Approcher la ville par le skate-board est une idée géniale pour comprendre comment les skateurs détournent les aménagements des urbanistes pour en faire leur terrain de jeux. C’est le pari qu’a essayé de relever ici Julien Glauser, skateur, conservateur adjoint au Musée d’ethnographie de Neuchâtel, anthropologue et urbaniste, développant une activité de vidéaste et de photographe.
L’ouvrage s’ouvre sur un flash-code renvoyant à une vidéo « Tokyo through the looking glass : the skateboarder’s imaginary, a study in visual anthropology » de 52’ passionnante à visionner. On y suit l’auteur et ses amis tokyoïtes skateurs à la recherche des meilleurs spots pour réaliser de belles images de leurs performances. Chaque recoin, muret, rampe est examiné, palpé avant d’y tester des figures libres, le tout la nuit loin des flux de passants pressés. Un jeu de cache-cache se déploie avec les policiers et les vigiles des résidences privées soucieux de garantir aux citoyens un repos nocturne de qualité. L’ensemble est ponctué des interviews des pratiquants revenant sur la genèse de leur parcours et l’histoire de la pratique du skate à Tokyo. Par ce biais, se comprend le rapport particulier des skateurs à la ville.
Malheureusement, cette belle découverte ne se retrouve pas au fil de l’ouvrage assez poussif. La mise en page déconcerte dès la première page de l’introduction. Ainsi, page 18, la note de bas de page s’apparente à la citation de Georges Weulersse alors que celle-ci se trouve au verso. Le contenu de l’ouvrage est essentiellement constitué d’une compilation de notes de lecture sans qu’une thèse ne soit véritablement développée. C’est ainsi que le premier chapitre revient sur les jalons de l’histoire de la pratique du skate-board depuis les années 1960 avant que le chapitre 2 présente l’histoire de Tokyo sans que le lien avec la pratique du skate-board ne soit explicite. Il faut donc attendre le chapitre 3 pour que le texte renoue avec le cœur du sujet via des portraits de skateurs, la pratique étant essentiellement masculine. Le chapitre 4 présente les ressorts de la diffusion des images fixes et mobiles de ce sport par le biais des magazines, des vidéos et surtout aujourd’hui internet : sans doute une mine pour un skateur désirant se lancer et se faire connaître !
Catherine Didier-Fèvre © Les Clionautes