Professeur en classes préparatoires, Michel Nazet s’essaye à l’exercice de la vulgarisation en proposant, à l’aide d’une approche pluridisciplinaire, une géopolitique « pour tous ». Trois parties détaillées en 14 chapitres structurent son propos.

La première se veut épistémologie de la discipline. On peut notamment y comprendre que l’usage même du terme « géopolitique » apparu au XIXème siècle a fluctué (la « géohistoire » de Braudel lui fut préféré jusqu’à son retour dans les années 1970) et que l’aspect « conflictuel » des relations entre Etats est un élément fort de sa définition. En accentuant peut-être un peu trop sur les biographies, les différents courants sont passés en revue, de Ratzel à la très controversée théorie du choc des civilisations de Huntington. N’assimilant pas la géopolitique à une science car sans valeur prédictive, l’auteur évoque l’image d’un « saladier » où les différents ingrédients géographiques, historiques et structurels seraient harmonieusement mélangés pour permettre une lecture généraliste du monde.

La suite de l’ouvrage concerne davantage le monde comme un objet d’observation aux contours incertains. Malgré un titre un plutôt lourd pour ne rien oublier « le cadre perturbant et perturbé du nouvel espace politique et géoéconomique mondial issu des bouleversements du XXème siècle et de la mondialisation », les problèmes de morcellements étatiques ainsi que les bienfaits et méfaits de la mondialisation sont clairement exposés. Michel Nazet traite ensuite des organisations internationales, peu considérées dans le débat géopolitique où les Etats gardent le contrôle. De même, il évoque ensuite des ONG utiles mais critiquées sur leur instrumentalisation de l’aide internationale. Les points noirs liés aux mafias, à la domination des FMN et à l’aspect « politiquement correct » du débat sur le développement durable viennent compléter l’analyse.

La troisième partie est étude de cas régionaux. Doit-on s’étonner que celle sur les Etats-Unis soit présente dans la partie précédente ? Leur leadership reste incertain malgré leur formidable capacité à s’adapter. Six autres zones sont donc développées :
– l’Europe et son lien délicat avec la Russie,
– l’Arc des crises qu’il ne faut pas réduire aux problèmes liés à l’Islam,
– l’Afrique et son défi de modernisation des structures étatiques pour attirer le développement,
– une Amérique du Sud à priori mieux armée que l’Afrique mais gangrénée par le sentiment anti Etats-Unis,
– une Asie reine du XXIème siècle mais où se pose la question de la complémentarité des intérêts japonais, chinois et indien face aux Etats-Unis
– des espaces périphériques (océans, pôles…) peu concernées par la question.

Michel Nazet en conclut sur la conquête spatiale : est-ce là le dernier objet d’exploration géopolitique ?

En définitive, l’ouvrage remplit son objectif : rendre ces questions claires et accessibles à tous. Des encadrés, des cartes, une bibliographie triée par chapitres et surtout des conclusions intermédiaires sous la forme d’un « essentiel » facilitent la lecture et la compréhension du texte.

Xavier Leroux