Géohistoire – Des peuples qui traversent les siècles 

Présent cette année à nos côtés pour aider nos candidats au concours à préparer la question de géographie régionale sur l’Asie du Sud-Est, Michel Bruneau qui a récemment publié un ouvrage sur l’Eurasie, continue à défricher cet immense chantier de logements histoire, accompagné entre autres par Christian Grataloup qui signe une postface à cet ouvrage.
Lorsque l’on trouve comme aujourd’hui ce volume dans sa boîte aux lettres, on reçoit son titre comme une évidence. Depuis des millénaires, sur leur territoire ou dans les diasporas, rares sont les peuples qui sont toujours présents, en tant que tels.

Les masses humaines, indiennes et chinoises, installés sur leurs états continents, pendant un temps isolé du monde, quoique partiellement, s’imposent tout naturellement dans cette liste. À côté de l’empire du milieu et de l’Inde, états qui ont franchi allègrement la barre du milliard d’habitants, on trouve aussi l’Iran, 85 millions d’habitants aujourd’hui, mais héritier d’un empire multimillénaire. Rien de comparable du point de vue numérique et pourtant.
Des ruines de Persepolis à la république islamique d’Iran, prête à franchir le seuil nucléaire, il y a bien une continuité. Entre l’empire perse qui déployait son immense armée et ses chars de bataille et les missiles balistiques Khorramshahr d’une portée présumée de 4000 km, on retrouve la même capacité de projection pour assurer son indépendance et sa souveraineté.
Du point de vue numérique les Grecs, les juifs et encore les Arméniens, sur des territoires réduits, ingrats, on construit des civilisations, écrit des textes fondateurs, et peuvent jouer, c’est le cas d’Israël, un rôle international sans aucune mesure avec leur poids démographique.
Car au-delà des dynasties, des empires constitués, ces entités géopolitiques forment des peuples, et pas seulement des populations. Des peuples aussi, plus que des nations, même si les deux notions se recoupent. Mais le peuple est aussi une catégorie politique qui est liée à celle d’un État.

Géohistoire des peuples-monde – Un nouveau concept

Michel Bruneau a été à l’origine de ce concept, celui de peuple–monde de la longue durée, et la filiation avec Fernand Braudel et l’économie monde semble évidente. On y rajoutera, à ces peuples monde de la longue durée, le concept de peuples résilients, vivant sur les marges des empires, mais sans y être assimilés. Les juifs, entre l’Égypte et les empires mésopotamiens, les Arméniens entre empire byzantin et empire perse, ont occupé des places particulières et su conserver, grâce à leur langue, leur religion, leur particularisme.
Ces peuples monde ont pu construire des structures étatiques, des modèles politiques, conquis des territoires, imposé leurs dieux et leurs lois, assimilé leurs envahisseurs parfois. C’est le cas de la Chine ou de l’Inde, aux immenses territoires et aux foules innombrables. L’empire de Cyrus a su également se projeter, aux quatre parties du monde, comme le précise la titulature impériale du Grand Roi. Mais son expansion, devenue faiblesse, s’est retrouvée réduite à ces hauts plateaux qui forment l’essentiel de l’actuel territoire iranien.
La projection de ces peuples c’est aussi celle de leurs diasporas, juives et arméniennes, grecques dans une certaine mesure. Peuples de la mer pour ces derniers, ils ont pu dominer un temps le bassin méditerranéen, installer des communautés, déployer les navires de leurs armateurs, dans toutes les parties du monde. Mais c’est leur langue, leur philosophie, leur conception de l’homme et du monde, qui ont été les outils de leurs conquêtes, encore présentes, voire dominantes, dans le monde occidental.