Les histoires croisées d’adolescents : Alma et Lam, Joseph, Sirim, Amélie dans le monde cruel de la traite négrière conduisent le lecteur d’abord au cœur de l’Afrique puis à bord d’un navire négrier, La Douce Amélie qui quittent le port de Lisbonne mais aussi dans les beaux quartiers de la Rochelle.

C’est un livre où il est question de vie harmonieuse, de traques entre ethnies pour livrer des esclaves, de trésor de pirates et de rêve de fortune. Le mécanisme de la traite en Afrique est résumé dans cette citation : « Le récit de Nao devient celui d’une fuite, rythmée par l’avancée des chasseurs d’hommes. Car en plus des marchands d’esclaves, chaque peuple et chaque village achète sa propre survie en livrant le peuple voisin ? Les liens s’abîment et se faussent. Ce commerce empoisonne le continent entier. » (p. 350).

Petit à petit se mettent en place les événements clés d’un roman plein de retentissements qu’il serait dommage de divulgâcher ; un roman tout à fait adapté au public adolescent mais qui peut aussi passionné les adultes. On assiste à la chasse aux esclaves où un piroguier complice de la traite découvre la disparition de sa famille, de son village, aux péripéties du voyage.

Un récit bien conduit qui repose sur une documentation sérieuse malgré quelques invraisemblances comme ce captif sérère qui est embarqué sur la côte du Golfe de Guinée, bien loin des côtes du Sine Saloum qui furent aussi un lieu de prise des esclaves. Alors que la plupart des ethnies citées tant comme complices des négriers que comme victimes entassées sur La Douce Amélie : Ashantis, Fantis, Igbos, Fellanis… vivent bien non loin de la côte de l’or, dans les actuels Côte d’Ivoire, Ghana, Nigeria ou plus au sud : Kikongos ; les Okos dont les tous deniers représentants sont au cœur du roman semblent ne pas exister si non dans le nom d’un village de la savane nigériane.

Le voyage de La Douce Amélie rappelle les principales escales sur les côtes d’Afrique des navires négriers1 : Gorée, Chama, Elmina ou Juda2 mais aussi les travaux sur le bateau pour augmenter le nombre d’esclaves à embarquer ainsi que les conditions du voyage3 jusqu’à Saint-Domingue.

Le dernier chapitre invite à lire la suite, annoncée pour 2021. Alma, le vent se lève est le premier volet d’une trilogie sur l’esclavage et son abolition. Quand on referme l’ouvrage nous n’en sommes qu’aux débuts de cette histoire.

Les illustrations en noir et blanc de François Place donnent à voir quelques images pour soutenir le récit.

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1  Voir l’édition du journal de son ancêtre par Bernard Plasse : Jean Pierre Plasse, Journal de bord d’un négrier, Marseille, Editions Le Mot et le reste, 2005, 147 p.

2  Actuellement Ouidah au Bénin. Sur ce lieu : Jean—Norbert Vignondé, Ouidah, port négrier et cité du repentir, in Cahiers d’Histoire89 | 2002 : Les enjeux de la mémoire

3  On pourra compléter avec : Bertrand Guillet, La Marie-Séraphique, navire négrier, Nantes, éditions MeMo, 2010, 187p.