Berlin sera notre tombeau, Les derniers païens clôture tristement ce cycle d’une grande force. En effet, alors qu’il achevait son œuvre, Michel Koeniguer nous a quitté, au début du mois d’avril 2021. Scenario et story-board étaient achevés, restaient les ultimes planches à dessiner. C’est Vincenzo Giordano qui a repris le flambeau, tandis que Fabien Alquier a intégralement colorisé les planches.

Présentation de l’éditeur

Berlin, 29 avril 1945… La ville est en ruine, détruite par les coups que se portent une armée rouge rugissante et quelques troupes allemandes à l’agonie. La Division Charlemagne est soumise aux bombardements et à l’avancée d’une force supérieure. La fin est proche. Pour la poignée d’hommes restants, tout espoir a disparu. Seule solution : attaquer pour se libérer un passage à travers les hordes rouges !

La fin d’une série incontournable.

 

Nécessairement cet album prend une saveur particulièrement amère et singulière. Pour autant, afin de respecter l’homme et son œuvre, il faut plonger dans l’enfer de Berlin, en ce mois d’avril 1945 pour, une dernière fois, suivre Claudel, Couturier, Rabaux et les autres, gardant en mémoire toute la passion et la rigueur que Michel Koeniguer a su insuffler à ce cycle.

 

Berlin sera notre tombeau, le crépuscule des dieux

Reprenant les approches des précédents tomes, nous suivons donc, entre deux flashsbacks expliquant les causes profondes qui ont mené Claudel dans ce combat désespéré, ces Français engagés au sein de la Waffen-SS.  Comme les Danois, Norvégiens ou autres adversaires résolus du communisme, ces hommes errent dans une ville en cendres. Avec force, le dessin et la colorisation mettent en scène ces ombres qui se battent ici pour une rue, là pour une cave. Pulvériser quelques T-34 à grands coups de Panzerfaust n’y changera rien. Le pilonnage en règle, rappelé de façon régulière par des explosions ou des batteries d’artillerie en action, ne laisse aucune place au doute. Les dialogues, toujours aussi efficaces, sont de toute façon limpides. Ces hommes vont mourir, ils le savent, et y sont résignés. Ils se battent pour leurs compagnons, pour une hypothétique percée qui devrait les mener ailleurs, près de Dievenow, pour l’inconnu.

Michel Koeniguer a su admirablement insuffler une âme à ces combattants dans ce dernier tome. Les Soviétiques sont là pour offrir leurs corps, les derniers Allemands, nazis jusqu’à la mort, traquent les derniers traitres. Les femmes, pauvres victimes expiatoires de la furie vengeresse des troupes de Staline ne sont pas occultées, tout comme leur sort funeste et les multiples viols. Mais jusqu’au bout, ce sont bien ces soldats qui, citant Camerone, livrent des derniers combats avec un mélange d’humanité désespérée mais aussi une force implacable. Car ils sont des combattants. Toute occasion de frapper, une dernière fois, est prise. Cette petite troupe a pris de l’épaisseur et nous parvenons, enfin, à nous attacher à eux. C’est que ce cycle de trois volumes doit être jugé dans sa globalité. Plus on s’enfonce au cœur de l’enfer et des combats désespérés, plus on peut toucher du doigt une forme d’humanité, de recherche de rédemption.

Michel Koeniguer parvient, ce qui relève du véritable tour de force, dans la dernière partie de la BD, à laisser la porte ouverte à un dénouement heureux. Une percée ? Un avenir ? Ce sera à vous de le découvrir.

Une conclusion d’excellente facture pour Berlin sera notre tombeau, cycle marquant pour la BD consacrée à la seconde guerre mondiale. Le dessin, le scenario, les personnages, la rigueur du travail de recherche sont autant d’éléments qui ne peuvent laisser indifférent. Rare sont les bande-dessinées qui peuvent se targuer, sur des sujets aussi pointus, de relever du niveau d’une recherche universitaire. Le souci du détail technique est bluffant.

Merci pour tout Michel Koeniguer. Vous allez manquer à la BD française.