C’est une œuvre monumentale que nous propose ici l’auteur de bande-dessinée Tardi. Cet ouvrage regroupe les trois œuvres publiées précédemment par TardiMoi, René Tardi, Prisonnier de guerre au stalag II B, Jacques Tardi, Casterman, 2012 et Moi, René Tardi Prisonnier de guerre au Stalag II B, Jacques Tardi tome 2. Mon retour et la suite. Paris : Casterman, 2014 et consacrées à l’histoire de son père, René, et, plus particulièrement à la captivité de celui-ci durant la Seconde Guerre Mondiale, au sein d’un des nombreux camps de prisonniers de guerre dirigés par la Wehrmacht, le stalag II B.

René Tardi, engagé dans l’armée française depuis 1935 et conducteur de char, est fait prisonnier le 22 mai 1940 à Mons-en-Chaussée dans la Somme. Il fait partie des 1,8 millions soldats faits prisonniers de guerre par les Allemands, dont la majeure partie (plus de 1,5 Millions) furent envoyés dans les quelques 120 camps de prisonniers de guerre à travers l’Allemagne et la Pologne.

Aux débuts des années 1980, Tardi demanda à son père René, de lui raconter précisément ce qu’il avait vécu durant la guerre. Tardi raconte que son père noircit à la main des petits cahiers d’écolier. Trois cahiers dans lesquels son père raconte ses motivations, depuis son engagement dans l’armée, son mariage en 1937, la débâcle de 1940 et les cinquante-six mois passées au Stalag II B en Poméranie. Trois petits cahiers que Tardi a lus, puis remisés dans une boîte avec d’autres souvenirs de cette période. Trois petits cahiers qu’il a ressorti quelques temps après le décès de son père René et qu’il a donc mis en images ici dans cet ouvrage.

C’est une œuvre de mémoire qui s’offre à nos regards ici. Une mémoire collective sur le sort de ces prisonniers de guerre, si nombreux après cette drôle de guerre et la débâcle de l’armée française. On y découvre la froid, la faim, la promiscuité, les rituels éprouvants de leur existence concentrationnaire, l’appel, la fouille, les brutalités et les humiliations. On y voit les petites résistances quotidiennes, la solidarité entre camarades. Une mémoire familiale, également, dans laquelle Tardi se représente enfant, en culottes courtes, dialoguant constamment avec son père et lui posant ainsi de nombreuses questions.

Il s’agit d’un très joli récit, un roman graphique à découvrir absolument !