L’épreuve de la pandémie et du premier confinement qui l’a accompagné a fait émerger une sorte de « collectif inattendu » selon l’auteur de ce petit opus. Enseignant-chercheur à l’université et à l’école d’architecture de Nantes, Frédéric Barbe prend appui sur l’expérience de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes et des ZAD en général pour esquisser les contours son hypothèse première, « une confrontation anthropologique majeure sous un confinement policier en forme de paravent médicalisé » (p 11).

A la croisée de l’écriture poétique et de celle des sciences sociales, le texte, rédigé pendant le premier confinement, liste de longues séries d’incohérences et de défaillances dans la gestion de cette crise sanitaire : des effets psychologiques de l’enfermement à l’illusion de continuité pédagogique, il ne saurait y avoir « de miracle technologique pour réinventer la société ou nous préserver de l’irréversibilité » (p 23).

A partir de là, l’auteur invite son lecteur à « voter avec ses pieds », à s’engager à toutes les échelles pour sauver ce qui peut l’être, pour entrevoir un avenir meilleur où l’anxiété ne serait pas démesurée et les libertés préservées. Ici réside l’hypothèse complémentaire mais la principale.

De par son style hybride et ses longues phrases malgré sa trentaine de pages, le texte est exigeant et appelle plusieurs lectures. Il offre une post-face originale où l’auteur se saisit de ses environnements de travail (école d’architecture et université) pour imaginer ce qu’une « (auto)réquisition » de ces bâtiments vidés par des étudiants contraints de suivre la continuité pédagogique à domicile permettrait en les utilisant pour abriter les plus vulnérables, isoler correctement les plus contaminés, collaborer aux enquêtes épidémiologiques et ainsi seconder des services policiers et hospitaliers engorgés dans le but de « faire société ». Une piste si jamais une autre épreuve mondiale du même ordre, voire pire, pouvait nous toucher. De manière plus opérationnelle et appartenant maintenant au passé, l’exemple de l’élan spontané de couturières ayant pallié les manques de masques du printemps peut également nous inspirer.