Watchdogs Légion, Tome 1 « Underground Resistance« , s’inscrit dans la droite ligne du jeu vidéo produit par Ubisoft. Les éditions Glénat ont confié à Sylvain Runberg pour le scénario, Gabriel Germain pour le dessin, colorisé par Arancia Studio, la transposition de l‘univers cyberpunk d’un jeu de la franchise Watchdogs, très attendu.

Synopsis :

London Calling !

Surveillance de masse, milices privées faisant régner l’ordre dans les rues, crime organisé… la ville de Londres est devenue un symbole d’oppression généralisée, et seule sa population peut l’en libérer. Mouvement de résistance rassemblant des hackers de génie et insurgés prêts au combat, DedSec se dresse pour libérer la ville du joug de ces profiteurs. En enquêtant sur de mystérieuses disparitions dans le camp de Kennington Oval Camp, la journaliste australienne Louise Hartford va croiser la route d’Adam Logan, dit « Spiral », un DJ londonien dont la musique est devenue symbole de révolte. Ensemble, et avec d’autres compagnons d’infortune, ils vont devoir infiltrer les sphères du pouvoir pour faire éclater la vérité.

Plongez en BD dans l’univers cyberpunk et dystopique du blockbuster de chez Ubisoft : Watch Dogs Legion ! Dans cette aventure à la fois indépendante et complémentaire au jeu, Sylvain Runberg et Gabriel Germain tissent une intrigue mêlant anticipation, action et métaphore politique au cœur d’une terrifiante (et pourtant si crédible) Londres, entre V pour Vendetta, Blade Runner et Black Mirror. Un arc en deux tomes.

Adapter un jeu vidéo, de la même façon que l’adaptation d’une série télévisée ou d’un film, n’est pas chose facile. Ces supports médiatiques sont caractérisés par la possibilité d’utiliser la musique, mais aussi et surtout la possibilité de créer un monde visuel aux codes extrêmement clairs, immersifs. S’agissant d’une œuvre dystopique, basée sur une approche cyberpunk, la difficulté n’est pas des moindres. Ceci a cependant été largement réussi par le passé, à travers les chefs-d’œuvre comme Akira par Katsuhiro Ōtomo, Ghost in the Shell par Masamune Shirow pour les mangas ou pour, la bande dessinée occidentale, John Dredd, créé par John Wagner et Carlos Ezquerra pour ne citer qu’eux. Alors que penser de cette nouvelle bande dessinée ? Et bien plongeons dans ce Londres dystopique pour se faire une petite idée.

 

Explorer l’univers cyberpunk

Pour commencer, le cyberpunk peut est défini comme un sous-genre de la science-fiction, abordant un futur plus ou moins proche de notre époque et mettant en avant l’impact des technologies sur l’humanité, selon des considérations sociales, politiques et morales. Sont donc au cœur de ces univers la technologie, l’informatique, la cybernétique, mais aussi la bio-ingénierie. Plusieurs marqueurs sont attendus dans ce type d’œuvre : les écrans, une ambiance visuelle, une forme de violence, mais également une lecture artistique particulière, notamment musicale, à l’image du Strange Days de Kathryn Bigelow.

Pour revenir à l’univers de Watchdogs légion, le jeu vidéo met en avant la ville de Londres, dans un futur proche, sous la tutelle d’un gouvernement de type autoritaire, de multinationales, de sociétés de sécurité, ici Albion, la perfide, face auxquelles des groupes de dissidents s’opposent, et notamment une célèbre organisation de hackers, Dedsec.

 

De la difficulté de s’immerger dans un univers méconnu

Pour quelqu’un qui n’est pas familier de cet univers, il peut être un petit peu difficile dans un premier temps de s’y retrouver. Très clairement, cette bande dessinée s’adresse d’abord aux fans du jeu et il peut être complexe de s’y plonger véritablement, sans un effort initial de renseignement sur cet univers. Entre dystopie, réflexions politiques, sociales, mais aussi culturelle, contestataire, la matière est particulièrement dense et le background est difficile à installer en 50 planches. Pourtant, petit à petit, si on lui laisse sa chance, Watchdogs Légion, Tome 1 Underground Resistance fonctionne.

 

Une maîtrise technique efficace …

D’un point de vue technique, ce premier album fait le travail. Les couleurs sont très flashy, la technologie est présente, les nombreux dessins de drones, l’implémentation d’écrans, qu’il s’agisse d’écrans projetés sous forme d’hologrammes, d’incrustations dans des regards, tout ce ci est maîtrisé et très efficace. Le style très « comics » fonctionne, et ce d’autant plus dans les cases consacrées au mouvement, à l’action.

 

… non exempte de faiblesses …

Parmi les faiblesses visuelles que l’on pourra reprocher se place tout en haut de la liste la difficulté de s’immerger dans la vie de Londres. Pour un synopsis qui vante l’influence de Blade Runner, c’est tout de même un problème. Par manque de précision dans les détails, par certains choix de cadrage, par des véhicules par exemple assez grossièrement dessinés, on a bien du mal à pénétrer véritablement dans l’univers cyberpunk que l’on voudrait nous présenter. Pour qui s’intéresse à la question, on est ainsi très très loin de nombreuses planches merveilleuses des différents dessinateurs de Dredd et de Mega City one. Sans parler des travaux de Moebius ou de Yukito Kishiro pour le manga Gunnm.

 

… mais au potentiel très intéressant

Cette bande dessinée d’un niveau artistique correct, n’en reste pas moins très intéressante pour aborder différentes questions de notre époque. Concentration des pouvoirs, remise en cause de la démocratie, complotisme, fake news, importance de nouveaux acteurs, les groupes de hackers, les altermondialistes, les O.N.G., sont autant de thèmes qui sont abordés petits à petit par un scénario très efficace. Il n’y a pas de réflexion pour le moment profonde, pour ce faire il faudra attendre la suite pour avoir un meilleur jugement. Quelques jalons sont posés, c’est toujours ça de pris. Les différents points de vue des personnages sont bien mis en avant la construction scénaristique est de qualité. On retrouvera avec plaisir certains de clins d’œil, à de nombreuses œuvres, qu’il s’agisse de Mad Max pour les bandes incontrôlées, d’épisodes de Black Mirror ou encore de Tribes of Europa pour aborder une série récente, et de ses fêtes délirantes dans un Berlin partiellement détruit.

 

Watchdogs Légion, Tome 1, « Underground Resistance » : le meilleur reste à venir ?

La grande force de cette bande dessinée est de prendre une ampleur dans la dernière partie de l’histoire, sans tout dévoiler, la fête clandestine vire au désastre et l’ambiance est très réussie. Tout est très dynamique, la violence justement dosée, et on s’enfonce enfin véritablement dans les entrailles de cet univers contestataire. Un album qui finit donc sur une bonne note, laissant entrevoir une possibilité intéressante pour la suite.

Pour les élèves, cette bande dessinée peut servir de support en spécialité HGGSP, pour peu que l’on soit inventif et intéressé par ces questions de dystopies de science-fiction. Ce sera bientôt le cas dans le cadre d’un article de Clio-Geek.