Thémistocle, Stratège athénien, artisan de la victoire de Salamine en -480.

Ce roman historique, fortement documenté, est assorti d’un lexique qui permet aux curieux de disposer de définitions très précises sur les termes employés. L’ouvrage  raconte de façon romancée le destin de Thémistocle, 524 – 459, stratège athénien dont la hauteur de vue a permis à cette ville de s’imposer pendant un temps à la tête des cités grecques, jusqu’à ce que n’éclate la guerre du Péloponnèse avec Sparte.

Cet affrontement perdu par les athéniens a signé l’acte de décès de la cité démocratique en – 404.

Thémistocle a sauvé Athènes

Issu d’un couple mixte, avec un père athénien et une mère étrangère à la cité, donc métèque, Thémistocle a connu une jeunesse turbulente et on lui prête de très nombreuses relations amoureuses, avec les deux sexes. Déshérité par son père, il s’engage dans la vie publique et s’associe dans les débats de l’Héliée au parti démocratique. Son adversaire est Aristide, stratège lors de la bataille de Marathon en -490 qui représente le parti aristocratique dans la cité.

L’action du roman commence à la veille de la bataille de Salamine, lorsque son adversaire Aristide semble s’opposer à lui et à ses différents projets qui ont conduit la cité d’Athènes à s’orienter vers la mer, avec la construction du port fortifié du Pirée. Thémistocle parvient à convaincre ses concitoyens de laisser les armées du perse mettre la cité à sac pour livrer sur mer la bataille décisive.

Les soldats de Salamine

De sang et de fureur

L’ouvrage apparaît comme un récit intime qui associe le réel sentiment d’amitié voire d’amour qui peut affecter ces hommes publics qui se sont imposés dans la cité par leurs qualités oratoires, et les turpitudes d’une vie politique particulièrement âpre.

Comme à toutes les époques, tous les coups sont permis, la calomnie, la trahison, et bien entendu cela se termine par le bannissement après le vote d’un ostracisme préparé en réalité de longue main. Aristide mais également Thémistocle en feront les frais.

Dans ce duo de circonstance les deux ennemis politiques sont associés dans la lutte contre les armées de Xerxès, l’empereur perse qui entend venger l’échec de son père à Marathon.

Thémistocle, souviens-toi Salamine

L’armée du grand roi compte plus de 300 000 hommes, issus des différentes parties de l’empire. Les fantassins grecs ne peuvent aligner face à cette multitude que 50 000 combattants issus des différentes cités, au nombre de 31, qui se sont coalisées contre l’envahisseur. La tactique de Xerxès repose sur ce que l’on appellerait aujourd’hui une action interarmes, associant les troupes terrestres, archers, fantassins, cavaliers, à une flotte qui longe la cote pour en assurer l’approvisionnement.

Lorsqu’il s’est assuré du pouvoir à Athènes, l’essentiel des ressources de la cité a été consacré, par Thémistocle, à la formation d’une marine. Les citoyens les plus pauvres, et même les métèques se retrouvent comme rameurs dans les trières, mais leur action est loin d’être subalterne, car de la puissance de leur bras dépend l’efficacité dans le combat naval. Les navires sont armés d’un éperon qui permet de couler les bâtiments adverses. Tout dépend dans ce cas de l’habileté dans la manœuvre, et de la coordination des rangs de rameurs bâbord et tribord.

Peuple des rameurs contre hoplites et cavaliers

Dans les échanges qui se déroulent entre Thémistocle et ses proches, ce rôle du citoyen rameur est constamment rappelé. Le message est évidemment politique puisque Thémistocle s’affirme comme le représentant du peuple, s’opposant ainsi à Aristide, issu des familles patriciennes de la cité.

L’action des dieux est également sollicitée, et on suit nos personnages avant le grand affrontement jusqu’au temple de Delphes, pour entendre l’Oracle. Celle-ci parle du vent à qui il convient de sacrifier pour qu’il soit favorable.

Salamine et les guerres médiques

C’est d’ailleurs ce qui se déroule dans cet affrontement car les amiraux perses sont beaucoup moins habiles à la manœuvre que leurs adversaires athéniens. La flotte perse avait déjà été largement éprouvée par la tempête qui avait endommagé de nombreux navires après la traversée de l’Hellespont.

Lorsque le bruit et la fureur des batailles ne se font plus entendre, on parcourt les collines au pied des oliviers de l’Attique et du Péloponnèse. On se rend au temple d’Artémis, 18 ans après la bataille de Salamine, accoudés à la balustrade de la terrasse qui surplombe un parterre de rosiers et de fleurs venues de perse.

Thémistocle raconte, alors qu’il est exilé après son bannissement en -470, comment il avait pu réconcilier ses concitoyens au début du printemps, face à la menace que les armées de Xerxès faisaient peser sur le nord de la Grèce.

Ses calomniateurs, Aristide et Cimon, avaient déjà tendance à réécrire l’histoire en abordant la victoire de Platées, celle des hoplites et des cavaliers, faisant oublier les combats du peuple des rameurs à Salamine.

Vie de Thémistocle, Plutarque

C’est donc un témoignage désabusé que livrent ces chapitres qui parlent de Thémistocle lors de son exil. La vérité historique nous amène quand même rappeler que ce dernier, après l’ostracisme dont il avait été l’objet, s’était rendu auprès du successeur de Xerxès, Artaxerxès, qu’il avait reçu avec tous les honneurs qu’il estimait devoir mériter.

Olivier Delorme imagine la mort de Thémistocle, ivre de vin et de chanvre, qui refuse de retourner à Athènes, malgré la demande de Périclès. Stisileos, son compagnon d’exil doit lui apporter le sang d’un taureau sacrifié à boire dans sa tente. Dans sa requête, Thémistocle demanda son compagnon de lui infliger une blessure fatale au niveau de la cuisse, là où passe le triangle de Scarpa avec l’artère fémorale. Le lien avec le sang du taureau est évident car c’est dans cette partie du corps que les toreros sentent leur vie partir, lorsque la corne a pénétré la chair.

Présentation éditeur

Thémistocle

Il y a 2500 ans, dans une Athènes où la démocratie, encore en devenir, est contestée par ceux qui ont tout mais n’ont pourtant jamais assez, un homme contribue à l’enraciner tout en devenant l’âme de la Résistance à l’invasion perse. Il s’appelle Thémistocle.
Clairvoyant et provocateur, maître dans l’art de la ruse, stratège d’exception et premier des « grands hommes » athéniens à sortir d’une famille obscure, il est à la fois l’artisan de la décisive victoire navale de Salamine, le promoteur de réformes démocratiques et celui qui va donner à Athènes, face à la militariste Sparte, les instruments de sa puissance et de son rayonnement pour le siècle qui suit.
Mais les peuples se fatiguent de ceux qui veulent les mener trop haut et ceux qui, à Athènes, entendent rétablir le pouvoir des « bien nés et bien nantis » n’auront de cesse de l’abattre. Ostracisé, proscrit, Thémistocle termine sa vie en exil… sans avoir jamais renoncé à prendre sa revanche.

Olivier Delorme est né en 1958. Il vit aujourd’hui sur une île grecque qui a inspiré plusieurs de ses sept romans, tous disponibles chez H&O. Agrégé d’histoire, ancien maître de conférences à Sciences po Paris, il est l’auteur des trois tomes de La Grèce et les Balkans, du Ve siècle à nos jours (Gallimard, 2013), qui font aujourd’hui autorité sur l’histoire de la région, ainsi que de plusieurs essais et d’articles sur la situation géopolitique en Méditerranée orientale. Dans ce livre, il renoue, en Romancier, avec sa formation d’historien de la Grèce ancienne, d’archéologue et de numismate.