Alain Serres, ancien instituteur en maternelle, publie son premier ouvrage jeunesse aux éditions La Farandole en 1982. Depuis, il a fait paraître une cinquantaine d’ouvrages allant du premier album pour bébé au documentaire adolescents en passant par des recueils de poèmes, de chansons et de pièces de théâtre. En 1996, il fonde la maison d’édition Rue du Monde dont il est toujours le directeur. En 1999, il demande au dessinateur Zaü d’illustrer un ouvrage qui a pour thème la défense des droits de l’enfant. Une véritable amitié et complicité semblent s’être épanouies entre les deux hommes qui signent là leur dix-neuvième collaboration en vingt ans.
Zaü, de son vrai nom André Langevin, né en 1943 à Rennes, est ancien étudiant de l’École Estienne de Paris, où il suit les cours d’arts graphiques. En 1967, il entre dans l’édition jeunesse, notamment à la toute jeune École des Loisirs, en illustrant l’album d’Alain Calme, Nonante de Grospilon. Il travaille ensuite pour la presse jeunesse (Bayard, Milan) et entre à l’agence publicitaire Ted Bates comme indépendant. Tout en continuant à travailler dans la publicité, il collabore avec différents éditeurs (Nathan, Syros, Epigones, Casterman …). Il est devenu l’un des illustrateurs maison des éditions Rue du Monde.
Tu seras les yeux de la mer reprend le concept d’un album précédent, publié en 2017, et qui avait été un véritable succès de librairie (plus de 30 000 exemplaires vendus), Je serai les yeux de la Terre, des mêmes Alain Serres et Zaü. Il met en regard, sur l’étendue d’une double-page au format à l’italienne, une photographie d’une scène de littoral ou de milieu marin souillé par l’homme et une image réalisée à l’encre de Chine. Un petit texte empreint de poésie met en relation les deux images et suggère une conduite à tenir de l’enfant, dont la toute jeune Greta Thunberg semble être devenue une image emblématique (p.82), en qui les auteurs placent tous les remèdes contre les saccages de l’homme. Tout semble traité : la pollution industrielle des côtes et des fonds marins, le continent de plastiques, son éventuel recyclage, la pêche industrielle, le réchauffement climatique, l’érosion des côtes, les naufrages de porte-containers, les vagues de migrants qui sillonnent au péril de leur vie mers et océans de la planète, le tourisme de masse, toujours plus envahissant.
L’ouvrage est également agrémenté de vastes images des fonds marins ou de littoraux ensoleillés ou sauvages. Le mariage de l’encre de Chine et des photographies couleurs sont à la fois des avertissements et des notes positives. Les océans sont souillés mais il existe des solutions quand on décide de ne pas baisser les bras semble vouloir dire Alain Serres. S’il ne s’agit pas véritablement d’un album de fiction dont la narration serait séquentielle, il est davantage question ici d’un documentaire d’un genre spécial qui allie poésie des textes et des images ainsi qu’informations cruciales. J’insiste bien sur cette poésie des images, sur leur esthétisme, au sens où elles sont là pour suggérer des émotions, sans doute même une prise de position et une action future du jeune lecteur.