Spécialisée dans l’édition de livres classiques, les Belles Lettres sortent un atlas historique en cette fin d’année 2020. L’Atlas historique du Proche-Orient est le fruit d’une collaboration avec l’Institut Français du Proche-Orient. Sous la direction de Martin Sauvage, ingénieur de recherche au CNRS, une cinquantaine de chercheurs français et étrangers (épigraphistes, archéologues, historiens), ont rédigé un atlas de cette région considérée comme le « berceau de notre civilisation » (Martin Sauvage). Dans l’équipe de rédacteurs, le lecteur retrouve notamment les auteurs du volume sur la Mésopotamie de la collection « Mondes anciens » chez Belin (Bertrand Lafont, Philippe Clancier, Aline Tenu).
Un atlas historique du Proche-Orient pré-classique à destination des chercheurs et des enseignants
Particulièrement imposant (30 cm par 38 cm) mais solide et aisément manipulable, cet atlas nous emmène dans une véritable promenade cartographique de la période allant de l’Epipaléolithique (-22 000 ans) jusqu’aux diadoques après l’effondrement de l’Empire d’Alexandre au IVe siècle avant Jésus-Christ. En 150 cartes, les auteurs présentent une lecture à la fois thématique et chronologique des principales mutations à l’oeuvre de l’Anatolie à l’Iran, en passant par la péninsule arabique, les côtes yéménites, égyptiennes et omanaises. Par exemple, les cartes présentant l’Empire achéménide permettent de situer précisément les territoires et frontières de cet empire s’étendant sur 3 continents (Afrique, Asie, Europe) entre le milieu du VIe siècle et le milieu du IVe siècle avant Jésus-Christ.
Les cartes réalisées par Martin Sauvage insistent particulièrement sur le relief et le milieu de cette région. Par exemple, un article écrit avec Bernard Geyer insiste sur les variations du trait de côte et des fleuves dans le Sud de la Mésopotamie entre -16 000 et -4000 (page 13). Les fouilles archéologiques, notamment celles menées par l’Institut Français du Proche-Orient basé à Beyrouth, ont permis de réaliser plusieurs cartes à l’échelle locale (Babylone, Persépolis, Hattusa, Suse, Ninive, Dur-Sarrukin). Ces plans peuvent permettre aux enseignants d’avoir une carte accompagnée d’un texte fiable et présentant les derniers résultats archéologiques. Par exemple, à la page 106, la ziggourat d’Al-Untas-Napirisa, fondée par un roi d’Elam du même nom entre -1340/-1300, située à 40 km de Suse, est au centre d’une cité enceinte par deux remparts.
L’immense richesse de l’ouvrage réside également dans le traitement didactique de régions généralement peu abordées. Plusieurs pages et cartes traitent de l’importance de la civilisation du Dilmun (Bahreïn) au IIe millénaire avant Jésus-Christ. Le rôle de carrefour dans les échanges à travers le Golfe persique est visible dans la domestication du dromadaire, du palmier-dattier, la vente de lapis-lazuli ou de perles. Par exemple, la carte de la page 52 se révèle pertinente dans la mesure où elle permet de comprendre le réseau commercial mis en avant pour le lapis-lazuli au IIIe millénaire avant Jésus-Christ. Depuis le Nord de l’Hindu Kush où se trouvent les principaux gisements, la pierre emprunte un réseau de routes commerciales de la Bactriane à la Mésopotamie, ou de l’Afghanistan actuel à la cité d’Ur en passant par l’actuel Pakistan (Harappa, Mohenjo Daro), la côte émiratie (Umm an-Nar) et l’île de Bahreïn.
A l’exception de très rares textes particulièrement complexes (ceux de Fanny Bocquentin à propos de la sédentarisation durant l’Epipaléolithique), les encarts sont particulièrement lisibles et compréhensibles, même sans bagage scientifique préalable sur la période. L’ouvrage se termine par une astucieuse chronologie (Epipaléolithique, Néolithique, Chalcolithique, âge du Bronze puis du fer), une volumineuse bibliographie (avec parfois une vingtaine d’ouvrages pour un texte d’un tiers de page) et un index des lieux de l’ensemble de la région (nom du site antique, du site actuel, région, coordonnées géographiques).
Le sommaire de cet atlas particulièrement précis est lisible ci-dessous ou en cliquant sur ce lien.
Source : extrait de la page VII, VIII et IX « l’Atlas historique du Proche-Orient ancien » publié sous la direction de M. Sauvage, Les Belles Lettres, Novembre 2020
Durant la lecture, une petite coquille a été repérée à la page 52. Une phrase est répétée à deux reprises dans la partie droite du texte. Ceci n’altère pas la très grande qualité, le sérieux et la précision affichée tout au long de l’ouvrage.
Initialement destiné aux chercheurs, cet atlas historique est clairement incontournable pour étudier ou enseigner le Proche-Orient préhistorique et historique. Il se révèlera particulièrement utile pour les professeurs devant enseigner le Proche-Orient ancien en sixième (« Premiers États, premières écritures ») ou aborder la « révolution néolithique » en classe de Terminale spécialité HGGSP.
Pour aller plus loin :
- Présentation de l’éditeur -> Lien
- La série d’entretiens avec les auteurs (présentation du livre, l’essor de l’agriculture, l’Empire achéménide, Persépolis) : -> Ci-dessous
Antoine BARONNET @ Clionautes