Après un très bref rappel du contexte de la construction du mur à l’été 1961, le récit démarre tambour battant en plongeant d’emblée le lecteur dans une succession de scènes d’évasion au rythme échevelé.

On découvre quatre protagonistes, aux profils et aux motivations différents, ainsi que la tâche qui leur est confiée par un couple improbable et mystérieux.

Les pages et les plans se succèdent en 64 pages grand format – l’objet est agréable à lire- qui évoquent pêle-mêle un story-board de western, un thriller d’évasion à la Steven Soderbergh, des récits d’espionnage des années 1970, l’émergence de la pop culture et bien sûr la tradition de l’école belge. Le tempo de l’histoire semble encore accéléré par la variété des plans et des formats et ce caractère très cinématographique donne au récit beaucoup de vivacité et un certain charme – même s’il nuit par moment à la compréhension du récit.

A la lecture de cette BD, on peut apprécier en particulier le décalage entre une trame de récit assez datée et stéréotypée (le récit d’évasion pendant la Guerre Froide) et son traitement graphique. Les récits liés à la Guerre Froide sont souvent associés à une charte graphique entre gris clair et gris foncé, dans une atmosphère spectrale et crépusculaire. Ici, grâce à la diversité des plans, les auteurs mettent au contraire en valeur la diversité des personnages et de leurs motivations, qu’elles soient triviales ou plus nobles. Les éléments historiques sont bien présents – notamment la Stasi ou l’arrivée des Soviétiques à Berlin- mais l’accent est d’abord mis sur l’humanité des personnages.

A contrario, ce foisonnement graphique se révèle aussi une faiblesse : en 64 pages, le principal argument de l’histoire – une préparation d’évasion massive- se fond un peu dans les différentes trajectoires individuelles, et certaines ellipses narratives rendent par moment le récit franchement difficile à suivre et un peu brouillon.

Il n’en reste pas moins que cette BD, entre les mains d’élèves de 3e ou de lycée, peut être mise à profit en ce qu’elle donne un peu d’incarnation et un peu de nuances à un épisode qui n’aura été bien souvent que survolé en classe. Derrière le mur apporte de la complexité et de la trivialité à un chapitre où l’on insiste beaucoup sur l’idéologie et sur la dualité du monde : cet apport ne peut qu’être intéressant !

Le résumé de l’éditeur

Les auteurs

Kid Toussaint est un scénariste belge francophone qui a produit des œuvres diverses (Elles sur l’adolescence, Ennemis sur la Guerre de Sécession), dont beaucoup ont rencontré un large écho. Tristan Josse a réalisé sa première BD avec le Gecko paru chez Akileos en 2018. Il a un diplôme de dessinateur-concepteur, option BD/illustration qu’il a obtenu en 2014 à l’école Émile Cohl de Lyon. De l’autre côté du mur est sa troisième bande dessinée, et c’est la deuxième collaboration entre Kid Toussaint et lui.