Napoléon, exilé à Sainte-Hélène par les vainqueurs de Waterloo, a-t-il découvert, lors de sa campagne d’Égypte, le trésor de guerre d’Alexandre le Grand ? Dans une impitoyable partie de poker menteur, Lowe, gardien inflexible de l’Empereur déchu, et les commissaires des puissances alliées, affrontent Bonaparte, qui demeure un redoutable stratège. L’or est son meilleur atout pour fuir l’île.

Epée à la main, l’Empereur au regard déterminé, surplombe une falaise, dans un ciel crépusculaire. La couverture de cet album, le troisième volet de la série Buonaparte, conçue par les scénaristes, Rudi Miel et Fabienne Pigière, et le dessinateur Ivan Gil, met remarquablement en scène le sous-titre, Jugement dernier, de cette fiction qui se déroule durant l’exil, ponctuée de retours sur le passé de l’épopée napoléonienne.

Après Sainte-Hélène (tome 1), et Trésor de guerre (tome 2), l’intrigue se poursuit. Dès les premières planches, on assiste à une scène bien étrange. Lors d’une promenade solitaire à cheval dans la campagne hélénienne, Napoléon en uniforme de colonel de chasseur à cheval de la Garde, recouvert de la mythique redingote grise et coiffé du petit chapeau porté en bataille, est capturé par un groupe de compatriotes qui l’accusent d’avoir fait tuer des insurgés royalistes en 1795 sur les marches de l’église Saint-Roch à Paris faisant trois cents victimes, d’avoir ordonné l’exécution du duc d’Enghien, et d’avoir refusé de restaurer la monarchie après le coup d’État du 18 Brumaire. Ces individus attachent l’Empereur a un arbre et s’apprêtent à le fusiller…

Le parti pris de ne pas construire un récit linéaire, permet d’entretenir le suspense et de diluer l’intrigue.

Le gouverneur anglais Hudson Lowe se préoccupe toujours d’une tentative d’évasion de l’exilé. On lui apporte une cassette appartenant au général français Montchenu en visite sur l’île, qu’un voleur a abandonné dans sa fuite. Le coffre contient un témoignage d’un mamelouk, qui intéresse particulièrement le geôlier de l’Empereur, et qui mentionne une oasis qui abrite un sanctuaire dédié à Amon renfermant des objets inestimables. Montchenu révèle à Lowe que la France cherche à localiser ce trésor que Napoléon aurait déplacé de l’Oasis rouge.

Albine de Montholon utilise la séduction pour essayer d’obtenir de Lowe son départ pour l’Europe. En contrepartie, le gouverneur lui demande de fournir des informations pour localiser cet énigmatique trésor d’Alexandre. Mais elle joue double jeu, et Napoléon exploite l’obsession de son geôlier.

De son côté Montchenu avec ses hommes, qui a délivré l’Empereur des compatriotes qui voulaient l’exécuter, rappelle qu’il a conclu un accord : le trésor en échange de la liberté.
A l’aide d’une montgolfière, Napoléon doit rejoindre un navire qui mouille au large des côtes de l’île de Sainte-Hélène. Lowe, furieux, réussit à empêcher l’évasion. Le ballon échoue sur les eaux, après que le navire qui devait accueillir l’Empereur a essuyé une canonnade.

On apprend que le général Montholon a informé les Anglais de ce plan d’évasion. Il avoue à sa femme craindre que Napoléon utilise ce trésor égyptien pour relancer de nouvelles guerres en revenant au pouvoir et qu’il ne laisserait rien dans son testament au couple. Lowe veut connaître l’informateur anonyme, mais se refuse à accuser les commissaires de Louis XVIII, afin d’éviter un incident diplomatique avec ses alliés.

Le gouverneur de l’île ne désespère pourtant pas de mettre la main sur le trésor en laissant partir Albine de Montholon en Europe, et en promettant de faire conduire l’exilé en Égypte contre une résidence à Alexandrie. Mais un pli découvert dans les bagages d’Albine inquiète encore Lowe…

A nouveau dans ce tome 3, la multiplicité des temps et des lieux apporte de la dynamique et du rythme au récit. La mise en couleur de cet album est particulièrement réussie.

En fin d’ouvrage, comme dans les précédents tomes, un ensemble d’éclairages apporte une contextualisation historique à certains éléments évoqués dans cette fiction bien documentée.