortie de l’album, sur le site Webtoon, au rythme d’un chapitre par semaine.