Le journaliste Benoît Collombat et le porte-parole de l’association Survie, Thomas Borrel, sont deux des coordinateurs de cet ouvrage collectif rédigé par un ensemble de spécialistes de la Françafrique, aussi bien des historiens et chercheurs que des journalistes ou des militants associatifs . Y participent Fabrice Arfi, Jean-Pierre Bat, Olivier Blamangin, Catherine Coquery-Vidrovitch, Laurent Correau, Claire Cosquer, Marielle Debos, Raphaël Granvaud, Nadia Yala Kisukidi, David Mauger, Jean Merckaert, Khadim Ndiaye, Maurin Picard, Coralie Pierret, Fanny Pigeaud, David Servenay, Kalidou Sy, Ndongo Samba Sylla, Jean-Bruno Tagne, Ghislain Youdji Tchuisseu, Fabrice Tarrit, Yanis Thomas.
Ce livre volumineux revient sur 80 ans de relations entre la France et le continent africain et la manière dont s’est développé ce système de néo-colonialisme via la coopération ou le développement. Il sort alors que cet été deux coups d’Etat retentissants au Niger et au Gabon, après le Burkina, le Mali et la Guinée, ont continué à mettre à mal cette Françafrique dont Paris annonce la mort depuis des dizaines d’années. Dans leur préface, les coordinateurs préviennent que le livre, bien que copieux, ne prétend pas à l’exhaustivité : «il assume un point de vue documenté tout en ouvrant des pistes de recherches et de réflexion».
Le livre est organisée en six parties, chronologiques: « La Françafrique en germe (1940‐1957) », « Des indépendances piégées (1957‐1969) », « La folie des grandeurs (1969‐1981) », « La fausse alternance (1981‐1995) », « Dévoilement et camouflages (1995‐2010) », « Le temps de la “reconquête” (2010‐2021) » . Chaque partie s’ouvre par une introduction qui expose les grands enjeux de la période en question, puis se composent ensuite d’une dizaine d’articles thématiques, illustrés de photos et cartes. Des encadrés mettent en lumière des faits, des personnages, des aspects précis et souvent méconnus de cette histoire politique, économique ou culturelle de la Françafrique. Tout est sourcé, dans le corps du texte (pour éviter une lecture rendue fastidieuse par la multiplication des notes de bas de page) et chaque article s’achève sur une bibliographie souvent impressionnante.
L’ouvrage est de parti pris mais ne s’en cache pas et développe la thèse d’une «Françafrique» qui, loin d’avoir disparu comme il est régulièrement et officiellement prétendu, survivrait sous des formes sans cesse renouvelées et singulièrement agissantes. C’est un ouvrage de référence sur un sujet qui reste pointu mais d’actualité ; le lecteur peut y entrer librement, par curiosité sur un point particulier ou pour préparer un cours (je pense notamment aux chapitres de terminale sur la la France depuis 1945 : nouvelle place dans le monde etc.). Il ne s’agit nullement d’un ouvrage de vulgarisation, nous sommes à un niveau universitaire bien que l’intention des coordinateurs soit que le livre soit accessible aussi bien aux connaisseurs qu’aux néophytes un peu curieux.