Le monde de la Renaissance est marqué par les découvertes et les grands voyages, par la rencontre de territoires et de peuples jusqu’alors inconnus. Grégoire Holtz, Jean-Claude Laborie et Frank Lestringant sont trois spécialistes de la littérature de voyage du XVIe siècle. Cette anthologie se compose de trois parties : La « marche turque », la route des Indes et le Nouveau Monde, du plus proche au plus lointain.

Chaque extrait est traduit en français moderne et accompagné d’une notice de présentation, de notes explicatives et d’une bibliographie.

Première partie – La marche turque

Cette première partie évoque l’empire ottoman, les échanges diplomatiques et scientifiques sont effectivement importants dans le contexte de l’alliance éphémère entre François Ier et Soliman. Ces voyageurs ont laissé des descriptions des lieux, des moeurs des habitants.

Léon l’Africain a voyagé en tant que diplomate en Méditerranée et en Afrique subsaharienne. Il a été fait prisonnier par des corsaires espagnols en 1518. Léon X le fait baptiser et il entre dans l’entourage du cardinal Egide de Viterbe, il échange alors avec de nombreux humanistes et publie un Livre des hommes arabes illustres et une Description de l’Afrique. L’extrait proposé évoque Fès et les « arts du verbe » comme la poésie, l’enseignement, la divination.

Jean Chesneau est le secrétaire de Gabriel de Luitz, chargé de négocier l’alliance de François Ier avec Soliman le Magnifique. Il décrit son voyage au Caire. Pierre Belon décrit aussi Le Caire et les pyramides lors de sa participation à une mission scientifique en Egypte.

Guillaume Postel, protégé de Marguerite de Navarre, effectue plusieurs voyages en Orient. Il livre un point de vue original dans La République des Turcs puisqu’il insiste sur les points de convergence religieuse et fait un éloge des Turcs à travers l’aumône et l’hospitalité.

Nicolas de Nicolay, géographe du roi, est envoyé dans le cadre d’une mission scientifique et mène une enquête anthropologique à Istanbul. Le passage évoque l’imaginaire lié aux corps.

Jean Palerme entreprend un long pèlerinage en Egypte, en Arabie, en Syrie, en Anatolie, en Grèce et en Terre sainte dans un contexte de renouveau des pèlerinages à la fin du XVIe s, pendant la contre-Réforme. Sa description de Jérusalem a été sélectionnée dans ce recueil.

Deuxième partie – La route des Indes

Une deuxième partie permet d’évoquer les « Grandes découvertes » notamment à travers des extraits des journaux de voyage des navigateurs.

Le premier voyage de Vasco de Gama, en 1497-1499, est ainsi évoqué, à travers l’arrivée à Calicut et la réception chez le Samorin. L’inconnu est ici assimilé à ce qui est connu, le narrateur est convaincu d’être arrivé dans un royaume chrétien et s’étonne à peine des représentations hindoues. Le voyage de Magellan de 1519 à 1522 est ensuite raconté par l’intermédiaire d’Antonio Pigafetta. Trois épisodes ont été sélectionnés : celui des « géants de Patagonie, qui donnent lieu à une légende vivace jusqu’au XVIIIe siècle puis celui de l’arrivée aux îles Mariannes, surnommées les « îles des Larrons » en raison de la résistance des insulaires et des vols commis lors de l’escale et enfin celui évoquant des manières de table dans une petite île des Philippines.

Gomes Eanes de Zurara est un chroniqueur du royaume portugais et rédige une Chronique de Guinée en 1452-1453. La Guinée est un terme générique pour désigner l’ensemble de l’Afrique. La chronique est un travail de compilation. L’extrait cité aborde les motivations royales.

D’autres voyages moins connus sont évoqués. La Relation du royaume de Congo (1591) de Duarte Lopes et Filippo Pigafetta est un des rares récits de voyageurs de la Renaissance sur l’Afrique. Lopes est sans doute pâti pour pratiquer la traite et devient ambassadeur du roi congolais Alvaro Ier, converti au christianisme. Les extraits choisis évoque une volonté de domination militaire aussi bien que religieux. Francisco Alvarez relate le déroulement de l’ambassade envoyée vers la cour du Négus, assimilé au mythique « Prêtre Jean ». Un texte de Jean Parmentier évoque l’expédition des frères Parmentier vers les Molluques, expédition qui enchaîne les difficultés : marins tués, scorbut, mort des frères Parmentier. Ludovico di Varthema part d’Italie pour l’Inde en 1500 et publie un des récits de voyage les plus populaires de la Renaissance. L’Itinéraire de Jan Huygen Van Linschoten est le premier témoignage d’un Européen ne venant pas de la péninsule Ibérique. Il livre des informations précises sur la route maritime et les épices, sur le fonctionnement des comptoirs portugais.

Une lettre de François Xavier et des extraits de la biographie de Fernao Mendes Pinto permettent d’aborder les voyages des Portugais au Japon.

Troisième partie : Le Nouveau Monde

On retrouve dans cette partie des lettres de Christophe Colomb, d’Amerigo Vespucci sur ses voyages aux Antilles, de Péro Vaz De Caminha qui faisait partie de l’expédition de Cabral, qui découvre le Brésil. Cette dernière lettre narre la rencontre avec les indigènes avec émerveillement. Elle est complétée par la lettre d’un Normand qui a voyagé au Brésil : Binot Paulmier de Gonneville. 

Un routier, c’est-à-dire un itinéraire de marin avec repères et descriptions, rédigé par Duarte Pacheo Pereira, aborde la « Côte de l’Or » (Ghana actuel), région qui devient un centre de traite mais aussi de production aurifère.

Ensuite, Giovanni Da Verrazano, un marchand navigateur originaire de Florence, part pour l’Amérique à la demande de François Ier en 1523, il longue la côte atlantique de l’Amérique du Nord, des Carolines jusqu’au Maine. Il décrit un idéal de « bon sauvage ».

Hernan Cortes décrit dans ses lettres Tenochtitlan, notamment les sacrifices humains qui ont servi de justification à la conquête. Ce récit est complété par celui de Bernal Diaz Del Castillo, soldat qui est un des rares survivants de l’expédition de Cortes. Il donne à voir l’avancée de la conquête de l’intérieur.

Alvar Nunes Cabeza De Vaca laisse un témoignage de la rencontre entre les Européens et les Amérindiens, en dehors des chroniques officielles. Son expédition est décimée (4 survivants sur 300), il se retrouve isolé et doit s’adapter pour survivre. Il erre pendant 9 ans dans le delta du Mississippi.

Jacques Cartier évoque ensuite ses voyages au Canada de 1534 et 1536. Ce récit est complété par le récit de Marc Escarbot, avocat qui s’installe au Canada en 1606 et 1607. Son récit est différent des récits précédents dans la mesure où il établit un projet colonial et fait des comparaison à partir de ses lectures de récits de voyage.

Le texte de Hans Staden est un autre récit de survivant, puisqu’il est captif pendant 9 mois chez les Tupinamba, séjour lors duquel il craint pour sa vie.

André Thevet, cosmographe du roi dans la seconde moitié du XVIe, est un personnage controversé en raison d’erreurs, de plagiats. Mais il collecte des documents divers et inédits et publie un livre sur la France Antarctique, éphémère colonie française au Brésil. Il a aussi écrit sur un voyage imaginaire aux Indes en s’appropriant des témoignages d’interprètes.

Vicente Rodriguez, un frère jésuite, évoque une « entrada », une expédition vers l’intérieur des terres pou évangéliser les tribus. Il évoque un autre type de voyage et de découvertes loin des expéditions maritimes.

Jean de Léry, protestant français, publie une Histoire d’un voyage sur le Brésil, dans laquelle il double sa défense des protestants par une défense des Indiens, modèle dont les Français devraient s’inspirer.

Anthony Knivet est l’auteur d’un récit picaresque, Un aventurier anglais au Brésil, racontant ses mésaventures : il a été capturé par les Portugais et réduit en esclavage, avant de vivre parmi les Indiens puis de rentre en Angleterre. Il met l’accent sur la violence des colons portugais, il est pour cette raison peu diffusé dans les pays catholiques.

Le corsaire protestant Jean Ribault raconte l’expédition en Floride de Gaspard de Coligny. Il décrit des relations pacifiques entre Français et Indiens. René de Laudonnière mène la seconde expédition protestante vers la Floride. Les Espagnols mettent fin dans le sang à cette tentative de colonisation en 1565. Un témoignage de ce massacre est fait par Nicolas Le Challeux.

Ensuite, Jean-Arnaud Bruneau de Rivedoux compile différents témoignages. Du salut des Indiens de José d’Acosta synthétise les savoirs des documents des voyageurs.

Certains textes peuvent être utiles en Cinquième ou en Seconde, à condition de les simplifier et d’en sélectionner des extraits plus courts.

Jennifer Ghislain pour les Clionautes