Construction politique, diplomatique, militaire et culturelle au croisement de l’espace et du temps, l’empire constitue une notion particulièrement pertinente pour décrire et comprendre le monde du Moyen-Âge. Est empire un ensemble qui ne peut s’intégrer à aucun autre ; est empereur celui qui proclame n’avoir au-dessus de lui aucune puissance humaine, et qui le prouve. Entre le Ve et le XVe siècle, de telles entités se firent et se défirent presque partout sur la planète – certaines furent éphémères, d’autres plus durables.

L’objectif de ce livre, dirigé par médiéviste Sylvain Gouguenheim et qui réunit d’éminents historiens, est de faire le tour de ces empires médiévaux (seize au total).

À cette fin, l’ouvrage est divisé en trois parties qui regroupent, pour chacune, une catégorie d’empires.

La première partie réunit l’étude des « empires-mondes » et empires à vocation ou prétention universelle. C’est ici que l’on retrouve les grands empires les plus connus : carolingien ou la renaissance de Rome, byzantin, abbasside, Mongol, ottoman et chinois.

La deuxième partie s’intéresse aux empires clos ou cantonnés : l’Empire bulgare (mythe historiographique ou réalité historique ?), l’ascension et la chute de l’Empire serbe, l’empereur et le prince impérial dans le Japon ancien et médiéval, les Empires solaires des Amériques et l’Empire latin de Constantinople envisagé comme l’ombre d’un empire.

Enfin, la troisième partie interroge les empires « éclatés » aux territoires dispersés. Il est ici question de l’empire inachevé allemand (d’Otton le Grand à Maximilien), de l’Empire normand (ou des Normands), de l’Empire Plantagenêt, des trajectoires impériales en Adriatique à travers l’exemple médiéval vénitien et enfin de Srivijaya, une thalassocratie malaise.

Sont ainsi mis en parallèle des structures politiques a priori semblables au sein d’une large époque et à l’échelle mondiale. Manquent cependant les empires africains, l’Empire khazar et celui des Khmers, faute d’avoir pu trouver la collaboration d’experts francophones sur ces sujets. Mais Sylvain Gouguenheim a déjà annoncé que ces derniers seront ajoutés lors de la prochaine édition de l’ouvrage.

Chaque article est accompagné d’une carte, largement bienvenue qui permet une meilleure visualisation et compréhension de ces entités territoriales médiévales. Les contributions sont relativement courtes mais complètes et synthétiques. Il n’est pas indispensable d’être spécialiste de l’histoire médiévale des Amériques ou de la Serbie pour pouvoir avancer dans la lecture de cet ouvrage passionnant.

Pierre Bonnet