Comprendre le fonctionnement de l’Intelligence Artificielle est un enjeu majeur dès aujourd’hui. Que l’on ait déjà quelques connaissances ou pas, cet ouvrage est conçu pour être accessible à tous et il pose les bases pour pouvoir argumenter.
Questions-réponses
Le format choisi se décline autour de questions-réponses et d’une mise en scène graphique attrayante. Chaque entrée se termine par « un mot de la fin », manière de suggérer le débat et donc de prolonger la discussion. Il est coordonné par Olivier Cappé, directeur de recherche au CNRS au Département d’informatique de l’ENS-PL et Claire Marc, médiatrice scientifique et facilitatrice graphique. Cet ouvrage donne la parole à de nombreux spécialistes présentés en fin d’ouvrage. On peut regrouper leurs différentes interventions en quelques grandes thématiques.
L’IA a une histoire
L’expression date de 1956. Il faut donc se souvenir que l’IA n’est pas née hier et n’en est pas à son premier essai. Elle a connu des hauts et des bas. On parle même d’ « hiver de l’IA » pour désigner les années 70. Elle a su en tout cas rebondir en raison de trois éléments clés : l’augmentation de la puissance de calcul, la disponibilité massive des données et l’émergence de nouveaux algorithmes. Les géants du numérique ont contribué à l’émergence de l’IA en la commercialisant dans différents domaines. Les auteurs tiennent à souligner le fantasme que représente l’idée de « super intelligence artificielle ».
Quelques principes de base
On peut conseiller le document de la page 28 qui explique de façon très claire ce qu’est l’apprentissage automatique supervisé. Il y en a aussi de très clairs sur le réseau de neurones et sur les réseaux profonds. Le livre explique ensuite comment fonctionne un LLM. Ce modèle ne comprend pas les textes comme le fait un humain mais il les représente sous forme de systèmes d’unités individuelles. Introduits en 2018, les transformeurs améliorent la contextualisation en prenant en compte, non pas des petites parties d’une séquence, mais l’ensemble de celles-ci. Les auteurs soulignent aussi l’importance des passeurs graphiques ou GPU qui sont très chers et très énergivores.
Comprendre les IA
L’IA générative permet de synthétiser de nouvelles données. Il peut s’agir de textes, d’images mais la question qui se pose, dès à présent, est celle du droit de propriété intellectuelle. Une entrée se demande si l’IA voit désormais mieux que nous. Elle montre les applications avec la reconnaissance faciale, le diagnostic médical, mais elle note également les biais qui affectent l’IA. De plus, elle peine à interpréter des scènes complexes. Il faut remarquer par ailleurs que les IA ont écrit avant de parler.
L’IA autonome ?
Il faut se méfier de toute comparaison entre l’homme et la machine sur le processus d’apprentissage car les motivations humaines sont bien plus nuancées et ne reposent pas uniquement sur des récompenses explicites. La question du pilotage des robots par l’IA est souvent le lieu de fantasmes. Les auteurs, après avoir rappelé la définition exacte de robot, montrent que la majorité fonctionne comme des automates programmables. Ils donnent ensuite des exemples de ce qu’on peut faire avec des robots contrôlés par IA, comme se repérer dans l’environnement ou attraper des objets. Les robots peuvent soulager les hommes de tâches fatigantes comme en agriculture, encore faut-il réfléchir aux coûts éthique et social de telles applications.
L’IA et la société
Depuis la fin des années 2010, les méthodes d’IA générative ont considérablement amélioré les capacités d’interaction homme/machine en détectant les émotions des utilisateurs. C’est surtout sur l’approche inductive que les méthodes d’IA basées sur l’apprentissage automatique ont réalisé des avancées spectaculaires depuis quinze ans. L’IA seule ne peut rien car la simple observation des liens statistiques entre différents facteurs n’est pas suffisante pour déterminer des liens de cause à effet. On lira avec profit l’entrée intitulée « l’IA peut-elle être induite en erreur ? » où on trouve un cas très significatif pour contourner un refus de l’IA de livrer une information sensible.
D’autres questions demeurent
La fin de l’ouvrage aborde d’autres thèmes essentiels, comme le respect de la vie privée et surtout l’amplification des biais. L’équité algorithmique en apprentissage automatique repose, par exemple, sur le fait qu’un algorithme peut être dit équitable si son taux d’erreur est le même pour tous les groupes. Les biais algorithmiques montrent l’interaction étroite entre la technologie et la société. Outre les réflexions théoriques, l’IA soulève des questions éthiques concrètes liées à son utilisation comme dans le cas de la surveillance de masse ou des véhicules autonomes.
On ne pourra que conseiller de lire en détails les sept exigences que l’on doit avoir en tête par rapport à l’IA. Parmi elles, citons la transparence, la préservation de l’action humaine et du contrôle humain ou encore la sécurité. Ce livre réussit donc à aborder des questions parfois très techniques, de façon très claire, et a le souci d’ouvrir dès que possible à la réflexion. Un ouvrage conseillé.