Le tome 2 s’était achevé sur l’arrivée de l’expédition au trou bleu de Tristan da Cunha. Sur place, une mauvaise surprise les attendait : d’incessantes éruptions volcaniques, des projections de lave et un nuage de cendres rendent l’accès au trou impossible. La zone des Açores, également, subit des éruptions volcaniques sous-marines, accompagnées de l’apparition d’aurores boréales. Les scientifiques du présent soupçonnent l’arrivée d’une méga-éruption volcanique, qui pourrait bien raser la Terre et se propager dans le temps via les failles spatio-temporelles. De plus, l’instabilité du passage rend compliqué le sauvetage de l’expédition par leurs alliés restés dans le présent.

Malgré les risques et l’instabilité du trou bleu des Açores, dont ils ignorent tout, les protagonistes décident d’une expédition de la dernière chance dans sa direction, afin d’échapper à une ère Jurassique des plus hostiles. Néanmoins, les personnages doivent désormais parcourir plus de 4 000 kilomètres en une semaine. L’absurdité et l’ampleur de cette épreuve les plongent dans le désespoir.

Alors que l’abattement s’installe, un nouveau protagoniste apparaît. Il s’agit du père de Margie, la jeune journaliste, un riche magnat du pétrole. Il dépense sans compter pour sauver sa fille et la ramener dans le présent. Ce rebondissement achève la première partie, sans dinosaure du manga. Après cette longue introduction, le rythme s’accélère.

L’expédition de la dernière chance

Une fois l’expédition entamée, l’action et les rebondissements s’enchaînent à un rythme soutenu. Le groupe de Jean, mis sous pression par l’épée de Damoclès au-dessus de leur tête, lutte désespérément pour sa survie. Les tensions et inimitiés, déjà bien présentes dans le précédent tome, atteignent leur paroxysme.

A mesure que l’expédition avance, les difficultés s’accumulent. L’environnement très hostile et les réactions extrêmes des personnages leur font perdre un temps précieux. Le début du voyage est un enchaînement d’attaques de dinosaures et d’affrontements entre les personnages. Glock tue son second, menace de son couteau Pat, l’enfant du groupe, et va jusqu’à incendier la forêt pour pouvoir progresser plus vite. Au terme d’un violent affrontement avec le lieutenant Jean Hart, il quitte le groupe, plongeant dans une folie autodestructrice, persuadé que la mort du reste du groupe conditionne sa propre survie. Il devient alors, presque plus que les dinosaures et l’environnement hostile, le plus dangereux des prédateurs, sabotant les plans des héros, les attaquant continuellement et cherchant à les doubler pour être le seul à atteindre le trou des Açores. Au-delà de sa volonté de survivre, il craint leurs témoignages qui le feraient passer en cours martiale. De plus, les personnages adoptent des comportements étranges, parfois aux limites de la folie, le désespoir et la fatigue leur faisant perdre leur lucidité.

Face aux multiples embûches, les personnages s’adaptent, permettant d’ingénieux retournement de situations. Après l’incendie de la forêt, ils parviennent à sauter sur le dos de dinosaures au long cou, des sauropodes, parcourant un millier de kilomètres en moins de deux jours. Suite à cela, le groupe de Jean tombe sur un nid et une piste d’atterrissage de ptérosaures, des dinosaures ailés. Cela leur permet de concevoir une technique de vol artisanale à partir des ailes de ptérosaures et de résines. Ces ailes leur permettent d’aller quasiment au bout de leur périple, malgré les attaques de Glock et des dinosaures. C’est également l’occasion pour l’auteur de faire évoluer la relation entre Jean et Camelot, le professeur anglais spécialiste du Jurassique, qui se découvrent des sentiments amoureux.

Après de nombreux autres rebondissements, les héros parviennent au point de rendez-vous sur un radeau. Le père de Margie fait alors son apparition avec les secours. Malheureusement, seul un sous-marin a réussi la traversée vers le Jurassique, condamnant les héros à choisir qui sera sauvé et qui ne le sera pas. Margie et Harry, qui a été grièvement blessé, le couple de journaliste, ainsi que Pat, la petite-fille du professeur Camelot, sont choisis pour retourner dans le présent, l’instabilité du trou bleu des Açores ne permettant qu’un seul voyage. Suite à ce triste rebondissement, un ultime affrontement entre Jean et Glock, qui s’achève sur la mort de ce dernier, mangé par un dinosaure aquatique.

Le dénouement

Le dénouement suit immédiatement cet affrontement. Alors que les héros sont attaqués de toutes parts par des dinosaures aquatiques et que leur mort semble certaine, un hélicoptère apparaît. A son bord, une mystérieuse jeune femme vient au secours des derniers survivants. Il s’agit de Pat devenue adulte. 12 ans se sont écoulés dans le présent. Les avancées technologiques et l’amélioration de la situation dans le temps présent (le bouclier terrestre s’étant régénéré et les éruptions volcaniques s’étant calmées) permettent de monter une expédition via le trou bleu de Tristan da Cunha, celui des Açores n’étant définitivement plus exploitable. Après des retrouvailles fortes en émotions, nos héros parviennent à rejoindre leur époque, où ils apprennent qu’un couple de journaliste a financé leur sauvetage. Il s’agit de Margie et Harry, auteur d’un best-seller racontant leur voyage dans le Jurassique.

Une conclusion à la hauteur de la série

Avec ce dernier tome, Yokinubo Hoshino, l’un des piliers et auteur incontournable de Science-fiction au Japon, offre une belle fin à la série Blue World. L’intrigue est restée prenante et bien construite tout au long des trois tomes, avec un suspense haletant et de nombreux rebondissements. Comme dans les précédents tomes, les espèces du Jurassique sont mises en avant par les dialogues des personnages, mais aussi par la mise en page qui permet de profiter pleinement des superbes doubles planches. Les explications scientifiques et le contenu documentaire sont toujours présents. Les questions des supra-éruptions volcaniques, ainsi que des champs et flux magnétiques, sont mises en avant. Ces explications permettent de cultiver le lecteur, tout en rendant crédible la possibilité d’un voyage spatio-temporel. Dans ce tome, les considérations géopolitiques du tome 1 cèdent pleinement le pas à la survie, qui devient le centre de l’intrigue. C’est le seul point qui m’a laissée légèrement sur ma faim.

Si une exploitation pédagogique en classe paraît compliquée, l’œuvre de Yokinubo Hoshino offre une vision des dérives de la technologie et de la volonté de surexploiter les ressources, mettant ainsi en péril le passé, le présent et le futur. Des extraits de Blue World peuvent être exploités pour faire le lien entre géographie et fiction, ou encore, pour proposer des pistes de lectures en lien avec le programme.