Paru aux éditions Kurokawa en 2019 au Japon, et traduit pour la première fois en français en cette année, le manga Élisabeth Ier l’ambition d’une reine, que l’on peut rattacher au style seinen, poursuit l’ambition de la collection KuroSavoir : présenter sous forme dessinée, et à un public nippon, les grandes figures historiques du monde occidental (Malthus, Marie-Antoinette, Beethoven, Jean-Jacques Rousseau etc.).

Ce volume, qui concerne la dernière reine de la dynastie Tudor, revient sur le parcours étonnant et peu commun de la fille d’Henri VIII et d’Anne Boleyn. La première partie de sa vie fut pour le moins bouleversante : mal accueillie par son père, qui attendait un héritier mal ; chahutée dans sa petite enfance par les remous religieux de l’Angleterre qui avait rompu avec Rome pour permettre le remariage de son père avec sa mère et qu’elle règlera une fois au pouvoir ; privée de son droit de succession à la mort de sa mère, tombée en disgrâce, et la naissance de son petit frère Édouard ; emprisonnée à la tour de Londres dont elle ressort vivante : Elizabeth a survécu à cette succession de coups du sort. Malgré tout, par la mort successive de son frère Édouard et de sa demi-sœur Marie Tudor, Élisabeth accède au trône à 25 ans.

L’essentiel du manga revient alors sur les grandes étapes de ce long règne élisabéthain. Reine d’un petit pays, Élisabeth parvient grâce à de multiples réformes (notamment financières afin de redresser les comptes de la monarchie anglaise) à redresser la situation du pays et à le réintégrer dans le concert des nations occidentales. Courtisée, Élisabeth repoussera tout que les demandes de mariage, déclarant être déjà mariée à l’Angleterre et à son peuple.

Le plus grand des défis du règne élisabéthain fut la lutte contre l’influence catholique tout entière portée par sa cousine Marie Stuart reine d’Écosse. Cette longue rivalité, portée sur plus de 20 ans, se termine par l’exécution de la reine écossaise reconnue coupable de tentative de coup d’État. Le manga nous dépeint une Élisabeth hésitante face à son obligation royale d’éliminer toute concurrence à son pouvoir, dans une volonté globale de l’ouvrage de donner un aspect sensible à la reine Ceci est sensible notamment dans la désignation de Jacques, fils de Marie Stuart, comme héritier d’Elisabeth.

 

Loin d’être simple manga généraliste, Élisabeth Ier l’ambition d’une reine apporte moult détails et indications biographiques sur des individus importants du règne d’Elizabeth : citons Francis Drake le célèbre corsaire ou encore William Cécil. Nous pourrions citer aussi Robert Dudley le compte de Leicester, grand ami d’Elizabeth depuis sa plus tendre enfance. Et c’est là que repose l’intérêt principal du manga : offrir des connaissances poussées pour un public adolescent, et ne faisant pas d’impair sur des événements importants de ce grand règne anglais. Le lecteur pourra d’ailleurs retrouver enfin de manga, un dossier de 16 pages revenant sur Élisabeth, son époque, ses alliés et ses grandes réalisations, dans un style tout à fait nippon La page « classement des soutiens : voici le top cinq des soutiens d’Elisabeth première ! » est particulièrement plaisante par son décalage.

On l’aura compris, le manga Élisabeth Ier l’ambition d’une reine et qu’un ouvrage réussi, parvenant à concilier à la fois un style graphique efficace au profit de l’érudition des jeunes adolescents. Il s’agit d’un manga que l’on pourrait très bien retrouver sur les rayonnages des CDI et nous le conseillons d’ailleurs grandement comme la précédente BD chroniquée sur la Cliothèque.